Avant de donner au peintre la place qu’il mérite dans ses futures salles, le Musée de Picardie présente des esquisses de ses décors parisiens.
AMIENS - Le 3 juillet, le Musée de Picardie fermera ses portes pour des travaux qui dureront au moins jusqu’au premier semestre 2019. L’entrée se fera alors par le pavillon Maignan, ce qui marquera la fin d’un siècle de fortunes diverses pour le peintre Albert Maignan (1845-1908). Inaugurée en 1927, cette salle Maignan-Larivière fut financée sur le legs et différentes donations faits par Albert Maignan et Louise Maignan-Larivière, avec l’obligation de consacrer une salle aux œuvres et collections du peintre. Si la deuxième moitié du XXe siècle a constitué un long purgatoire pour Maignan, dont on a méprisé les conditions du legs, on peut voir à travers cette exposition un début de revanche. Beaucoup moins dense que la version qui en a été présentée à la Fondation Taylor en 2016, elle a du moins le mérite d’enrichir la vision que le public amiénois peut avoir du peintre. Dans le majestueux Grand salon du musée ont pu être, en effet, présentées ses toiles : La Mort de Carpeaux, La Muse verte, Le Printemps de la vie ou La Mort de Guillaume le Conquérant. Mais rien qui permette d’imaginer l’importante activité de décorateur de Maignan. Or le Musée de Picardie conserve de nombreux dessins préparatoires, esquisses et cartons de tapisseries et de vitraux relatifs à cet aspect de son talent.
Un décorateur flamboyant
Dans le peu d’espace qui reste au musée en travaux, c’est le petit Salon de l’étude qui est dévolu à Maignan. Les décors pour la salle à manger de l’hôtel Homberg (1892-1894) et ceux de la Salle des fêtes de l’Exposition universelle de 1900, qui étaient évoqués à la Fondation Taylor, ne se retrouvent pas ici. Mais sont visibles quelques dessins et esquisses réalisés pour des monuments parisiens : le grand foyer de l’Opéra-Comique (1897-1898), les tapisseries pour le Sénat au palais du Luxembourg (1894-1908), la chapelle Notre-Dame-de-Consolation (1898-1901) et le buffet de la gare de Lyon (1900-1905). Si l’on excepte les scènes religieuses et de deuil pour Notre-Dame-de-Consolation (la chapelle érigée à Paris en souvenir des victimes de l’incendie du bazar de la Charité), on constate que le peintre a montré, dans toutes ces œuvres, un goût des couleurs qui heurtait parfois les esthètes de son temps. Ainsi, a-t-il dû foncer avec regret toutes les nuances de ses peintures pour l’hôtel Homberg : « Mes panneaux éclataient comme des affiches de Chéret ; tout devenait autour d’elles sale et pisseux », a-t-il écrit dans son journal.
À l’Opéra-Comique, l’esquisse pour le plafond (La Ronde des notes, 1897) est une explosion de bleus, d’ocres et de touches de vert véronèse et de carmin. Pour le buffet de la gare de Lyon (l’actuel Train bleu), l’esquisse des Fêtes d’Orange (vers 1902), qui oppose les costumes régionaux aux tenues des invités prestigieux, est une page pleine de bonheur et de lumière. Plus nombreux, les dessins pour ses décors parisiens montrent le métier éblouissant de ce maître prolifique. Si l’on attend avec impatience la somme que Véronique Alemany prépare sur lui, les Amiénois se réjouissent aussi de lui voir enfin consacrer, dans deux ans, un espace à sa mesure dans les nouvelles salles du Musée de Picardie.
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Un avant-goût de Maignan
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 2 juillet, Musée de Picardie, 48 rue de la République, 80000 Amiens, tous les jours sauf lundi 10h-12h et 14h-18h, mercredi 10h-18h, jeudi 14h-21h, dimanche 14h-19h, www.amiens.fr/musees, tél. 03 22 97 14 00, entrée 2 € avec le musée. Catalogue Norma Éditions, 25 €.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°472 du 3 février 2017, avec le titre suivant : Un avant-goût de Maignan