Échos - Réunies sous le titre « Peuples de pierre», les sculptures de Denis Monfleur se déploient sur les trois sites du Musée des beaux-arts de Bordeaux et dans plusieurs espaces publics du centre-ville.
Le grand nombre d’œuvres exposées (plus de 200), leurs tailles variées (de la figurine au monumental), la juxtaposition de pièces uniques et de séries, la diversité des matériaux (diorite, granit, albâtre, orgue basaltique) impressionnent de prime abord. D’autant que le sculpteur, qui pratique aussi la peinture, le dessin à l’encre et l’aquarelle, y consacre une salle. De ce foisonnement ressortent l’énergie créatrice de l’artiste (né en 1962 à Périgueux), l’importance du geste en taille directe et la part d’expérimentation. Mais l’abondance frise le trop-plein et on reste un peu perplexe face à certaines associations, telle cette peinture fluo recouvrant quelques pièces. Dans les deux ailes historiques du musée, les sculptures sont présentées en dialogue avec les collections : un Moïse en albâtre voisine avec une visitation du XVe siècle, un exécuté agenouillé sur son socle rouillé fait écho aux corps enchaînés des galériens peints par Alessandro Magnasco, artiste de l’époque rococo. Dans l’autre aile, deux versions de Sardanapale encadrent un Mozart expirant dans son fauteuil, l’aspect brut des premiers dénotant avec le réalisme plein d’emphase de Rinaldo Carnielo. La figure humaine est le fil rouge du sculpteur qui emprunte tour à tour à l’expressionisme, au minimalisme ou aux totems antiques. C’est finalement l’absence de regard qui caractérise le plus fortement l’ensemble de ces corps, visages, troncs, le signe d’une humanité en train de déserter. Les visages deviennent aveugles, tels ceux de ces rois et reines qui font plutôt penser à des esclaves. Dans la série des Heaumes, les yeux ont disparu au profit d’une ligne horizontale. Quant aux Désaxés, leurs têtes grimaçantes surgissant de la matière semblent celles de condamnés sur le billot attendant l’exécution. Des figures au bord de l’abîme.
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Les figures aveugles de Denis Monfleur
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°768 du 1 octobre 2023, avec le titre suivant : Les figures aveugles de Denis Monfleur