Il faut voir l’exposition prendre vie, sortir de son coma, et le visiteur se déplacer comme régénéré par le courant électrique qui traverse les œuvres et les salles à 14h.
Avec une précision de bureau des postes, « Cellar Door » s’éveille comme une Belle au bois dormant. Tous les jours, le rituel se perpétue jusqu’à 20 h. Avant et après, l’exposition se visite en silence, dans une pénombre et un stand-by délicieusement perturbants. Au cœur de cette dépression lunaire, de cet univers sombre et fantomatique, on prend ses marques petit à petit.
L’univers de Loris Gréaud n’a jamais été une mince affaire. Et même lorsque certains reconnaissent des formes empruntées à ses aînés, des artistes qu’il admire profondément de Philippe Parreno à Pierre Huyghe, l’équation n’a rien du pillage mal intentionné. Gréaud assume formes et intentions d’une généalogie qu’il se choisit lui-même. Il rouvre les boîtes de Pandore qu’ont été des expositions comme « Alien Seasons » ou « Snow Dancing » (toutes deux de Parreno) sans pour autant simplement s’immiscer.
L’exercice complexe de cette exposition réside là, dans cette façon d’agir avec le passé et d’anticiper, de créer des failles spatio-temporelles. Un dessin apparaît épisodiquement par luminescence, l’ombre portée d’un atelier à construire. Une exposition déjà vue au Plateau, centre d’art parisien, en 2005, est rejouée dans son intégralité. Loris Gréaud s’amuse des frises chronologiques avec maestria.
Le soir de l’ouverture, un opéra s’est joué ici. Il se raconte, se transmet et s’écoute. Moment disparu à réactiver qui fait écho au film de la dernière salle. Au milieu d’une forêt de silhouettes d’arbres enduits d’un composite de poudre à canon, un film est projeté. Mais la curiosité interrompt la projection. Le film existe vraiment, il n’est pas à voir mais à extrapoler.
De telles embardées temporelles transforment la visite en odyssée spatiale avec le vocabulaire cher à Loris Gréaud : du noir, du futur, de l’espace. Certes « Cellar Door » se mérite et ne se laisse pas amadouer facilement. Mais ses paysages de contes, son ambiance si particulière et l’alternance d’inconfort et de ravissement font de la visite un moment unique. Et comme une pilule à diffusion lente, l’exposition continue son imprégnation après la visite. Les verrous de « la porte du cellier » cèdent petit à petit.
« Loris Gréaud, Cellar Door », palais de Tokyo, 13, avenue du Président-Wilson, Paris, www.palaisdetokyo.com, jusqu’au 27 avril 2008.
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Loris Gréaud, ouvrir les portes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°601 du 1 avril 2008, avec le titre suivant : Loris Gréaud