ARLES
Le peintre arlésien bénéficie d’une première rétrospective, l’occasion de découvrir une œuvre marquée par les aléas de l’histoire.
Arles. « Il était temps » : Daniel Rouvier, directeur du Musée Réattu à Arles peut être satisfait. Depuis septembre, Jacques Réattu (1760-1833) a enfin droit à sa première rétrospective, et ce, dans le musée qui porte son nom depuis sa création en 1868. « C’est l’aboutissement de plusieurs années de travail », explique le directeur. L’historiographie a longtemps tenu Réattu dans l’ombre : mort en 1833, il faut attendre 1863 pour qu’une première biographie soit publiée. En 1985, la publication de la thèse d’une chercheuse allemande est le premier ouvrage exhaustif sur l’œuvre du peintre. Depuis, la numérisation de ses dessins et la transcription de sa correspondance ont amené à une connaissance bien meilleure de son œuvre. De tous ces travaux résulte l’exposition arlésienne « Jacques Réattu, arelatensis. Un rêve d’artiste ». Près de 470 dessins préparatoires, esquisses, peintures et études diverses ont investi les cimaises du musée (et de la chapelle Sainte-Anne) pour retracer le parcours de Réattu, d’Arles à Paris en passant par l’Italie.
Jacques Réattu joue souvent de malchance dans sa carrière, rythmée par les bouleversements politiques issus de la Révolution. Durant près de trente ans, le peintre va souvent voir ses commanditaires évincés, ses commandes oubliées, ses projets inachevés. Plus que son prix de Rome, Daniel faisant arrêter les vieillards accusateurs de la chaste Suzanne, peint en 1790, c’est en fait La Mort d’Alcibiade (vers 1796) qui représente le mieux l’œuvre de Réattu. Cette peinture monumentale est restée inachevée. Sur la toile, le héros grec est entouré de personnages seulement esquissés d’un trait énergique et vif, sans pour autant arriver à la puissance d’un David. Sûrement commandée lors de son séjour à Marseille en pleine Terreur, l’œuvre ne sera jamais livrée. La ténacité de Réattu, qui malgré les difficultés, relance toujours les autorités pour finir ses commandes, est là également : en 1822, le peintre travaille encore sur le tableau, avant de l’abandonner définitivement.
L’exposition n’est pas avare en œuvres : esquisses préparatoires et dessins évoquent une période où l’iconographie se renouvelle sans cesse, entre révolution, consulat, empire, restauration. À chaque fois, Réattu répond aux concours publics, réinventant la peinture d’histoire pour chaque commanditaire. Sa grande œuvre est exposée à la chapelle Sainte-Anne, voisine du musée. Là, six grisailles monumentales exécutées pour le temple de la Raison à Marseille en 1795 sont pour la première fois réunies depuis la Révolution. Maîtrise technique et connaissances philosophiques sont au rendez-vous de ce cycle qui reste un des seuls décors révolutionnaires à nous être parvenus, grâce à la ténacité du peintre : il réussit à les récupérer sous la Restauration.
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Jacques Réattu, enfin célébré
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°491 du 15 décembre 2017, avec le titre suivant : Jacques Réattu, enfin célébré