Justice

Carrières des Lumières : condamnation aggravée pour les Baux-de-Provence

Par Pierre Noual (Avocat à la cour) · lejournaldesarts.fr

Le 24 juin 2024 - 467 mots

La justice alourdit l’indemnité due par les Baux-de-Provence à Cathédrale d’images à hauteur de 6,4 millions d’euros.

Spectacle consacré à Jérôme Bosch aux Carrières de Lumières. © Joseolgon, 2017, CC BY-SA 4.0
Spectacle consacré à Jérôme Bosch aux Carrières de Lumières.
© Joseolgon, 2017

C’est dans les immenses galeries des carrières des Bringasses et des Grands-Fonds (Bouches-du-Rhône), où Jean Cocteau filma plusieurs séquences de son Testament d’Orphée, qu’un nouvel épisode judiciaire vient de s’écrire pour Cathédrale d’images avec la condamnation sonnante et trébuchante à plus de 6,4 millions d’euros de la commune des Baux-de-Provence.

Celle-ci avait confié en 1976 l’organisation de spectacles audiovisuels dans ces carrières à Cathédrale d’images, fondée par Albert Plécy. Trente-deux ans plus tard, la commune avait unilatéralement retiré la gestion du site en mettant fin au bail commercial conclu en 1989. Entre-temps, les Baux-de-Provence avaient effectué une délégation de service public au profit de Culturespaces – dont la validité a été confirmée par le Conseil d’État en 2023 et fait désormais l’objet d’un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme. Estimant qu’elle avait été chassée illégalement du site par la commune et dépossédée de l’activité culturelle et artistique qu’elle avait créée, Cathédrale d’images a alors engagé de multiples procédures pour faire respecter ses droits.

Après que le Conseil d’État a affirmé, en 2016, que la commune n’avait aucune obligation de délaisser le bail commercial de Cathédrale d’images au profit d’une délégation de service public, la Cour de cassation a estimé, en 2021, qu’il fallait réexaminer l’indemnité de 5,8 millions d’euros due par les Baux-de-Provence à Cathédrale d’images. C’est désormais chose faite puisque la cour d’appel de Lyon (6 juin 2024) vient d’aggraver cette indemnité de 622 851 euros, en particulier car la commune n’avait pas établi « qu’un site comparable se soit trouvé à proximité raisonnable de l’ancien site d’exploitation, qui aurait permis à la société Cathédrale d’images de conserver sa clientèle constituée essentiellement des touristes visitant le sud de la France ».

La nouvelle condamnation à hauteur de 6,4 millions euros est instructive dans son détail : 4,6 millions d’euros au titre de l’indemnité d’éviction (la valeur du fonds de commerce), 1,8 million euros au titre du préjudice résultant du « non-maintien dans les lieux », 100 000 euros au titre du préjudice moral et 30 000 euros au titre des frais de justice. En revanche, les juges ont refusé de prendre en compte le préjudice lié à la marque (estimée à 1,5 million euros) car ce dernier n’apparaissait pas certain.

Cette lourde indemnité vient réparer le préjudice subi par Cathédrale d’images et son directeur Jean Montaldo : « la destruction d’une société prospère […] ayant créé les spectacles immersifs aujourd’hui déclinés partout dans le monde par nos imitateurs ». Ce n’est pas la fin de cette saga judiciaire car la cour d’appel de Paris va devoir rejuger la condamnation pour favoritisme et recel de favoritisme de l’ancien maire des Baux-de-Provence (Michel Fenard), de la société Culturespaces et de son président (Bruno Monnier) en décembre prochain.

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