PARIS
Un documentaire diffusé le 13 avril sur France 5 donne une vision de la position du Louvre sur l’attribution, rejetée, du tableau à Léonard. Vision contredite par un article du New York Times.
Paris. Dernier épisode en date du feuilleton du « Salvator Mundi », un documentaire diffusé sur France 5 le mardi 13 avril affirme que le Louvre aurait étudié le tableau dans son laboratoire et rejeté l’attribution à Léonard. À la suite de quoi l’Élysée aurait refusé les conditions d’exposition demandées par le propriétaire, entraînant l’absence du tableau à l’exposition. Une version mise à mal par le quotidien The New York Times.
En 2019, la question de la venue du Salvator Mundi au Louvre était en effet restée en suspens jusque dans les derniers jours précédant l’ouverture de l’exposition « Léonard de Vinci » (oct. 2019-févr. 2020). Une attente à la mesure de l’histoire de ce tableau acheté par un antiquaire new-yorkais dans une salle des ventes de Louisiane, lourdement restauré, acheté par l’oligarque russe Dmitri Rybolovlev par l’intermédiaire d’Yves Bouvier puis revendu aux enchères pour la somme fabuleuse de 450 millions de dollars (frais compris). Le documentaire confirme l’hypothèse répandue selon laquelle le tableau aurait été acquis par Mohammed ben Salmane (« MBS »), le prince héritier d’Arabie saoudite.
Dans le film, l’incertitude sur la présence ou non du tableau à l’exposition du Louvre serait liée à des tractations secrètes entre la France et MBS. Les témoignages croisés de deux hauts fonctionnaires anonymes et de Chris Dercon, président de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais et conseiller artistique de l’Arabie saoudite, relatent des négociations dans lesquelles le gouvernement français et le Musée du Louvre n’auraient pas cédé aux exigences saoudiennes – présenter le tableau comme une œuvre autographe de Léonard de Vinci. Selon « Jacques », « haut fonctionnaire du gouvernement », le tableau serait arrivé au Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) en juin 2018 et y serait resté trois mois. « À l’issue de ce processus, le verdict tombe, explique-t-il, l’expertise scientifique a permis de démontrer que Léonard n’a fait que contribuer à ce tableau. » Plus tard il ajoute : « Fin septembre 2019, le président Macron a tranché. Il a été décidé de ne pas donner suite à la demande de Mohammed Ben Salmane. »
D’après Chris Dercon, Jean-Luc Martinez, président-directeur du Louvre, aurait informé la délégation saoudienne de ces résultats, incompatibles avec les exigences du prince héritier. « La demande de Mohammed Ben Salmane était très claire : exposer le Salvator Mundi aux côtés de La Joconde, et le présenter comme un Vinci à 100 % », retrace Jacques. Le haut fonctionnaire révèle également que Franck Riester, alors ministre de la Culture, et Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères, auraient été « sensibles aux projets saoudiens » : c’est le chef de l’État qui aurait tranché afin de préserver la crédibilité du Louvre.
Cependant, un élément d’importance non évoqué dans le film réalisé par Antoine Vitkine contredit en partie cette version. Selon le New York Times, dans un petit livre publié par le Louvre mais jamais officiellement diffusé, Vincent Delieuvin, commissaire de l’exposition, se serait prononcé en faveur d’un tableau autographe de Léonard de Vinci, ce que Jean-Luc Martinez confirmerait sans détour dans l’avant-propos. Ce complément au catalogue de l’exposition consacré exclusivement au Salvator Mundi serait le seul compte rendu connu de l’expertise du C2RMF menée en 2018. Le feuilleton n’est pas achevé.
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Le Louvre face au « Salvator Mundi » : deux versions différentes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°565 du 16 avril 2021, avec le titre suivant : Le Louvre face au « Salvator Mundi » : deux versions différentes