PARIS
Fermé depuis plus d’un an, le Petit Palais a été rendu à sa nudité primitive lors de la première phase des travaux de rénovation. Une fois ces préliminaires accomplis, une seconde tranche débutera pour créer des surfaces supplémentaires et remodeler les espaces existants. À son terme, fin 2004-début 2005, ce projet de 64 millions d’euros permettra enfin de présenter dignement les immenses collections de la Ville de Paris.
PARIS - La première impression qui étreint le visiteur en entrant dans le Petit Palais est un sentiment d’espace. Débarrassé de toutes les scories – du vestiaire aux caisses en passant par le sas d’entrée –, le hall d’accueil a retrouvé toute son ampleur, et le regard se porte aussitôt, à travers les portes vitrées, sur le jardin, retrouvant cette vue traversante qu’avait voulu Charles Girault, l’architecte du monument. Le jardin, cerné par un péristyle à colonnes, est, lui, livré aux mauvaises herbes, et seuls quelques canards continuent de s’ébattre dans l’unique bassin encore en eaux.
La surprise n’est pas moins grande lorsque l’on découvre les galeries précédemment dévolues aux expositions temporaires, dans toute leur nudité. Le velum, qui occultait des verrières par ailleurs en piteux état, a été supprimé, ce qui permet de restituer les volumes originaux, insoupçonnés des visiteurs. Une pauvre série de néons scandent l’espace, tandis que diverses saignées ont écorché les parois couleur de saleté. Dans la galerie parallèle, les boiseries décoratives sont en cours de démontage.
L’aspect actuel du Petit Palais est le résultat de la première phase des travaux de rénovation, au cours de laquelle il a été procédé au “déshabillage” des espaces et au dégagement de toutes les fenêtres. Spectaculaire au premier étage – celui de l’entrée monumentale –, il ne l’est pas moins au rez-de-chaussée où toutes les cloisons ont été abattues. De toute part, entre les arcs surbaissés, s’ouvrent de surprenantes perspectives, qui composent un inquiétant dédale contrastant avec la clarté des volumes au-dessus.
Inauguré en 1900 pour l’Exposition universelle, ce monument du “style Beaux-Arts” conçu par Charles Girault (1851-1932) avait été converti deux ans plus tard en Musée des beaux-arts de la Ville de Paris. Or, depuis de nombreuses années, le Petit Palais était devenu vétuste et indigne de ses immenses collections. Une trop faible surface était dévolue à leur présentation, et le bâtiment avait perdu la belle ordonnance intérieure de l’origine, en même temps que de nombreuses sources de lumière avaient été occultées. Sous la direction de Gilles Chazal, le conservateur en chef du musée, une mutation radicale a été imaginée.
Retour à la lumière naturelle
Le décloisonnement apparaît comme le maître mot du projet conçu par l’Atelier d’architecture Chaix & Morel et Associés, qui avait remporté le concours (lire le JdA n° 84, 28 mai 1999). Retrouver les volumes originaux et autant que possible l’éclairage naturel constitue leur ligne de conduite. L’ex-galerie d’exposition temporaire offre un bon exemple. Les verrières ont été dégagées et des ouvertures vers la galerie voisine et surtout sur le jardin seront restituées, telles que Girault les avait prévues. Dans cet espace seront accrochés les grands formats de la seconde moitié du XIXe siècle et du début du XXe, de Courbet à Doré. L’espace correspondant côté Seine sera, lui, toujours consacré aux expositions temporaires ; en revanche, une mezzanine y sera créée pour installer un cabinet d’arts graphiques. Entre les deux, dans l’axe du jardin sera aménagé le café-restaurant du musée, et le jardin lui-même sera restitué dans l’esprit 1900 avec ses bassins, ses mosaïques...
Au total, la surface existante sera portée de 20 000 m2 à 26 000 grâce notamment au creusement de la cour. Les collections permanentes seront les grandes bénéficiaires de ce réaménagement puisqu’elles occuperont 5 000 m2 au lieu de 3 000 et le nombre d’œuvres présentées passera de 850 à 1 300 environ, sans compter les présentations temporaires d’œuvres conservées en réserve (plus de 40 000) dans les 450 m2 du hall Dutuit, au rez-de-chaussée. Le public pourra véritablement redécouvrir une collection d’une richesse inouïe notamment dans le domaine de la sculpture (Carpeaux, Carriès, Dalou, Rodin), mais aussi de la peinture avec Courbet bien sûr (Départ des pompiers, Les Demoiselles du bord de Seine, etc.), mais aussi Géricault, Delacroix, Manet, Sisley, Monet, Renoir, Cézanne... L’importance de la peinture de salon et du Symbolisme constitue une de ses principales caractéristiques. Le legs des frères Dutuit, dès 1902, avait par ailleurs doté le musée d’une exceptionnelle collection d’art ancien de quelque 20 000 œuvres dont 12 000 gravures (Rembrandt, Dürer). Ce fonds rassemble des antiques, des objets d’art du Moyen Âge, de la Renaissance et du XVIIIe, ainsi que des peintures flamandes et hollandaises.
Un appel d’offres infructueux
Si le Petit Palais doit rouvrir ses portes fin 2004 avec une grande exposition temporaire, l’aménagement des collections permanentes ne sera vraisemblablement achevé qu’au premier semestre 2005. Avant cela, un chantier considérable est programmé. “Un des gros travaux consistera à climatiser l’ensemble des espaces et de contrôler l’hygrométrie”, indique l’architecte Philippe Chaix. Le creusement de la cour sous laquelle sera installé un auditorium et trois niveaux de sous-sols représentera la première opération, de même que la construction des planchers au-dessus de la galerie d’exposition temporaire. Des interventions sur les toitures, la réfection des verrières sont également au programme.
Ces opérations auraient dû commencer depuis longtemps, mais un premier appel d’offres infructueux a différé la mise en chantier. À l’ouverture des enveloppes retardée par le changement de municipalité, il était apparu que “les réponses à l’appel d’offres entraînaient des surcoûts que nous n’avons pas acceptés”, indique Gilles Chazal. Les travaux sont donc interrompus depuis un an, et ne reprendront que début septembre.
Le coût de la rénovation du Petit Palais avoisinera finalement les 68 millions d’euros au lieu de 64 millions, un dépassement budgétaire lié à un investissement supplémentaire et non à une dépense mal maîtrisée, a tenu à préciser le maire de Paris, Bertrand Delanoë, lors de la présentation des maquettes. Il s’est en outre félicité que l’accès désormais gratuit aux collections dans les musées de la ville améliore la fluidité de la circulation dans le bâtiment et favorise une plus grande “ouverture sur la vie de la cité”.
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Petit Palais, dernière visite avant travaux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°150 du 31 mai 2002, avec le titre suivant : Petit Palais, dernière visite avant travaux