LONDRES / ROYAUME-UNI
Après le Sainsbury Art Center à Norwich, le British Museum, à Londres, déploie une sélection de chefs-d’oeuvre d’art polynésien puisés aux meilleures sources
LONDRES - La Grande-Bretagne a la chance et la responsabilité de conserver les plus importantes collections au monde d’art polynésien. Même si les collections néo-zélandaises sont très riches, non seulement de trésors nationaux, mais aussi de chefs-d’oeuvre d’autres cultures du Pacifique grâce à l’achat en bloc, il y a quelques années, de la collection Oldman, même si les États-Unis et la France (pour les Iles Marquises en particulier) conservent des pièces fabuleuses, c’est toujours en traversant la Manche que l’on est assuré de contempler l’ensemble le plus spectaculaire. C’est ce que prouve, une fois encore, l’exposition du British Museum « Power and Taboo ». Les premiers explorateurs anglais du Pacifique, Byron (le grand-père du poète), Wallis et surtout James Cook se sont efforcés de rapporter vers la mère patrie des témoignages des productions culturelles des mers du Sud dans des proportions que les autres marins n’ont pas égalées. Si l’on peine à identifier quelques objets rapportés par Bougainville ou d’Entrecastraux, ce sont plusieurs centaines de pièces des voyages de Cook que l’on conserve encore.
Plus tard, les pasteurs et la London Missionary Society, très actifs en Polynésie, envoyaient systématiquement vers l’Angleterre les « idoles » dont ils réussissaient, avec une surprenante facilité, à éradiquer le culte.
Tous ces objets, vendus ou offerts à des aristocrates férus de curiosités, ont formé vers la fin du XIXe siècle un nombre remarquable de collections devenues mythiques : Edge-Pardington, Oldman, Fuller ou encore Hooper. En 1975, la famille de James Thomas Hooper confie au petitfils du collectionneur, Steven, le soin de cataloguer, en vue d’une vente mémorable, le fabuleux ensemble (océanien, africain et américain) réuni sans grands moyens financiers, toutefois en explorant systématiquement les greniers anglais. De cette expérience, Steven Hooper puise une passion pour le Pacifique – qui le conduit à séjourner deux ans aux Fidji – et une connaissance intime des objets et de leurs collectionneurs contemporains, tel Robert et Lisa Sainsbury.
Aujourd’hui, conservateur des collections océaniennes réunies à Norwich par les deux mécènes, Steven Hooper a été le mieux placé pour réunir, l’été dernier, au merveilleux Sainsbury Art Center, construit par Norman Foster, un ensemble exceptionnel puisé aux meilleures sources.
Un catalogue complet
Le British Museum a, d’une part, publié sous ses presses le remarquable ouvrage rédigé à cette occasion, Pacific Encounters Art and Divinity in Polynesia, et, d’autre part, confié au conservateur de ses collections océaniennes, Lissant Bolton, le soin d’en tirer une version différente et, faute de place, malheureusement fort réduite. Il n’en demeure pas moins que le voyage à Londres reste indispensable : on y verra quelques chefs-d’oeuvre célèbres comme la coupe hawaïenne offerte en 1778 au second du Capitaine Cook et dont le réceptacle est orné de deux figures anthropomorphes d’une saisissante originalité de construction.
Une pirogue de 1767
L’objet le plus fascinant n’est pourtant pas à proprement parler une sculpture : c’est une pirogue des Tuamotu, collectée précisément le 8 juin 1767 – ce qui en fait le premier objet polynésien jamais rapporté en Europe – par le Capitaine Wallis au large de l’atoll de Nukutavake.
On ne sait qu’admirer l’ingéniosité des systèmes de couture (toujours utilisés dans ces Iles où le bois est rare) et tout le romanesque de ce morceau d’histoire transporté sans doute au prix de beaucoup d’efforts par des marins britanniques que l’on imagine curieux de la technique de leurs collègues Paumutus et sur le bordage duquel se lisent encore les brûlures dues aux frottements des fils de pêche.
Jusqu’au 7 janvier, British Museum, Great Russell Street, Londres, tél. 44 20 7323 8000, www.thebritishmuseum.ac.uk, tlj 10h- 17h30, jeudi et vendredi 10h-20h30. Catalogue de Steven Hooper, 272 pages, 27 livres sterling (41 euros),ISBN 0-714125-75-X.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Passionnant Pacifique
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €- Commissaire : Lissant Bolton - Nombre de salle : 1
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°250 du 5 janvier 2007, avec le titre suivant : Passionnant Pacifique