Dans un contexte international plus serein que l’an dernier, la foire internationale de Maastricht se félicite d’un bon niveau d’activité.PAR ARMELLE MALVOISIN
MAASTRICHT - La 25e édition de Tefaf (The European Fine Art Fair) s’est tenue au Centre d’expositions et de congrès de Maastricht (Pays-Bas) du 16 au 25 mars, dans un très bon climat. L’an dernier, entre les événements japonais de Fukushima précédant de quelques jours le lancement de Tefaf et les aléas de la Bourse, l’ambiance était plus crispée, même si, au final, les affaires ont été bonnes. Cette année du jubilé d’argent a été d’un très haut niveau qualitatif général, dans la continuité de ce que l’on découvre tous les ans à Tefaf. A mi-parcours, un peu plus de 44 000 entrées ont été enregistrées, soit environ 800 personnes de plus que l’édition précédente. Ce qui n’est pas vraiment significatif compte tenu du nombre de stands (265) et de la surface d’exposition (autour de 30 000 m2).
La section des tableaux anciens a brillé. En quelques jours, le Londonien Johnny van Haeften a cédé une douzaine d’œuvres « de tous types et dans une large gamme de prix » dont le tableau de Frans Francken le Jeune, l’Éternel dilemme : le choix entre le Vice et la Vertu (1633) pour 10,5 millions d’euros. La toile monumentale de 142 x 210,8 cm qu’il avait également exposée à la foire l’an passé, a été achetée par un collectionneur américain absent en 2011. Lorsqu’ils n’hésitent pas à représenter leurs plus belles pièces lorsqu’elles n’ont pas trouvé acquéreurs quelques mois auparavant, les marchands de tableaux anciens sont parfois récompensés. Ainsi, le marchand parisien Éric Coatalem vantait de nouveau sa magnifique Biche aux aguets de Jean-Baptiste Oudry, montrée à Tefaf 2011, puis au salon premier salon Paris Tableau en novembre 2011. Cela a porté ses fruits pour la Nature morte par Alexandre-François Desportes, remarquée à Paris Tableau et partie à Tefaf. La Crucifixion, superbe huile sur panneau de Pierre Paul Rubens, transcendant son sujet religieux, a été achetée 3,5 millions d’euros par un amateur privé à la galerie Galerie Colnaghi-Bernheimer (Londres, Munich), dans les minutes qui ont suivi le coup d’envoi de Tefaf. Mais beaucoup d’œuvres se négocient dans le temps. Chez Giovanni Sarti (Paris), collectionneurs privés et musées se sont longuement penchés sur une Pieta (vers 1618-1620) de Bernardo Strozzi, provenant du Musée de Cleveland.
Une section contemporaine à enrichir
La section Art moderne et contemporain, devenue essentielle pour le développement de la foire, était plus inégale. Mais les organisateurs de Tefaf se heurtent au problème de la concurrence des foires spécialisées dans ce domaine.
Dès le soir du vernissage, le galeriste munichois Daniel Blau a vu son stand délesté d’une vingtaine de dessins d’Andy Warhol des années 1950 (autour de 50 000 euros pièce) occupant plus de la moitié de son stand. Dans la nuit qui a suivi, il a dû se réapprovisionner en faisant venir d’autres œuvres d’Allemagne. Spécialiste de la seconde école de Paris, le galeriste parisien Frank Prazan avait une sélection plus ouverte : un grand tableau d’Anselm Kieffer, Merbaka (2002), s’imposait sur son stand, tandis qu’une très belle Figure (1954) abstraite de Nicolas de Staël aurait pu se vendre plusieurs fois. Chez Hopkins-Custot (Londres), un petit tableau abstrait de Staël qui a déclenché plusieurs coups de cœur côtoyait un grand pastel sur papier de Sam Szafran, tandis que des amateurs sont repartis avec des gouaches et aquarelles de Jean-Louis Forain. La galerie bruxelloise Odermatt-Vedovi a vendu un grand tableau de Christopher Wool ; deux toiles monochromes sur châssis modifié d’Agostino Bonalumi, tandis qu’une installation au sol de Carl André, Aluminium-Magnesium Alloy Square (1969), était réservée par une institution américaine. Pendant qu’une immense huile sur toile Study from the human body (1982) de Francis Bacon, à 11,5 millions d’euros, attendait un acquéreur, l’enseigne zurichoise Malborough vendait trois peintures de l’artiste belge Koen van den Broek. Ce dernier fera partie de l’écurie de sa nouvelle galerie d’art contemporain qui s’ouvrira cet automne dans le même bâtiment.
Malgré le succès de ses artistes – en particulier le duo Bertozzi & Casoni avec ses œuvres en céramique, la galerie Sperone Westwater (New York) regrettait que la partie consacrée à l’art contemporain ne soit pas plus étoffée « pour attirer plus de collectionneurs ».
Le dessin en retrait
Les marchands de la section « Works on paper » ont encore pâti de leur isolement à l’étage, malgré l’exposition Dessins de maîtres provenant de la Fondation Custodia (Paris) censée drainer un flux d’amateurs vers les stands avoisinants. « Il faut faire quelque chose pour que l’on soit avec les autres exposants, quitte à refaire les structures et mettre la cantine à notre place », râle un exposant. Cette zone mal desservie n’était pas complément désertée, puisqu’un collectionneur américain a fait l’acquisition de neuf tirages argentiques d’époque de Josef Sudek chez le marchand viennois Johannes Faber et que le galeriste parisien Antoine Laurentin a vendu quelques œuvres à ses premiers clients chinois, « de Hong Kong», précise-t-il. Une centaine d’acheteurs chinois étaient attendus dans les premiers jours de Tefaf. Leur présence était discrète, car ils sont dilués sur l’ensemble de la foire. Plus que jamais attirés par leur culture, ils ont emporté une boucle de ceinture en bronze de la dynastie Daigou (481-221 avant J.-C.) chez Gisèle Croës (Bruxelles) et une dame de cour en céramique de la dynastie Tang (618-906) chez Ben Janssens (Londres). À sa plus grande surprise, Anthony Meyer (Paris) a vendu à une Chinoise un objet d’art eskimo. Cependant tous les marchands s’accordaient à dire qu’il faudra prendre en compte les achats chinois lorsqu’ils seront payés.
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Tefaf : un jubilé d’argent en or
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°366 du 30 mars 2012, avec le titre suivant : Tefaf : un jubilé d’argent en or