Espagne - Musée

Un musée de Madrid retire de ses salles une momie guanche

Par Cordelia Hales · lejournaldesarts.fr

Le 26 février 2025 - 529 mots

MADRID / ESPAGNE

Cette décision s’appuie sur une charte rédigée par le ministère de la Culture concernant les musées nationaux espagnols.

Momie guanche du Musée archéologique de Madrid. © Carlos Teixidor Cadenas, 2024, CC BY 4.0
Momie guanche du Musée archéologique de Madrid.

Le Musée archéologique national de Madrid a retiré de ses salles d'exposition la célèbre momie guanche datant du XIIe-XIIIe siècles qui y était exposée depuis 2015 et l'a transférée dans ses réserves. Cette décision intervient à la suite de la publication de la « Charte d'engagement pour un traitement éthique des restes humains », rédigée par le ministère de la Culture et qui demande de retirer les restes humains présents dans les 16 musées nationaux, sauf si leur exposition est « dûment justifiée pour des raisons scientifiques ». Les musées nationaux espagnols possèdent près de 15 000 restes humains, dont la majorité se trouve dans des réserves.

La charte d’engagement se fonde en partie sur le Code de déontologie pour les musées du Conseil International des musées (ICOM), une ONG créée en 1946 dans le sillage de l’UNESCO, et stipule que les restes humains ne doivent plus être considérés comme des objets mais comme des vestiges de personnes décédées qui ont été séparés de leur contexte funéraire.

La charte publiée entend par restes humains tout ce qui peut être attribué à l'espèce Homo sapiens : corps complets ou des parties de ceux-ci, non transformés, transformés ou conservés. Cela inclut les os, personnes momifiées, tissus mous, organes, sections de tissus, embryons, fœtus, cheveux, ongles. Sont exclus les moulages de corps humains, les masques mortuaires, les enregistrements sonores de voix humaines et photographies.

La momie guanche de Madrid a été découverte en 1763-1764 lors d'une mission du capitaine d'infanterie espagnol Luis Román dans une grotte des îles Canaries à Tenerife, où de nombreuses momies étaient « enveloppées dans une peau soigneusement cousue ». Selon une étude du Musée archéologique national de Madrid, la momie exposée était celle d'un homme adulte mesurant 1,62 m, décédé à l'âge de 35-40 ans. Ses mains avaient encore leurs ongles et la momie possédait une dentition complète.

Le Musée archéologique national de Madrid a déclaré qu'il était de sa responsabilité « d'essayer de créer les meilleures conditions possibles pour que les générations futures puissent continuer à admirer cet héritage guanche, en tenant compte du respect que méritent les restes d'une personne qui, en des temps lointains, était intégrée dans cette société ».

Bien que la Charte pour le traitement éthique des restes humains ne s'applique pas aux musées privés espagnols, elle reste fortement recommandée, ce qui pourrait poser problème à certaines institutions : notamment le Museo de las Momias à Quinto, dont la collection se résume à 15 momies des XVIIIe et XIXe siècles. Le musée s'est toutefois défendu en déclarant que les momies étaient exposées et contextualisées dans le respect de la dignité humaine.

En France, une loi a été votée en 2023 sur la restitution des restes humains des collections publiques, dont environ 25 000 se trouvent au Musée de l'Homme à Paris. Cette loi est toutefois soumise à certaines conditions. Les demandes de restitution doivent être faites au nom d'un groupe humain qui vit encore dans le pays et dont la culture est donc encore active. Cela ne s'applique toutefois qu'aux personnes décédées après l'an 1500 et la restitution ne peut être effectuée qu'à des fins funéraires.

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