ViennAfair

Vienne se place sur l’échiquier

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 15 avril 2005 - 652 mots

Du 21 au 24 avril, une nouvelle foire viennoise cherche ses marques dans le calendrier des salons internationaux d’art contemporain.

VIENNE - À regarder la liste des exposants de la nouvelle ViennAfair lancée par Reed Expositions dans la capitale autrichienne, on se dit qu’après la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), la société britannique se fait décidément une spécialité des foires purement régionales ! Sur 90 exposants, ViennAfair compte 41 enseignes autrichiennes et 15 allemandes. Il serait d’ailleurs tentant de voir dans cette nouvelle manifestation, née sur les cendres d’une foire locale, une soupape pour le marché germanique grevé par la crise économique.
Pour convaincre de la pertinence d’un événement dit « international » à Vienne, les organisateurs arguent d’une scène artistique dynamique, en avançant en guise d’appât des collections d’entreprise comme la Generali Foundation créée en 1988 ou la Bawag Foundation, lancée en 1974. Plusieurs nouvelles institutions dédiées à l’art contemporain ont aussi vu le jour ces deux dernières années en Autriche, notamment le Kunsthaus de Graz et le Lentos Kunstmuseum à Linz. Ce terreau institutionnel a séduit la galeriste Catherine Bastide (Bruxelles) qui compte en profiter pour rencontrer critiques et commissaires d’exposition. D’autres mettent en avant l’existence de collectionneurs notoires comme Francesca von Habsbourg, Herbert Liaunig ou Karlheinz Essl. Ce dernier avait notamment acheté l’an dernier sur la Foire de Bâle un grand mur de Chillida (500 000 euros) chez Lelong (Paris). En utilisant la même focale, on pourrait dire que la France compte François Pinault, Bernard Arnault, Marcel Brient et la Fondation Cartier ! « Les locomotives autrichiennes ont plus de wagons derrière elles que les françaises », objecte Bernard Jordan (Paris), l’un des deux seuls exposants français avec Lelong, ajoutant : « Il y a plus de petites entreprises qui bougent dans l’art contemporain. Le marché autrefois dormant se développe depuis quinze ans. » Les deux artistes autrichiens de son écurie, Bruno Gironcoli et Elmar Trenkwalder, ont pesé sur sa décision. De Trenkwalder, le galeriste compte présenter une grande sculpture qu’on retrouvera dans les prochains « Contrepoints » organisés au Musée du Louvre en novembre.
En invitant à des tarifs avantageux onze galeries et six musées d’Europe centrale, la foire pratique à sa façon la Ost Politik chère à l’ancien chancelier allemand Willy Brandt. Si l’ouverture à l’Est a miné l’économie allemande, l’Autriche doit une grande partie de sa croissance aux PECO (pays d’Europe centrale et orientale). Un tiers des investissements autrichiens sont effectués chez les nouveaux adhérents de l’Union européenne. La fortune de Karlheinz Essl repose d’ailleurs sur l’implantation dans six pays de l’Est de sa firme Baumax, équivalent de notre Castorama. La scène artistique, notamment polonaise, est aussi dans la ligne de mire des spéculateurs. En témoigne l’envolée irrationnelle des prix de Wilhelm Sasnal. « Il y a trop de foires, mais une foire pour l’Europe centrale, c’est nécessaire, observe Francesca von Habsbourg. Quand on va à Londres, Paris ou ailleurs, on voit les mêmes galeries avec le best-of des choses les plus vendables. Pour les collectionneurs sérieux, des foires secondaires comme ViennAfair peuvent être importantes. »
Le marché local peut-il pour autant absorber 90 galeries ? Si les pays de l’Est comptent pléthore d’artistes talentueux, le potentiel en collectionneurs reste limité. La galerie Raster (Varsovie) tire plus son oxygène des galeries relais étrangères que du vivier polonais encore embryonnaire. De leur côté, les Nouveaux Russes préfèrent les travées d’Art Basel qui leur permettent de faire d’une pierre deux coups en rencontrant aussi des hommes d’affaires. « Nous avons conscience qu’il s’agit d’un travail à long terme », convient Rosemarie Scharzwälder, directrice de la galerie nächst St. Stephan (Vienne). Pour réussir, ViennArtfair doit donc battre le rappel des amateurs internationaux pour lesquels les foires de demi-saison comptent pour du menu fretin.

ViennAfair

21-24 avril, Messezentrum Wien Neu, Vienne, tél. 43 1 727 200, www.viennAfair.at, les 21 et 22 avril 12h-19h, le 23 avril 11h-19h, le 24 avril 11h-18h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°213 du 15 avril 2005, avec le titre suivant : Vienne se place sur l’échiquier

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque