PARIS
Le Musée Marmottan va s’enrichir de cent trente œuvres, dont "une trentaine de chefs-d’œuvre", grâce au legs de la collection Annie Rouart – l’une des petites-filles par alliance de Berthe Morisot – décédée en 1993. Ce musée, dépendant de l’Institut de France, devrait alors posséder l’ensemble le plus important au monde d’œuvres de Berthe Morisot, disparue, elle, il y a cent ans.
PARIS - Le legs Rouart (lire notre encadré sur la "dynastie") constituera l’enrichissement le plus substantiel du musée géré par l’Académie des beaux-arts, depuis les donations Michel Monet (fils de l’artiste) et Wildenstein. Il devrait permettre à Marmottan de posséder l’ensemble le plus conséquent d’œuvres de Berthe Morisot, dont Eugène Manet à l’île de Wight (1875), ainsi que l’une des plus belles versions du Cerisier.
"Nous savons que le legs comprend environ 130 œuvres, dont une trentaine sont des chefs-d’œuvre", indique sans plus de précision Marianne Delafond, du Musée Marmottan, car rares ont été ceux qui ont pu voir ladite collection. "Madame Rouart était très gentille, mais jamais nous n’avons parlé de sa collection.
Et, autant que je sache, aucun marchand n’y a eu accès", confie Waring Hopkins, de la galerie Hopkins Thomas, pourtant galeriste de la famille Rouart et spécialiste sur le marché français des œuvres de Berthe Morisot. "Je me souviens qu’il y avait nombre de Berthe Morisot, quelques Manet et beaucoup de Rouart car on était tous artistes dans la famille, ajoute Victoria Rouart, veuve de Clément Rouart.
J’ai en particulier le souvenir d’un portrait de ma belle-mère avec un chat (Julie, fille de Berthe Morisot) par Renoir, et d’huîtres de Manet".
Décédée à la fin 1993, sans enfant, Annie Rouart a préféré léguer sa collection à Marmottan plutôt qu’au Musée d’Orsay, car elle craignait que "l’ensemble soit présenté de manière dispersée", assure l’un des exécuteurs testamentaires. "Ce legs témoigne s’il en était besoin de la confiance et de l’estime qu’inspirent nos institutions aux collectionneurs privés", se félicite Marcel Landowski, chancelier de l’Institut et ancien perpétuel de l’Académie des beaux-arts. L’Institut de France avait redouté que le rapport de la Cour des comptes mettant en cause sa gestion (1991) ne décourage d’éventuels donateurs.
Cependant, le "versement" des œuvres tarde en raison de "l’imbroglio de la succession", déplorent Éric Peuchot, administrateur de l’Institut, et Arnaud d’Hauterives, académicien et conservateur de Marmottan. Pour les exécuteurs testamentaires, François Daulte et Daniel Wildenstein, tous deux membres de l’Académie des beaux-arts, il s’agit d’un délai raisonnable et habituel.
La présentation de ce legs interviendrait à point nommé à l’automne prochain, époque où l’Institut de France commémorera son bicentenaire. Dans cette perspective, Marmottan, qui accueille 200 000 visiteurs par an, s’apprête à de nouveaux réaménagements. Le pavillon dans le jardin recevra, après travaux, l’ensemble des collections Empire du Musée.
Un passage souterrain pourrait relier le pavillon et les salles Monet. Si l’arrivée de la collection Rouart tardait, Marmottan "hériterait" d’une exposition à la gloire des artistes académiciens, depuis la création de l’Académie jusqu’à nos jours. Un panorama certainement des plus instructifs…
Le fondateur : Henri Rouart, industriel, célèbre pour son amitié avec Degas et son importante collection allant de l’Antiquité jusqu’à l’Impressionnisme, déployée dans son hôtel particulier, rue de Lisbonne. Une partie a été dispersée en vente publique.
L’un de ses enfants, Ernest, unique élève de Degas, épouse par l’entremise de ce dernier, Julie Manet (1), fille de Berthe Morisot (1841-1895) et d’Eugène Manet, frère d’Édouard.
Julie Manet et Ernest Rouart ont trois fils, aujourd’hui tous décédés :
- Julien, qui a épousé Thérèse de Garrigues, sans enfant.
- Clément qui, avec son épouse Victoria, a eu quatre enfants.
- Denis, qui a épousé Annie Conan, sans enfant.
(1) pour les relations entre Degas et les Rouart/Morisot, on se reportera au Degas d’Henri Loyrette (Gallimard-Découvertes).
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Le Musée Marmottan encore plus impressionniste
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°14 du 1 mai 1995, avec le titre suivant : Le Musée Marmottan encore plus impressionniste