NÎMES
Sur une idée intéressante – la tentative de sauvetage des Pompéiens le jour de l’éruption du Vésuve par la flotte de Misène –, « Le récit oublié », au Musée de la romanité, déroule poncifs et généralités.
Nîmes. Le propos est ambitieux, illustré par un titre accrocheur : « Pompéi. Le récit oublié ». Pour la deuxième exposition depuis son ouverture à l’été dernier, le Musée de la romanité à Nîmes accueille à nouveau une exposition clés en main, dont l’objectif est de s’adresser au plus grand nombre. Conçue par le Contemporanea Progetti de Florence en partenariat avec l’Australian National Maritime Museum à Sydney, elle présente quelque 250 objets prêtés par les musées napolitains et issus des sites de Pompéi, Herculanum et de la baie de Naples.
Le fil rouge du parcours ? Suivre les pas de Pline l’Ancien, homme de lettres et amiral de la flotte de Misène, qui mit sur pied, le 24 août 79, jour de l’éruption du Vésuve, douze navires pour aller secourir les habitants de Pompéi et des alentours. « Cet événement est considéré par plusieurs historiens comme le premier cas documenté de sauvetage de civils de la part d’une force militaire », note dans le catalogue Eugenio Martera, directeur général de Contemporanea Progetti.Même si, comme on peut le lire sur l’un des panneaux de salle, rien n’indique que Pline ait réussi « ou non à sauver de nombreuses personnes ». Pour les commissaires italiens, il s’agit également de mettre en lumière la puissance maritime et portuaire de Rome au Ier siècle de notre ère.
Si l’idée de départ est séduisante, le parcours proposé déçoit quelque peu. Les deux premières séquences, sur les pas de Pline l’Ancien, sont cohérentes entre elles, et se répondent pour dresser le tableau de la présence maritime romaine en Méditerranée. Deux beaux bas-reliefs représentant des navires de guerre romains évoquent la toute-puissance militaire de l’Empire romain. Des vidéos 3D et des jeux interactifs offrent au visiteur la possibilité de s’imprégner de l’atmosphère du port de Neapolis et des différents types de navires romains.
Mais le propos s’égare en milieu de parcours pour s’étendre à une évocation générale de la vie quotidienne à Pompéi. Carafes, bols ou chaudron côtoient statues, panneaux de mosaïques et petites fresques bucoliques présentées comme des tableaux précieux. L’accumulation est certes charmante, mais le lien avec le « récit oublié » du sauvetage maritime s’estompe pour laisser place à un propos vu et revu. La séquence présente ainsi ce qui est devenu un topos de Pompéi : une fresque érotique extraite d’une taverne pompéienne.
En fin de parcours, dans un spectacle son et lumière quelque peu criard, l’exposition présente quatre moulages de corps retrouvés à Pompéi. Un panneau de salle rappelle l’intuition qu’eut le directeur de fouilles Giuseppe Fiorelli, en 1863, en faisant verser du plâtre dans des cavités de pierres ponces. Les fameux moulages de Pompéi ont ainsi redonné forme et corps aux victimes de l’éruption. « Tout est resté intact : la position des corps, leur état de tension et de souffrance », explique sans détour le texte. Il y avait sans doute un choix de scénographie plus heureux et plus sobre à trouver pour exposer ces échos douloureux…
L’année prochaine, le Musée de la romanité inaugurera sa première exposition élaborée en interne, en partenariat avec le Musée du Louvre ; elle portera sur le culte impérial. La précision, la clarté et l’élégance du parcours permanent du musée sont autant de qualités qui attisent déjà la curiosité.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°527 du 5 juillet 2019, avec le titre suivant : Pompéi, une expo un peu bateau