Pour leur 43e édition, les Rencontres d’Arles s’affichent en noir et blanc, revisitant les sources de la photo,
avec une programmation prometteuse en inédits, premières rétrospectives et talents méconnus ou oubliés.
ARLES - Au printemps dernier à Sète, le festival ImageSingulières a fait la part belle aux clichés noir et blanc. Cet été, les Rencontres de la photographie d’Arles s’inscrivent dans la même tendance. Alors que la photographie couleur domine les pratiques et usages, coup de projecteur donc cette année sur des travaux d’auteurs qui ont fait et font du noir et blanc leur palette, mais également avec des acteurs de la scène de l’art contemporain, jusqu’à présent absents en France de la scène des festivals photo. Tel Wolfgang Tillmans, dont l’exposition conçue par la directrice de la Kunsthalle de Zürich, Beatrix Ruf, et coproduite par la Fondation Luma et les Rencontres d’Arles, s’avère d’ores et déjà un des événements phares de cette 43e édition, puisque l’artiste allemand n’a pas fait l’objet d’une exposition de cette envergure depuis dix ans en France. À cet égard et celui des inédits et des auteurs présentés, connus ou méconnus, la lecture de la programmation imaginée par François Hébel est à elle seule une invite, promettant d’être un très bon cru qui tranchera avec la déception des dernières éditions.
Les primeurs des Rencontres d’Arles
Ainsi au rang des premières mondiales : la rétrospective conçue par Agnès Sire du photographe chilien Sergio Larrain, entré à l’agence Magnum en 1961 et mort en février 2012 à 81 ans, dont les livres, les photographies de Valparaiso, Santiago, Paris, Londres… et son « désir de solidifier un monde de fantômes », ont marqué des générations de photographes. L’exposition consacrée à l’artiste chilien Alfredo Jaar est aussi une première en France par le nombre de pièces rassemblées de cet artiste, architecte et réalisateur, qui interroge l’usage que font les médias des événements, de la dictature chilienne aux génocides rwandais ou à la traque de Ben Laden.
La présentation de tirages noir et blanc inédits de Hiroshi Sugimoto constituera un autre temps fort, couplé avec la présentation de vingt Polaroïds réalisés par l’artiste japonais dans le cadre d’une commande passée par Hermès,consistant à demander à un artiste de revisiter le légendaire carré. Cette commande révélera un des rares travaux en couleur de ce grand maître japonais du noir et blanc aux côtés de Daido Moriyama, également présent à Arles via l’installation présentée par la galerie Polka et l’association Le Méjan de Jean-Paul Capitani et Françoise Nyssen des éditions Actes Sud, autre important programmateur d’expositions dans le cadre des Rencontres.
Les images noir et blanc du grand photographe de mode Guy Bourdin, réalisées au début des années 1950, soit cinq ans avant qu’il n’entame sa collaboration avec Vogue France constitueront pour leur part une autre découverte conduite par Shelly Verthime, spécialiste de l’œuvre, qui en 2011 a découvert des clichés inconnus. Dans le registre des photographes de mode qui ont bousculé les codifications de ce milieu et introduisent de nos jours de l’étrange dans leurs images, la rétrospective Viviane Sassen proposée par Huis Marseille donnera à voir une autre vision décalée et une rare incise colorée dans ce champs du noir et blanc revisité.
Les petites histoires font les grandes
La photobiographie ou autobiographie est un autre sous-ensemble de cette édition, où dominent « les petites philosophies » poétiques de Gilbert Garcin, les éléments de la mémoire archaïque du monde de Jean-Michel Fauquet et le corps ou fragments de corps d’Arno Rafael Minkkinen. Mais aussi les portraits de Pieter Hugo et de ses amis, les regards tendres sur les animaux ou les enfants de Michel Vanden Eeckhoudt et les photos de Miguel Angel Rojas prises à la dérobée dans les années 1960-1970 dans les salles de cinéma de Bogota, où les homosexuels pouvaient se retrouver. Les années d’avant-guerre avec Bibi de Jacques Henri Lartigue parcourues par Maryse Cordesse et les pérégrinations d’auberges de jeunesse avec Dina Vierny de Pierre Jamet en 1936-1937 se racontent sur un autre registre, belles échappées de périodes de vie insouciantes et joyeuses. L’exploration des paysages, des marques et traces urbaines constitue un autre volet important de cette édition. Regroupés ainsi, John Davies, Antoine Gonin et les travaux réalisés par douze photographes français et sud-africains dans le cadre de la mission photographique produite par les Rencontres et le Market Photo Workshop fondé en 1989 par David Goldblatt à Johannesburg. Du côté de l’Association du Méjan, les expositions liées à la publication d’ouvrages chez Actes Sud égrainent d’autres propositions attendues comme celle de Lee Ufan, Giuseppe Penone ou Thibaut Cuisset, tandis que l’abbaye de Montmajour sera investie de pièces de la collection du Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques sélectionnées et mises en scène par Christian Lacroix.
Du 1er juillet au 22 septembre, semaine d’ouverture du 1er au 7 juillet inclus, expositions dans toute la ville, www.rencontres-arles.com
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Arles s’habille de noir et blanc
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Abonnez-vous dès 1 €Jean-Michel Fauquet, Sans titre © Photo courtesy Jean-Michel Fauquet.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°394 du 21 juin 2013, avec le titre suivant : Arles s’habille de noir et blanc