Après les excès de l’an dernier, Sotheby’s et surtout Christie’s affichent des résultats certes en baisse, mais en phase avec le climat actuel. Monet et Munch ont fait de beaux prix.
New York - Les ventes du soir organisées par Sotheby’s et Christie’s mi-novembre ont totalisé 404 millions de dollars, soit une baisse de 10 % par rapport à novembre 2015 et de 60 % si l’on inclut les ventes Taubman (Sotheby’s) et The Artist’s Muse (Christie’s). Or, dès mai dernier (le total cumulé s’élevait seulement à 286 millions de dollars), le marché avait donné un coup de frein aux excès, notamment à l’escalade des garanties qui, cette année, se comptaient sur les doigts d’une main.
« J’analyse ces résultats comme étant extraordinaires après cette année pénible, qui a vu les maisons de ventes réduire leurs budgets et leurs équipes, tandis que la campagne américaine n’a pas facilité le travail de recherche d’œuvres à vendre », a expliqué Thomas Seydoux, expert en art impressionniste et moderne. « Certes, les volumes ne sont pas les mêmes que l’an passé. Nous sommes revenus aux vrais volumes de ce marché. En un an, le contexte a vraiment changé », a poursuivi l’expert. Il valait mieux que la bulle se dégonfle plutôt qu’elle n’éclate. « En revanche, si un pic de volume a été atteint l’année dernière, nous n’avons pas atteint un record de prix pour une œuvre. » Et au final, l’élection de Trump n’a eu que peu d’effets. Les ventes se sont déroulées sans trop de casse, avec d’importants records à la clé, ce qui est assez rassurant pour la suite.
Sotheby’s rate son estimation basse
Le 14 novembre, Sotheby’s a récolté 157,7 millions de dollars frais compris. Un score qui, au marteau, est en deçà de son estimation basse (145,8 millions de dollars hors frais). C’est également un produit de vente bien inférieur à celui de l’an passé qui s’élevait à 306,7 millions de dollars, soit une baisse de près de 50 %, sans compter la dispersion de la collection Taubman qui fait passer la baisse à 70 %. Mais compte tenu des réajustements en cours depuis le début de l’année, la maison de ventes enregistre une hausse de 9 % par rapport à sa vente du soir du mois de mai. Sur les 42 lots offerts, huit sont restés sur le carreau comme Femme en bleu à la table, fond rouge, 1923, de Matisse (est. 5 à 7 millions de dollars) ou Portrait de Guido Sommi, 1925, de Tamara de Lempicka (est. 4 à 6 millions de dollars). Heureusement, elle a vendu le tableau d’Edvard Munch, les Filles sur le pont, adjugé 54,5 millions de dollars, proche de son évaluation à « plus de 50 millions de dollars », sans dépasser toutefois la garantie très élevée donnée par un tiers, et bien loin derrière Le Cri, l’œuvre iconique du peintre norvégien vendue 119,9 millions de dollars en 2012. C’est tout de même une belle culbute pour le tableau qui avait déjà été vendu en 1996 7,7 millions de dollars, puis 30,8 millions en 2008. La vacation était assez inégale, puisque la plupart des autres œuvres sont restées dans la fourchette de leurs estimations, à l’instar du deuxième lot le plus chèrement adjugé, Le Peintre et son modèle, 1963, de Picasso, soit 12,9 millions de dollars (est. 12 à 18 millions).
Monet dope Christie’s
Christie’s s’en est mieux sortie. D’abord, elle avait davantage de lots, cinq de plus (au final, elle a le même taux d’invendus, soit 19 %) mais a surtout très bien négocié son lot star, Meule, 1891, de Monet : un des derniers tableaux de cette série emblématique encore en mains privées, qui a pulvérisé son estimation de 45 millions de dollars en atteignant 81,4 millions. Il s’agit d’un nouveau record pour l’artiste, le précédent était détenu par Le Bassin aux nymphéas, 1919, adjugé 80,3 millions chez Christie’s Londres en 2008. La maison de ventes a aussi cédé, dans la fourchette de leurs estimations, Rigide et courbé 1934, de Kandinsky (23,3 millions de dollars), un record pour l’artiste, et Buste de femme (Dora Maar), 1938, de Picasso (22,6 millions de dollars) acheté par le collectionneur japonais Yusaku Maezawa. En revanche, elle n’a pu céder un Paysage de Cézanne (est. 10 à 15 millions) et Tête de femme de Picasso (est. 9 à 12 millions), estimés trop chers. « Il faut baisser encore d’un cran les estimations tout en laissant un temps d’adaptation aux vendeurs », a indiqué Thomas Seydoux.
(1) Toutes les estimations sont indiquées hors frais acheteur, tandis que les résultats sont indiqués frais compris.
Total : 157,7 M $ (144,5 M €)
Estimation : 145,8 à 186,5 M $
Nombre de lots vendus : 34 sur 42 (81 %)
Christie’s, ventes d'art impressionniste et moderne, le 16 novembre
Total : 246,3 M $ (225,7 M €)
Estimation : 202 à 283 M $
Nombre de lots vendus : 39 sur 48 (81 %)
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Le marché atterrit doucement
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°468 du 25 novembre 2016, avec le titre suivant : Le marché atterrit doucement