Justice - Vol

Le jugement du vol au Musée d'art moderne n'a pas levé le voile sur le sort des œuvres

Par Vincent Noce · lejournaldesarts.fr

Le 23 février 2017 - 652 mots

PARIS

PARIS [23.02.17] - Le tribunal a prononcé de lourdes peines à l’encontre des trois responsables de la disparition des chefs-d’œuvre du Musée d’art moderne de la Ville de Paris, tout en ne se prononçant pas vraiment sur le sort des œuvres.

les 5 tableaux volés au Musée d'art moderne de Paris en 2010 : « La Pastorale » d’Henri Matisse, « L’olivier près de l’Estaque » de Georges Braque, « Nature morte au chandelier » de Fernand Léger,  « La femme à l’éventail » d’Amadéo Modigliani et « Le pigeon aux petits pois » de Pablo Picasso.
Les 5 tableaux d'Henri Matisse, Georges Braque, Fernand Léger, Amadéo Modigliani et Pablo Picasso volés au Musée d'art moderne de Paris en 2010.

Le tribunal correctionnel de Paris a prononcé le 20 février des condamnations allant de six à huit ans de prison à l’encontre des trois malfrats auteurs de la disparition en 2010 de cinq tableaux du musée d’art moderne de la Ville de Paris. Les trois hommes ont été menottés à l’audience et remis en détention.

Vjéran Tomic, 49 ans, avait préparé son sac. Le cambrioleur n’a pas été surpris d’écoper de la plus lourde peine, sans aménagement. Le tribunal a trouvé chez lui une « insuffisante prise de conscience des interdits légaux », euphémisme plaisant pour un homme ayant passé la moitié de sa vie adulte en détention, suite à quatorze condamnations, y compris pour vol à main armée. Surnommé « Spider » ou « Joe », le casseur avait bien plaidé qu’il menait une vie rangée depuis sa dernière sortie de prison -nous confessant qu’il « préférait se retirer car il ne pouvait plus faire confiance dans ce milieu dans lequel il n’y a plus d’honneur ». Allusion à quelques déboires dont la modicité des 40 000 € reçus du commanditaire, un antiquaire de 61 ans, Jean-Michel Corvez.

Ce dernier, également récidiviste, a été condamné à sept ans de prison, le tribunal soulignant sa part de « donneur d’ordre » en estimant que son impassibilité valait « absence totale de culpabilité ». Il avait demandé un Léger et peut-être un Modigliani à son homme de main, qui lui avait confié par le passé des tableaux et des pendules volés. Comme le système de sécurité du musée était en panne depuis des mois, le voleur en avait profité pour prendre son temps et s’emparer en plus de trois chefs-d’oeuvre de Picasso, Matisse et Braque.

Affolée par l’impact médiatique, la petite bande de pieds nickelés ne sachant plus qu’en faire, avait confié le butin à Yonathan Birn, un expert horloger de 40 ans que ses copains appelaient entre eux « le petit juif ». Condamné à six ans de prison, il a piqué une crise de nerfs, hurlant, sanglotant, exhibant une étoile jaune sur la poitrine. Il aurait pu être bien plus lourdement condamné, lui qui avait avoué avoir détruit les toiles quand il a appris que les policiers le soupçonnaient. Mais la Justice n’avait pas voulu retenir ce chef d’accusation, préférant retenir la version policière bien commode selon laquelle les tableaux auraient survécu on ne sait où. En parlant de « soustraction », le président de la chambre, Peimane Ghaleh-Marzban, a gardé une prudente distance avec cette hypothèse rocambolesque. Il a cependant considéré que les invraisemblables défaillances de la sécurité (*) ne pouvaient engager la responsabilité civile du musée et de la municipalité. Outre des amendes de 150 000 à 200 000 € chacun, le trio a donc été condamné à verser 104 millions de dommages et intérêts, décision qu’on imagine bien purement symbolique.

En atténuant un peu les peines requises, le tribunal pouvait laisser entendre qu’il tenait compte de la situation des accusés, sans se laisser emporter par l’émotion de ce vol hors du commun. En bonne logique, à l’heure où nous écrivons, personne n’a fait appel.

Note

(*) Suite à son témoignage à l’audience, Fabrice Hergott, directeur du musée, nous a précisé qu’il n’avait pas voulu rejeter la responsabilité des dysfonctionnements sur le secrétaire général de l’époque, mais sur son adjoint chargé de la sécurité.

(*) Titre et chapô d'origine

Pour la justice, les tableaux volés au MAMVP n’ont pas été détruits
Le tribunal a prononcé de lourdes peines à l’encontre des trois responsables de la disparition des chefs-d’œuvre du Musée d’art moderne de la Ville de Paris, tout en retenant l’hypothèse que les tableaux n’ont pas été détruits.

Légendes photos

Les 5 tableaux volés au MAMVP :
Pablo Picasso « Le pigeon aux petits pois » (1911) - 64 x 53 cm © D.R
Amedeo Modigliani « La Femme à l'éventail » (1919) - 100 x 65 cm © D.R
Henri Matisse « La Pastorale » (1906) - 46 x 55 cm © Succession H. Matisse
Georges Braque « L'olivier près de l'Estaque » (1906) - 50 x 61 cm © D.R
Fernand Léger « Nature morte au chandelier » (1922) - 116 x 80 cm © D.R

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