Avec « Séries limitées », Art Paris Art Fair dédie un nouveau secteur au design contemporain et à ses liens avec les arts visuels.
Elles ne seront que six, mais leur arrivée pourrait ne pas passer inaperçue, même si ce n’est pas là que va se réécrire la longue histoire des liaisons, heureuses ou dangereuses, entretenues par l’art et le design. Six galeries donc, qui, logées au cœur du Grand Palais et non en périphérie, dans l’espace central compris entre les deux volées d’escaliers de la nef, vont composer pour la première fois un secteur spécifiquement dédié au design au sein d’Art Paris Art Fair.
L’un des principaux intérêts de cette nouvelle section répondant à l’appellation de « Séries limitées » tient dans le fait que l’initiative ne se réduit pas à l’introduction du seul design, mais dit bien la volonté d’établir un dialogue entre les deux disciplines. Il semble que, parmi les artistes, soient ici privilégiés les photographes, dont le travail à portée plus ou moins narrative est sans doute plus aisé à inscrire dans ce type de contexte. Les interactions entre les deux domaines sont légion et la problématique depuis un moment déjà dans l’air du temps. Nombre de designers s’autorisent en effet des échappées hors du strict aspect fonctionnel, tandis que les formes, structures et objets participant tant du déroulement du quotidien que de l’organisation sociale sont plus qu’à leur tour interrogées par les artistes. En outre, comme le relève Pierre-Alain Challier (Paris), qui, une fois par an, organise une exposition de design, et produit régulièrement des multiples et éditions en nombre limité des artistes avec lesquels il collabore, « les amateurs d’art et de design sont de plus en plus mêlés, il y a donc une vraie logique dans une telle démarche ». Sa proposition, pensée autour de l’idée d’un intérieur, verra se rencontrer les « Object Dependency » du designer japonais Nendo dont la fonction de meuble dépend d’un objet qui est posé dessus ; les miroirs d’Hubert Le Gall – qui débuta sa carrière en tant que sculpteur –, une édition de Yayoi Kusama évoquant la forme d’une citrouille ou encore des photographies de Nils Udo.
Univers contrastés
Une autre qualité de l’opération est de se concentrer sur des formes d’expression contemporaines, sans recourir au mobilier vintage qui, généralement, peuple une grande part des stands tenus par les galeries de design dans les foires. Car, comme le fait remarquer Bénédicte Colpin, chargée de mettre en musique ce nouveau secteur, « il y a toujours une grande prise de risque des galeries de design contemporain. Même si beaucoup de salons valorisent le contemporain, le «business» est fondamentalement celui du vintage. » Ajoutant, à propos de cette approche spécifiquement contemporaine, que « les collectionneurs ne savent pas forcément que les galeries de design investissent beaucoup et proposent souvent des pièces qu’elles ont elles-mêmes produites, ce qui se traduit par un vrai engagement financier. Il est important de mettre en valeur leur travail dans l’élaboration de la pièce exposée. »
Un prix « Prototype » Série limitée sera d’ailleurs créé pour l’occasion, qui récompensera la plus intéressante collaboration entre une galerie et un créateur : l’accent sera mis sur la pertinence du dialogue et la mise en valeur du savoir-faire des exposants dans la qualité de réalisation des pièces.
Afin de répondre à cette spécificité d’un travail des galeries positionné loin de la production industrielle, les travaux exposés seront pour nombre d’entre eux des pièces uniques ou de bien nommées… séries limitées !
La sélection resserrée entend mettre en scène des univers visuels très contrastés entre les différentes enseignes. Adepte des formes pures, la galerie Domeau & Pérès exposera Martin Szekely ou Éric Jourdan avec des étagères de Sophie Taeuber-Arp et le fauteuil « Couteau suisse » de Fabrice Hyber, le tout confronté à des photographies de Philippe Chancel ou de François Nugues. À mille lieux de là, la très classique Galerie Matignon annonce un accrochage autour du thème de la « Nature revisitée », mêlant une sculpture d’Arik Levy et un paravent de Zoé Ouvrier à des tableaux de Jean Jansem.
Les artistes ne risquent-ils pas cependant d’apparaître au final comme anecdotiques dans une telle opération ? C’est à l’aune de la qualité et de l’intérêt des liens établis entre art et design que se mesurera la pertinence de « Séries limitées ».
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Du design en séries limitées
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €- Paris, tête de file et tête de pont
- Art Paris ou l’Europe des régions
- Que voir à Art Paris Art Fair ?
- Drawing Now en « solo shows »
- Design gagnant
- Plus moderne et international
- Les bourgeons des enchères
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°365 du 16 mars 2012, avec le titre suivant : Du design en séries limitées