Musée

« La Dentellière », Johannes Vermeer

La Dentellière ouvre son atelier au Louvre-Lens

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 5 juillet 2023 - 542 mots

1670-1671 C’est l’un des tout derniers tableaux de Vermeer (1632-1675), il représente un sujet alors en vogue à Delft, aux Pays-Bas. La jeune femme, probablement l’épouse du peintre, est absorbée dans son travail minutieux d’exécution d’un motif à la dentelle. Dans un format très réduit (24,4 x 21 cm), le peintre centre la scène sur le personnage, alternant des représentations très précises de la réalité et des zones floues, dans une succession de plans qui seraient selon les spécialistes réalisés à l’aide d’une camera obscura. Comme La Laitière (1658) ou La Jeune Fille à la perle (vers 1664-1667), LaDentellière (1669-1670) fascine par la quiétude empreinte de philosophie qui se dégage de la scène.

1675 Décès du peintre. L’œuvre semble avoir été acquise auparavant par Pieter Claesz. van Ruijven, qui possède de nombreuses toiles de Vermeer. Le tableau passe entre les mains de l’épouse puis de la fille de van Ruijven avant d’être détenu par plusieurs marchands d’Amsterdam. Il aurait par la suite appartenu au baron A. W. C. van Nagell van Ampsen (1756-1851), qui fut ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas, puis à Johannes Lamme (1812-1900), peintre et futur directeur du Musée Boijmans à Rotterdam.

1870 La Dentellière entre dans les collections du Louvre grâce à un achat après décès de son dernier propriétaire, Dirk Vis Blokhuyzen (1799-1869), qui l’avait légué avec toute sa collection à la ville de Rotterdam, laquelle a refusé la succession. Après une longue éclipse, Vermeer a été redécouvert quelques années auparavant par le critique d’art français et militant républicain Théophile Thoré-Bürger (1807-1869), qui s’est passionné pour le peintre depuis sa visite en 1842 du musée de La Haye où il a découvert la Vue de Delft. Il attribue une soixantaine de tableaux à Vermeer, pas toujours avec raison, et publie en 1866 une série d’articles sur ses travaux qui font connaître Vermeer, ou plutôt une certaine image de Vermeer, celle d’un peintre ignoré de son temps puis oublié.

2012 Ouverture du Louvre-Lens dans le Pas-de-Calais, et de sa fameuse Galerie du temps qui présente dans un vaste espace une sélection d’œuvres de toutes les régions du monde classées selon un ordre chronologique. Toutes les œuvres sont prêtées par le Louvre. Afin de marquer l’importance que le musée national accorde à son antenne et à la région des Hauts-de-France, le Louvre y fait aussi le dépôt d’une œuvre très connue pendant un an. À l’ouverture, ce fut l’immense Liberté guidant le peuple (1830) de Delacroix, puis le musée lensois accueille pour l’anniversaire de ses 10 ans Le Scribe accroupi, une statue égyptienne en calcaire (vers 2600 av. J.-C.).

2023 Depuis le 28 juin, c’est à La Dentellière d’être exposée pendant un an dans la Galerie du temps. Le geste est d’autant plus fort que le musée parisien s’est privé du chef-d’œuvre depuis février dernier pour la grande rétrospective « Vermeer » à Amsterdam – celle-ci a fermé ses portes début juin sur un record de visiteurs (650 000). L’exposition, qui réunissait 28 tableaux sur les 36 de son corpus, a permis de modifier l’image d’un artiste isolé et mystérieux en montrant qu’il était, bien au contraire, un personnage reconnu à Delft (membre de la garde civile de la ville, un honneur), et que ses œuvres étaient recherchées par ses contemporains.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°615 du 7 juillet 2023, avec le titre suivant : « La Dentellière », Johannes Vermeer : La Dentellière ouvre son atelier au Louvre-Lens

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