Après cinq ans de procédure, les héritiers de Kurt Schwitters viennent d’obtenir gain de cause dans le conflit les opposant à la galerie Marlborough International Fine Art. Le juge a approuvé la rupture du contrat par lequel le fils de l’artiste, alors sénile, avait confié la gestion des œuvres à la galerie.
OSLO - Les héritiers de Kurt Schwitters, l’un des fondateurs du mouvement Dada, ont remporté le procès qui les opposait depuis 1993 à Marlborough International Fine Art. La multinationale de l’art, établie à Londres et à New York, a également perdu les droits d’exclusivité sur l’œuvre de l’artiste, qu’elle avait obtenus en 1963 par mandat de son fils Ernst Schwitters.
L’histoire trouve son origine dans les passions séniles de ce même Ernst : après avoir confié à la galerie la gestion d’environ six cents œuvres de son père et de certains de ses illustres contemporains, comme Picasso, Miró et Kandinsky, l’héritier s’éprend d’une certaine Kathie Ashley, de trente ans sa cadette. Pour filer le parfait amour avec la belle Anglaise, le riche Ernst abandonne son épouse Lola à Oslo, mais les affaires de cœur se transforment rapidemement en problèmes cardiaques. En 1993, une attaque d’apoplexie le condamne au fauteuil roulant et l’épouse légitime reprend alors l’avantage. Elle assigne Kathie Ashley devant un tribunal, lui reprochant d’avoir abusé d’un incapable. À défaut d’une condamnation de la maîtresse de son mari, elle obtient le retour de l’infidèle à Oslo et sa mise à l’hospice. Il est alors placé sous la surveillance d’un tuteur norvégien, chargé de coordonner les rapports entre les héritiers Schwitters et Marlborough International Fine Art. Ernst meurt quelques mois après son retour en Norvège et une nouvelle bataille s’engage devant les tribunaux. En accord avec les héritiers, le tuteur – resté anonyme – dénonce le contrat passé avec la galerie, qu’il accuse de tenir secret le lieu où était entreposé l’essentiel de la collection et de retarder le paiement des quelque 24 millions de francs dûs à la famille après la vente – pour environ 37,5 millions de francs – de la plus grande partie des œuvres au Sprengel Museum de Hanovre, la ville natale de Schwitters. Marlborough contre-attaque en réclamant, elle aussi, les 24 millions de francs à la famille pour rupture de contrat abusive et provision compensatoire des commissions sur les ventes futures, irrémédiablement compromises.
Le juge a estimé que la rupture de contrat était justifiée et a condamné la galerie au paiement des frais de justice, soit environ 1,7 million de francs. Ce n’est pas la première fois que Marlborough sort vaincue de l’enceinte d’un tribunal pour des affaires analogues. En 1974, la cour de Manhattan avait condamné Frank Lloyd, le fondateur de la galerie, et les exécuteurs testamentaires de Rothko à verser à Kathe, fille de l’artiste, plusieurs millions pour avoir pris des commissions sur les ventes supérieures à 50 %.
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Fin du procès Schwitters
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°58 du 10 avril 1998, avec le titre suivant : Fin du procès Schwitters