Empêtrée dans une crise interne et économique, la foire de Madrid, qui s’est tenue du 19 au 21 février, a perdu de son énergie
MADRID - Qu’un même artiste, Eugenio Merino, défraie la chronique à l’ARCO pour la troisième année consécutive montre bien que quelque chose ne va pas dans la foire d’art contemporain de Madrid. Faute d’avoir grand-chose à se mettre sous la dent, les médias se raccrochent aux œuvres les plus simplistes et spectaculaires. Composée d’un musulman, d’un chrétien et d’un juif orthodoxe, la tour humaine de Merino a scandalisé l’ambassade d’Israël à Madrid et fait couler de l’encre. Beaucoup de bruit pour rien…
Les visiteurs qui, voilà quelques années, venaient à Madrid prendre le pouls de la création mondiale ne pouvaient que repartir déçus d’une foire proprette, rassurante, ponctuée de quelques coups de massue peu convaincants, comme la reconstitution de l’inscription « Arbeit macht frei » par Tania Bruguera chez Juana de Aizpuru (Madrid). Nonobstant l’absence d’une trentaine de galeries, les organisateurs ont conservé leurs trois espaces habituels alors que tout l’événement aurait pu se loger dans un hall et demi. Les allées anormalement larges renforçaient, de fait, le côté flottant de la manifestation. Malgré tout, le stand de Prometeo (Milan) sortait du lot, avec le travail performatif très engagé de la Guatémaltèque Regina José Galindon.
On remarquait tout autant l’esprit tentaculaire du Sud-africain Nicholas Hlobo, dont une pièce fut achetée chez Michael Stevenson (Le Cap) par le Museo Atlantico Arte Contemporanea, en construction dans les Açores. Il y avait matière à s’attarder devant l’exposition personnelle d’Aurélien Froment chez Motive (Amsterdam), ou sur le stand rigoureux de Grita Insam (Vienne) autour des questions de capitalisme et de modernité. Mais quelques bonnes surprises ne suffisent pas. La plateforme dédiée à Los Angeles s’est ainsi révélée très décevante. Les visiteurs y cherchaient en vain l’ébullition et l’audace caractéristiques de la scène californienne.
Un modèle à repenser
L’inquiétude a poussé les organisateurs à réduire d’une journée la durée de la foire. Bien leur en a pris car, après le vernissage, assez actif, les affaires furent plus distendues. Lors du preview, Espacio Minimo (Madrid) a cédé un dessin de Gamaliel Rodriguez à la Communauté de Murcie, tandis que son confrère Guillermo de Osma (Madrid) s’est délesté d’un grand dessin de Louis Marcoussis. De son côté, Thaddaeus Ropac (Paris, Salzbourg) s’est défait d’une sculpture de Tony Cragg.
En revanche, pour la galerie 1900-2000 (Paris), qui a vendu une pièce de Fahlström au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, à Madrid, le commerce fut moins trépidant que par le passé. Celui-ci n’est d’ailleurs pas le cœur du problème. Pour sortir de son provincialisme, la foire doit absolument faire son aggiornamento. « L’ARCO n’est plus à la mode, ce n’est plus le lieu pour l’Amérique latine ni pour les jeunes artistes. La direction de la foire n’est intéressée que par vendre des mètres carrés. L’ARCO doit repenser son modèle », nous a confié Manuel Borja Villel, directeur du Museo Reina Sofia. « Ils doivent venir en centre-ville et réduire la taille de l’événement », renchérissait une habituée du salon. À méditer…
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L’ARCO déçoit
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°320 du 5 mars 2010, avec le titre suivant : L’ARCO déçoit