Réédition d’un ouvrage de synthèse sur la politique culturelle en France, au propos plus analytique que descriptif.
Le titre de l’ouvrage est trompeur et l’on s’en rend compte à la lecture de la quatrième page de l’introduction : « L’objet du présent ouvrage est d’analyser la politique culturelle de la France en privilégiant une lecture économique […] il est écrit par deux économistes. » Il ne faut donc pas s’attendre à un manuel sur la politique culturelle de la France. Certes Sylvie Pflieger et Xavier Greffe, les deux éminents universitaires, reprennent dans cette réédition, largement complétée depuis une première publication en 2009, les figures imposées que sont l’histoire de la politique culturelle, ses acteurs, ses sources de financements, et évoquent les deux missions structurantes du ministère de la Culture : la création et le patrimoine. Mais ils le font à travers le seul spectre économique, laissant de côté de larges pans administratifs et réglementaires. Ainsi les espaces protégés ne sont-ils décrits que sur deux pages, insuffisantes pour appréhender la complexité de cette législation. Et comme l’ouvrage a été publié en avril 2015, il ne peut faire état du projet de loi en cours.
En revanche, ce changement de focale ouvre des horizons, certes connus mais ici largement développés. Le dernier chapitre sur le lien entre culture et développement économique en est l’acmé, avec un regard inédit porté sur la culture considérée comme un pilier du développement durable. C’est cependant la section sur la démocratisation culturelle qui retient l’attention. Elle constitue un chapitre à part entière et, en investissant le registre sociologique et non pas économique, offre une analyse passionnante de toute la politique culturelle française à l’aune de sa réception.
Problématisation des politiques culturelles
Car loin de se complaire dans l’aridité des chiffres, les auteurs présentent largement les débats qui animent les différents domaines de la politique culturelle. Ils semblent même y être à leurs aises, n’hésitant pas à donner leur propre opinion, par exemple sur la gratuité d’entrée dans les musées, voire à prendre parti, quand ils évoquent « la fin de l’âge d’or de la politique culturelle » sous la présidence de Nicolas Sarkozy. D’une certaine façon, tout en s’appuyant (beaucoup) sur leurs publications précédentes, ils problématisent plus qu’ils ne décrivent les multiples aspects de la politique culturelle. Et comme celle-ci ne se réduit pas au chiffre de la hausse du budget de la Culture, mais qu’elle couvre de nombreux champs, les auteurs décrivent un éventail de points de vue.
Deux compléments seraient très appréciés pour une troisième édition. D’une part un sommaire plus développé ou, à défaut, un index qui fait ici cruellement défaut pour retrouver rapidement une thématique. D’autre part des chiffres plus récents, s’agissant par exemple des budgets culturels croissants des collectivités territoriales, lesquels s’arrêtent dans l’ouvrage à ceux de l’année 2010. De même, il aurait été judicieux d’aller au-delà de 2005 pour indiquer le poids de la Culture dans le budget de l’État. Et l’on profite de cette recension pour lancer un appel à tous les économistes de la culture afin qu’ils mettent en perspective les données françaises avec celles des autres pays européens. Les chiffres n’ont de sens que lorsqu’on les compare.
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Politique culturelle : un anti-manuel
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Abonnez-vous dès 1 €Xavier Greffe, Sylvie Pflieger, La politique culturelle en France, 2e édition, éd. La Documentation française, 240 pages, 24,50 €.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°449 du 22 janvier 2016, avec le titre suivant : Politique culturelle : un anti-manuel