New York

Up & down

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 14 novembre 2011 - 819 mots

Les ventes du soir de Christie’s et Sotheby’s ont été marquées par de nombreux records et quelques invendus.

NEW YORK - Les ventes de New York (Lire aussi l'article « New York New York ») ont démarré avec l’art impressionniste et moderne, le 1er novembre à New York chez Christie’s, avec 31 lots ravalés, parmi lesquels des pièces majeures. Si le chef-d’œuvre de la soirée, la sculpture impressionniste d’Edgar Degas, Petite danseuse de quatorze ans (1879-1881) n’a pas trouvé preneur, ce n’est pas seulement à cause de son estimation élevée – de 25 à 35 millions de dollars (18 à 25 millions d’euros) –, que Thomas Seydoux, directeur international du département chez Christie’s, trouvait d’abord « méritée », avant de la qualifier de « décourageante ». On se souvient pourtant qu’un autre exemplaire de ce bronze avait été adjugé 13,2 millions de livres sterling (14,8 millions d’euros), le 3 février 2009 à Londres chez Sotheby’s. De telles plus-values ne sont pas si rares dans l’art moderne. Par exemple, Le Pont d’Argenteuil et la Seine (1883) de Gustave Caillebotte, emporté le 2 novembre chez Sotheby’s, au prix record de 18 millions de dollars, avait été vendu pour 8,4 millions de dollars, le 6 novembre 2008 à New York chez Christie’s. Sotheby’s avait anticipé la hausse en l’estimant à 12 millions de dollars.

Pour en revenir au bronze de Degas, il s’agissait d’une pièce exceptionnelle et rare, éditée à une vingtaine d’exemplaires. Mais deux exemplaires auraient été dernièrement présentés en ventes privées autour de 20 millions de dollars pièce. Il n’est donc pas si étonnant que celui-ci n’ait pas éveillé les appétits. Quid des deux toiles importantes de Pablo Picasso, estimées 12 millions à 18 millions de dollars chacune et restées sur le carreau avec le Degas ? La belle Tête de femme au chapeau mauve (1939), portrait de Dora Maar, n’était pas d’une grande fraîcheur, ce que sanctionnent généralement les collectionneurs. Le tableau avait été vu à plusieurs reprises sur le marché. Quant à la Femme endormie (1935), superbe portrait de Marie-Thérèse Walter, les spécialistes de la maison de ventes auraient expliqué au vendeur qu’il existait trop de portraits de Marie-Thérèse sur le marché. Le tableau était pourtant tout à fait désirable en regard de la somme demandée. En vérité, l’échec cuisant du Degas avait tellement refroidi l’ambiance que les amateurs ne se sont pas manifestés devant la Femme endormie. Peut-être Christie’s proposera-t-il un after sale à un prix honorable au propriétaire de la toile…

En temps normal, le marché réagit positivement à un ensemble de critères qui sont la qualité de l’œuvre, son sujet, sa période d’exécution, sa rareté, sa fraîcheur sur le marché, son état de conservation, sa provenance et éventuellement son format. Une estimation attractive est un plus. Litzlberg am Attersee (1914-1915), tableau de Gustav Klimt, avait tout cela. Volée par les nazis et récemment restituée par le Musem der Moderne de Salzburg au petit-fils de sa propriétaire, la toile de 1,10 x 1,10 m a largement dépassé son estimation de 25 millions de dollars pour atteindre 40,4 millions de dollars, le deuxième prix pour l’artiste.

Clyfford Still réévalué
Les vedettes des ventes d’art contemporain sont, chez Christie’s, I Can See the Whole Room… and There’s Nobody in It ! (1961), un tableau historique de Roy Lichtenstein parti au prix record de 43,2 millions de dollars ; Spider (1996), bronze monumental de Louise Bourgeois adjugé au prix record de 10,7 millions de dollars, et Rhein II (1999), tirage couleur chromogène d’Andreas Gursky vendu 4,3 millions de dollars, record pour l’artiste et aussi pour une photographie vendue aux enchères.
Ce n’est pas toujours un avantage de passer en premier. Car si un même artiste est présenté dans les deux ventes successives, les acheteurs vont préférer miser sur les plus belles œuvres. Lorsque les œuvres moins importantes se présentent dans la première vacation, les collectionneurs ont tendance à se réserver pour la suite. C’est ce qui s’est passé avec le tableau Frau Niepenberg (1965), de Gerhard Richter, estimé 7 à 9 millions de dollars chez Christie’s. Les amateurs l’ont boudé parce qu’ils attendaient la sélection de Sotheby’s, soit un ensemble de huit toiles provenant d’une collection particulière baptisée « Abstraction Figuration », vendue 74,3 millions de dollars (le double de l’estimation haute). Disputée par quatre enchérisseurs, une peinture abstraite Abstraktes Bild (1997) s’est envolée à 20,8 millions de dollars. La vente de Sotheby’s a été couronnée par la dispersion de quatre œuvres du peintre expressionniste abstrait Clyfford Still, confiées à la maison de ventes par la ville de Denver (Colorado). Les enchères ont grimpé jusqu’à 61,6 millions de dollars pour 1949-A-No.1, réévaluant sérieusement la cote de Still. En revanche, un tableau historique pop art du Français Martial Raysse, estimé 2 millions de dollars, n’a pas trouvé preneur. Selon Grégoire Billault, spécialiste international chez Sotheby’s, « ce tableau avait pourtant tout pour lui. Il y a toujours une incompréhension dans une vente ».

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°357 du 18 novembre 2011, avec le titre suivant : Up & down

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