NEW YORK / ETATS-UNIS
Les artistes exposés lui reprochent d’avoir profité de ventes de charité pour acheter à bas-prix leurs œuvres.
« Il faut rémunérer les artistes ». C’est en substance la cause de l’annulation de l’exposition « Collective Actions : Artist Interventions In A Time of Change », qui devait débuter le 17 septembre au Whitney Museum de New York. Le propos de l’exposition était de montrer la création artistique et le rôle des artistes en ces temps charnières, marqués par la crise sanitaire et le mouvement Black Lives Matter. Mais le musée d’art américain a rapidement renoncé face à la polémique qui a enflammé les réseaux sociaux le mardi 25 août dernier.
Plusieurs artistes n’ont effectivement pas caché leur colère lorsqu’ils ont reçu un courriel du directeur des recherches pour le compte du Whitney, Farris Wahbeh, leur annonçant avoir « acquis » une de leurs œuvres, qui serait montrée lors de l’exposition à venir.
Or ces œuvres n’ont pas été achetées dans le cadre traditionnel d’acquisition d’un musée, mais lors de ventes de charité pour lesquelles les artistes ont donné des œuvres, vendues à bas coût (une petite centaine d’euros) au bénéfice d’organismes caritatifs. La plupart se sont donc sentis floués par ces acquisitions détournées, d’autant que ces ventes avaient avant tout pour but de permettre à un public n’y ayant pas accès d’acquérir une œuvre.
Dans son interview au New York Times, la photographe Dana Scruggs juge indécente la conduite de l’institution qui, en plus de ne pas demander l’autorisation aux principaux concernés, a les moyens de payer les œuvres à leur juste prix. D’autant plus en cette période de crise où les artistes ont eux aussi besoin de soutien financier. Dans son courriel, M. Wahbeh ne leur offrait qu’un pass leur permettant de visiter le musée gratuitement à vie, une compensation dérisoire qui a été perçue comme un affront.
De plus, certains artistes n’ont pas manqué d’épingler l’institution, dont l’attitude participe selon eux d’un « racisme systémique ». Le musée a en effet profité d’une vente de charité organisée par un collectif de photographes noirs américains fondé suite à la mort de George Floyd. Se faisant, il n’a pas rémunéré les artistes qui étaient tous des photographes noirs américains, dans un contexte déjà tendu autour du Black Lives Matter que le musée voulait justement illustrer.
Sur les réseaux sociaux, le Whitney s’est excusé de sa gestion maladroite de la situation, et « la frustration » qui en a découlé. La plupart des internautes ont quant à eux déploré l’annulation pure et simple de l’exposition, alors que le musée aurait pu décider de rémunérer correctement les artistes.
Le Whitney Museum fait régulièrement l’objet de polémiques. L’année dernière, un de ses trustees s’était vu contraint à la démission alors qu’il était impliqué dans la fabrication de gaz lacrymogène utilisé pour refouler les demandeurs d’asile à la frontière avec le Mexique. En 2017, l’exposition d’une œuvre de la peintre Dana Schutz représentant le jeune Emmett Till dans son cercueil, le visage défiguré après avoir été sauvagement battu à mort par deux Blancs en 1955, avait également provoqué une vague de contestation.
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Le Whitney Museum annule son exposition de réouverture face à la colère des artistes
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