Abbeville va offrir un écrin à la donation Manessier

Abbeville (Somme). Ce sont bientôt deux gloires abbevilloises qui cohabiteront au sein du musée municipal : Jacques Boucher de Perthes (1788-1868), archéologue, précurseur de la science préhistorique, devra laisser un peu de place à Alfred Manessier (1911-1993), peintre des paysages de la baie de Somme. Le premier donne son nom au musée : sa collection personnelle et celle constituée par la société savante qu’il a fondée forment le gros du fonds d’Abbeville. Le second a considérablement enrichi les dites collections grâce à d’importantes donations. Des travaux d’extension du musée furent la condition posée pour recevoir ces dons ; ils se concrétisent aujourd’hui par le lancement d’une étude de programmation architecturale et technique : le nouveau maire, Pascal Demarthe (UDI), en a fait un projet phare de son mandat.

La première donation Manessier intervient en 2001, lorsque la veuve du peintre confie à la Ville son œuvre gravé, des livres illustrés ainsi que les travaux préparatoires aux vitraux de l’église Saint-Sépulcre d’Abbeville. « C’était une première donation riche, mais très difficile à muséographier », explique Patrick Absalon, responsable scientifique du Musée Boucher-de-Perthes. Fragiles, et de petite taille, ces pièces ne peuvent être exposées que de manière temporaire afin d’assurer leur bonne conservation. La seconde donation est effectuée par les enfants d’Alfred Manessier en mai 2019 : il s’agit cette fois de tableaux grand format, qui se prêtent mieux à une exposition permanente. L’acte notarié signé conjointement par les héritiers et la Ville précise que les quelque 600 œuvres léguées devront être abritées dans une extension du musée, à l’horizon 2026.

Les œuvres de ce peintre de la nouvelle école de Paris rejoignent les collections d’un musée éclectique, où le parcours oscille entre beaux-arts, histoire locale, archéologie et histoire naturelle. Boucher de Perthes oblige, les vestiges paléolithiques occupent une place importante, relatant l’histoire de ce territoire occupé par l’homme depuis 700 000 ans. Autre ensemble d’importance, la collection ornithologique, qui rassemble des espèces rares, exotiques, et parfois disparues : un incontournable pour les spécialistes du sujet. Validé par le ministère de la Culture, le nouveau projet scientifique et culturel du musée mise sur l’histoire et les traditions locales pour donner de la cohérence à cette diversité : « Il y a la problématique de cette collection vaste et diverse, commente Patrick Absalon. Il n’y aura pas de parcours linéaire, d’un point A à un point B, mais des univers de visite qui feront découvrir les collections et le territoire. Manessier aura une place éminente dans ce parcours. »

Une place qui justifie de donner son nom au futur musée agrandi ? C’est en tout cas l’une des demandes figurant dans l’acte notarié de la donation. Le testament de Boucher de Perthes indique également que le nom de l’archéologue doit rester associé au lieu qui abrite ces collections. Les deux gloires d’Abbeville cohabiteront-elles jusque dans le nom du musée ? La Mairie n’a pas encore de réponse à ce casse-tête.