Société - Urbanisme

Éditorial

Un tournant dans la réhabilitation du patrimoine

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 6 mai 2021 - 361 mots

FRANCE

On constate depuis quelque temps une évolution dans la « doctrine » de la réhabilitation des sites patrimoniaux.

L'hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris. © Lionel Allorge, 2017, CC BY-SA 3.0
L'hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris.
Photo Lionel Allorge, 2017

Pendant longtemps, la tentation première des élus a été d’y installer un éminent équipement culturel, bibliothèque, théâtre ou musée. Puis ils ont commencé à adosser à ces équipements des activités naturellement complémentaires – bar, restaurant, atelier de travail – ou plus inattendues comme une crèche ou un hammam, comme au Lieu unique à Nantes. La multiplication des établissements a alors commencé à peser dans l’équation économique et les aménageurs ont introduit davantage d’activités commerciales lucratives avec une caution artistique toute relative, comme, par exemple, au Centquatre à Paris qui loue une partie de ses espaces pour des salons.

Aujourd’hui, si la référence à la culture est toujours présentée, elle commence à devenir l’accessoire d’un ensemble d’occupations qui relèvent surtout de la vie quotidienne. Ainsi à Paris, la Ville veut faire de l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul dans le XIVe arrondissement un véritable quartier avec logements, crèches, équipements sportifs. Et en son sein, au projet d’un « musée » Giacometti elle a préféré un « centre d’art et de solidarité » d’un nouveau genre avec restaurant solidaire et centre d’hébergement Emmaüs. C’est la même démarche qui prévaut sur l’ancien site Éclair à Épinay-sur-Seine et plus encore dans la citadelle d’Ajaccio avec une dimension supplémentaire qui pourrait se résumer ainsi : « Ouvrons le site au plus vite aux habitants et on verra bien ce que l’on en fera plus tard. »

Les contraintes économiques expliquent en partie cette tendance. Il n’y a plus guère que le privé comme François Pinault à la Bourse de commerce ou Cartier au Louvre des Antiquaires qui peut assumer seul le coût des travaux de restauration et la charge d’exploitation. Mais pas seulement. Les habitants veulent aussi davantage de services du quotidien et d’une culture disons plus populaire, moins intimidante.

Alors, pour aiguillonner l’imaginaire, on n’ouvre plus ces lieux, on les « active », comme on active une installation d’art contemporain, avec des animations où l’art et la culture sont largement sollicités. Malgré le changement de vocabulaire, c’est une réalité aussi ancienne que les sociétés humaines où la culture devient indispensable quand l’indispensable (se loger, se nourrir, se soigner) est assuré.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°566 du 30 avril 2021, avec le titre suivant : Un tournant dans la réhabilitation du patrimoine

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