Chine - Galerie

Asie

Le marché chinois attire les Français

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 28 avril 2010 - 753 mots

Plusieurs galeristes hexagonaux se sont installés en Chine. Les marchands qui ont choisi Shanghaï misent beaucoup sur l’Exposition universelle qui s’y ouvre le 1er mai.

SHANGHAÏ, PÉKIN - En 1922, le journaliste Albert Londres disait déjà : « À Shanghaï, on fait de l’argent. C’est la matière première et dernière. » Une phrase ô combien d’actualité, car la Chine compte désormais cent trente milliardaires en dollars, soit vingt-neuf de plus qu’en 2008. Selon l’Institut de recherche Hurun, le nombre de Chinois possédant une fortune évaluée à plus de 150 millions de dollars aurait été multiplié par dix depuis 2004. On comprend mieux dans ce contexte qu’une petite poignée de marchands français ait tenté l’aventure chinoise en ouvrant depuis deux ans des espaces à Pékin ou Shanghaï.

Certaines enseignes se présentent comme le prolongement d’une activité parisienne préexistante. C’est le cas de la galerie de sculptures animalières de Pierre Dumonteil, ouverte à Shanghaï en octobre 2008, ou de l’enseigne de Magda Danysz, baptisée « 18Gallery », installée depuis juin 2009 dans un magnifique espace sur le Bund. D’autres en revanche ont commencé à faire leurs gammes directement en Chine. Il en va ainsi d’Hadrien de Montferrand, installé à Pékin depuis 2009, ou d’Élisabeth de Brabant, laquelle a ouvert dans la concession française à Shanghaï voilà un an et demi.

Contrat de confiance
On l’aura remarqué, toutes ces galeries ont ouvert en temps de crise. Signe que le travail à long terme les motive plus qu’un instinct spéculatif immédiat. Même si la patience est de mise, les affaires reprennent plus vite dans l’empire du Milieu que dans la Vieille Europe. Pierre Dumonteil, qui a produit certaines pièces de Jean-Marie Fiori installées sur le site de World Expo 2010 [l’Exposition universelle], a déjà réussi à rentabiliser sa vitrine shanghaïenne.

Trois mois après avoir inauguré sa galerie, Magda Danysz a, dans la foulée, ouvert une résidence d’artistes. « Ce qui me fascine, c’est l’allure à laquelle il est possible de réaliser ses projets, souligne-t-elle. Ici tout est possible, à condition d’avoir de l’énergie à revendre. » À condition aussi de ne pas se tromper d’objectif. « Comme tout est basé sur la confiance, il ne faut pas leur vendre du vent, truquer les prix, insiste Roxane Dumonteil. Ils sont frileux et, à la moindre déception ou trahison, ils refermeront la porte. Ils n’ont pas besoin de nous dans l’absolu. Il faut les séduire, les conquérir sans prétendre que ce qu’on fait est meilleur. »

Spécialisé dans le dessin contemporain, Hadrien de Montferrand ne dit pas autre chose : « La clé de la réussite, c’est l’adaptation. S’adapter, c’est prendre des cours de chinois, mais aussi savoir rester à sa place et proposer un service impeccable. » Ce d’autant plus que la curiosité presque vorace des Chinois est plutôt encourageante. Reste à voir quel temps prendra le décantage des informations qu’ils emmagasinent goulûment.

Si Magda Danysz compte déjà 60 % de clientèle chinoise, tel n’est pas le cas de tous ses confrères. Il est en revanche très rare d’établir un contact direct avec les Chinois, lesquels préfèrent les intermédiaires. Ainsi la galerie Dumonteil compte-t-elle 50 % de décorateurs chinois parmi sa vingtaine de clients locaux. Si elle vend les sculptures animalières contemporaines dans une gamme de prix allant de 2 500 à 50 000 euros, elle n’a pas pour l’instant l’intention de montrer des sculptures de Rembrandt Bugatti, comme elle le fait à Paris. Car pour tout ce qui relève des valeurs sûres, les Chinois préfèrent l’entremise des ventes publiques.

Les nouveaux venus de Shanghaï espèrent tous un surcroît de visibilité avec World Expo, cette manifestation mastodonte organisée du 1er mai au 31 octobre et qui table sur six cent mille visiteurs quotidiens. La 18Gallery avait déjà doublé sa fréquentation à un mois de l’inauguration de cet événement. « Ce sera une étape importante dans l’éducation, pour montrer que Chinois et étrangers peuvent se mélanger », souligne Roxane Dumonteil.

Mais, comme le précise Victoria Edwards, project manager à la galerie Élisabeth de Brabant, il ne sera pas facile de garder pendant toute la durée de World Expo une énergie intacte. Peut-être n’est-ce pas là une mauvaise chose. Le galeriste de Pékin Xing Dong Cheng attend que l’agitation se calme pour ouvrir sans doute en 2011 une galerie de design à Shanghaï.

18Gallery, 18, East Zhonghan, Shanghaï, www.artabund18.com

Galerie Dumonteil, 153, Jumen Road, Shanghaï, www.galeriedumonteil.com

Galerie Hadrien de Montferrand, 798 Art District, No 4 Jiuxianqiao Lu, Pékin, www.hdemontferrand.com

Elisabeth de Brabant Art Center, 299, West Fuxing Road, Shanghaï, www.elisabethdebrabant.com

Légende photo

Shanghai - photographe : Keith Marshall - Licence Creative Common 2.0

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°324 du 30 avril 2010, avec le titre suivant : Le marché chinois attire les Français

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