Sotheby’s et Christie’s Paris ont organisé des ventes de collections rivalisant de provenances prestigieuses, royales et historiques pour l’une, d’illustres personnages pour l’autre.
PARIS - Pour leurs vacations de rentrée, Sotheby’s et Christie’s ont misé sur des ventes de collections, tournées vers l’art ancien, couronnées d’un succès variable.
Sotheby’s a dépassé ses objectifs avec la collection des Orléans, récoltant 6,2 millions d’euros contre une estimation raisonnable de 3 à 4 millions d’euros (1). Et ce, malgré l’absence de trois pièces majeures de la collection, considérées récemment comme trésor national. Les pièces étant proposées en vente de gré à gré, l’État a trente mois pour faire une offre ou trouver des mécènes disposés à acquérir le Portrait de la duchesse d’Orléans peint par Élisabeth Vigée Le Brun, le Portrait de Louis XIII par Philippe de Champaigne ou le livre de comptes du château d’Amboise. La Banque de France pourrait être sur les rangs, elle qui vient de se porter acquéreur, conjointement avec les Pays-Bas, d’un des deux portraits par Rembrandt de la famille Rothschild, ce pour un montant de 80 millions d’euros.
15 préemptions
La salle comble ne comptait que peu de marchands et collectionneurs connus, rassemblant des jeunes et nouveaux acheteurs galvanisés à l’idée de posséder un quelconque souvenir royal. La plupart des estimations ont donc été dépassées : « En aucune manière ces lots auraient atteint ces prix s’ils avaient fait partie d’une vente ordinaire, avec un vendeur lambda », soulignait Nicolas Joly, expert en dessins et tableaux anciens. L’enchère la plus élevée a été remportée par Les Gentilshommes du duc d’Orléans dans l’habit de Saint-Cloud, de Carmontelle, à 440 000 euros au marteau, un record pour l’artiste, tandis qu’un Déjeuner en porcelaine de Sèvres daté 1840 livré pour la reine Marie-Amélie s’est vendu 495 000 euros (est. 100 000 à 150 000 €). Les Musées de France ont été particulièrement actifs, avec 15 préemptions. Le château de Versailles est reparti avec 6 lots dont Louis-Philippe, duc de Valois, au berceau, 1774, de Lépicié, pour 231 000 euros. « Chaque préemption était suivie d’applaudissements. Visiblement, le public était ravi que ces œuvres restent en France », commentait Nicolas Joly. Seule déception, les ordres n’ont pas fait d’étincelles et les deux colliers de l’ordre du Saint-Esprit n’ont pas trouvé preneur, estimés pour l’un 200 000 à 300 000 euros, pour l’autre 100 000 à 150 000 euros.
Collection Remilleux
Christie’s, qui organisait au même moment la dispersion de la collection Jean-Louis Remilleux, provenant du château de Digoin (Saône-et-Loire), est moins triomphale. Afin de recueillir des fonds nécessaires à la restauration du château, étaient proposés plus de 1 000 lots que le maître des lieux, producteur de télévision et passionné d’art, avait réunis assez récemment. Sur ce millier d’objets, 842 ont trouvé preneur, soit 80 % de lots cédés pour un total de 9,8 millions d’euros (en dessous de l’estimation haute).
Si le catalogue était une réussite – d’ailleurs beaucoup d’acheteurs étaient au téléphone et n’avaient pas fait le déplacement à Paris –, le pedigree a été un facteur décisif. Jean-Louis Remilleux y attachait une importance particulière, que cela concerne les grands hommes des XIXe et XXe siècles ou les personnages historiques. Aussi, nombre de lots provenaient des collections des Windsor, de Charles de Beistegui, du baron de Redé, de Pierre Bergé et Yves Saint Laurent, de Karl Lagerfeld, des Rothschild ou encore de Madame Élisabeth et du marquis de Marigny. À cela la provenance Remilleux apportait une plus-value. « Dès que l’on peut raconter l’histoire de quelqu’un et la façon dont il a amassé sa collection, c’est 30 à 50 % de plus sur le résultat d’une enchère. Le pedigree est un détonateur ! », soulignait Lionel Gosset, directeur du département des collections chez Christie’s Paris. Ont été emportés le mobilier et les tableaux, à l’instar de quatre portraits de Louis XIV et Louis XV, rois et dauphins, d’après Hyacinthe Rigault, Van Loo et Natoire, adjugés 337 500 euros (est. 70 000 à 100 000 €). Les sièges, nombreux, se sont bien vendus, à l’exemple du canapé d’époque Transition, estampillé « Bauve » ayant appartenu à Madame Geoffrin, adjugé 421 500 euros, juste en dessous de son estimation haute, un peu élevée par ailleurs mais constituant la plus belle enchère de la vacation.
(1) Toutes les estimations sont indiquées hors frais acheteur tandis que les résultats sont indiqués frais compris.
Sotheby’s, 29-30 septembre
Estimation : 3 à 4 M€
Résultat : 6,2 M€
Christie’s, 28-29 septembre
Estimation : 7,5 à 11 M€
Résultat : 9,8 M€
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Les provenances font flamber les enchères
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Abonnez-vous dès 1 €Louis Carrogis dit Carmontelle, Les gentilshommes du duc d’Orléans dans l’habit de Saint-Cloud, sanguine, pierre noire, aquarelle et gouache rehaussées de craie blanche, 26,3 x 40 cm, vente des 29 et 30 septembre, Sotheby's, Paris. © Sotheby’s/Art digital studio.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°443 du 16 octobre 2015, avec le titre suivant : Les provenances font flamber les enchères