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Le Getty dans la tourmente

La directrice des antiquités, Marion True, est mise en examen en Italie pour trafic illicite.

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 21 octobre 2005 - 687 mots

Marion True vient de démissionner de son poste de directrice du département des antiquités du Getty Museum, à Los Angeles. Actuellement poursuivie par la justice italienne pour association de malfaiteurs et trafic illicite d’antiquités, elle a quitté ses fonctions pour préparer sa défense.

LOS ANGELES - Le Getty traverse en ce moment une zone de turbulences. En effet, Michael Brand vient tout juste de remplacer au poste de directeur Deborah Gribbon, laquelle a démissionné il y a exactement un an. L’ancienne directrice aurait tiré les conséquences de son désaccord sur la manière dont le musée était géré. Depuis, le président et directeur général de la Fondation, Barry Munitz, fait l’objet d’une enquête du ministère de la Justice californien. Son train de vie, incluant des voyages fréquents en première classe avec son épouse, et la location d’une Porsche aux frais du musée, a fait grincer quelques dents.

Enfin, l’institution vient d’annoncer qu’elle allait restituer à l’Italie trois chefs-d’œuvre sur les quarante-deux objets de sa collection déclarés d’origine douteuse par les autorités transalpines. En remettant un gobelet du site gréco-romain de Paestum, un candélabre étrusque en bronze et une pierre gravée d’une inscription funéraire de la colonie grecque de Selinunte, le musée espère faire lever la procédure lancée aux États-Unis par l’Italie, soucieuse de récupérer l’ensemble des objets.

Accusation italienne
Un article accablant publié par le Los Angeles Times du 25 septembre n’a fait que jeter de l’huile sur le feu. Après avoir passé au crible une importante documentation interne du musée, dont certains dossiers relevaient de l’enquête en cours à la Fondation, le quotidien californien a révélé que le musée avait fait l’acquisition d’antiquités pillées sur des sites archéologiques, et ce depuis 1985 et en toute connaissance de cause. Le musée s’est empressé de mettre en doute la validité de ces documents, tout en admettant que quatre-vingt-deux pièces de sa collection avaient été acquises auprès de marchands aujourd’hui mis en examen.

Le Getty a pourtant depuis longtemps fait de la lutte contre le trafic illicite son cheval de bataille. En décembre 1995, il annonçait ne plus vouloir procéder à des acquisitions sans disposer d’une solide documentation sur la provenance. En 1999, Marion True avait été responsable des enquêtes qui avaient mené à la restitution de trois objets volés à l’Italie, parmi lesquels une copie romaine d’une tête de Diadoumenos par Polyclète issue de la collection Fleischman.

Aujourd’hui, Marion True, qui devait diriger le nouveau musée d’antiquités du Getty dont l’inauguration doit avoir lieu en janvier 2006 dans l’ancien siège de la fondation à Malibu, attend la reprise de son procès, prévue en novembre. Le marchand Robert E. Hecht Jr., un Américain de 87 ans vivant à Paris, et le galeriste italien Giacomo Medici sont également mis en examen à ses côtés. Le deuxième a été condamné l’an dernier à dix ans de prison, un jugement pour lequel il a interjeté appel. Suspendu en attendant la traduction d’importants documents, le procès qui a débuté en juillet à Rome est l’aboutissement d’une enquête entamée il y a une dizaine d’années. La police italienne avait alors saisi près de 4 000 pièces antiques dans le port franc de Genève. Elle a par la suite identifié, par le biais de Polaroïds saisis dans l’un des entrepôts, plusieurs dizaines d’objets aujourd’hui dans les collections du musée américain. La conservatrice aurait sciemment pris part à un vaste trafic transitant par Genève. Elle avait d’ailleurs déjà attiré l’attention en 1988 après l’achat d’une Aphrodite de Magna Grecia (Grande Grèce). Selon les cercles archéologiques, la statue aurait été illégalement mise au jour sur un site sicilien.

Mais la démission de Marion True est liée à une autre affaire. Si le Getty a encore récemment réaffirmé sa solidarité envers son ancienne employée au sujet des accusations italiennes, l’institution californienne estime que Marion True a enfreint le règlement interne de la fondation lors de l’achat d’une maison sur l’île grecque de Paros en 1995. En dépit des consignes sur les conflits d’intérêt, elle avait alors bénéficié d’un emprunt de 400 000 dollars (env. 300 000 euros de l’époque) arrangé par Christo Michailidis, l’un des principaux fournisseurs du musée.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°223 du 21 octobre 2005, avec le titre suivant : Le Getty dans la tourmente

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