Après une courte période de repli sur les valeurs sûres du marché de l’art international, les collectionneurs retrouvent le chemin des jeunes artistes, à commencer par celui des artistes américains.
L’appétit des collectionneurs pour les jeunes artistes n’a pas mis longtemps à se raviver. Alors qu’au pic de la crise, on ne jurait que par les valeurs sûres, l’engouement pour la chair fraîche reprend le dessus. Un engouement surtout perceptible pour les artistes américains. La galerie Bernard Ceysson a ainsi vendu en un tour de main les œuvres de Sadie Laska présentées jusqu’au 7 mai dans une exposition de groupe consacrée à des artistes américains et baptisée « Canada ». Cet intérêt est visible dans l’exposition « After images » organisée jusqu’au 28 août au Musée juif de Belgique à partir d’œuvres issues des collections belges. Qu’y voit-on ? Une scène new-yorkaise pointue, défendue à Paris par Sutton Lane, New Galerie ou Art: Concept et à New York par Miguel Abreu ou Elizabeth Dee.
Un clou chasse l’autre
La plupart de ces artistes s’adonnent à l’appropriation, au recyclage, voire à l’essorage d’images de notre société contemporaine. Kelley Walker compresse ainsi sur ordinateur plusieurs strates d’images puisées sur Internet ou dans les archives photographiques. En octobre dernier, un de ses triptyques a été adjugé au prix faramineux de 385 250 livres sterling chez Christie’s. De son côté, Josh Smith a décliné son nom, de façon évidente ou sous un camouflage de collages et de peintures, dans un style très adolescent. En 2003, Catherine Bastide avait cependant essuyé un bouillon en lui consacrant un solo show sur la foire Art Basel Miami. En 2008, une toile datée de 2007 a été adjugée pour 31 250 dollars chez Sotheby’s.
Dans un monde volatile où un clou chasse l’autre, ces artistes sont déjà talonnés par de plus jeunes pousses. Les œuvres de Michael DeLucia, négociées entre 8 000 et 16 000 euros, sont ainsi prises d’assaut par les collectionneurs. En décembre 2010 sur la foire Nada à Miami, la galerie Eleven Rivington a fait un carton en cédant notamment des pièces aux collectionneurs Don et Mera Rubell. En mars dernier, une toute jeune artiste polonaise de trente-trois ans, Anna Ostoya, a cédé en un jour à Stefania Bortolami les vingt-huit collages en papier mâché et feuille d’or réalisés le mois précédent. Une autre plasticienne de vingt-huit ans, Liz Glynn, a vendu comme des petits pains ses sculptures d’inspiration antique, négociées entre 2 000 et 2 500 dollars chez Paula Cooper.
La palme revient sans doute à Nick van Woert, dont la première exposition aux États-Unis a été soldée en deux jours chez Yvon Lambert. L’achat par les collectionneurs prescripteurs britanniques Poju et Anita Zabludowicz a fait boule de neige et plusieurs gros collectionneurs comme les Rubell et Steve Rosenblum ont suivi…
Success story
Autre coqueluche du moment, l’artiste Jacob Kassay, vingt-sept ans, fait fureur. Ses œuvres à la fois minimalistes et un brin décoratives séduisent aussi bien le collectionneur grec Dakis Joannou que la collection italienne Maramotti. En novembre dernier, une œuvre de 2009 a été adjugée pour 86 500 dollars chez Phillips. Au même moment, un autre tableau s’est envolé pour 94 000 dollars dans une vente de charité au bénéfice du centre d’art The Kitchen à New York. Or ses prix sur le premier marché sont de l’ordre de 12 000 dollars…
La success story de Matthew Day Jackson est la plus emblématique. En 2007, trois pièces de cet artiste, présentées alors dans une exposition de groupe à la galerie parisienne Michel Rein, s’échelonnaient entre 7 000 et 17 000 euros. Deux ans plus tard, le collectionneur François Pinault inaugurait la Pointe de la Douane à Venise avec plusieurs œuvres de cet artiste. Bingo ! En février 2010, le joaillier Laurence Graff s’acquitte de 601 250 livres sterling pour une pièce baptisée Bucky. L’estimation n’était pourtant que de 30 000 livres sterling. Le délire a toutefois ses limites : une autre version de Bucky a plafonné à 79 250 livres sterling en février dernier chez Christie’s. De même, une autre toile de Jacob Kassay s’est contentée de 23 750 dollars en mars dernier chez Phillips. La flambe ne va pas sans retours de flamme…
Ryan Trecartin
Cet artiste trentenaire qui aura une exposition cette année au musée d’Art moderne de la Ville de Paris a déjà rejoint la collection de la Fondation Louis Vuitton.
Nick van Woert
Malgré un CV encore léger, marqué par une résidence chez Anita et Poju Zabludowicz à Londres et une exposition solo en mars dernier chez Yvon Lambert à New York, cet artiste de trente-deux ans a d’emblée séduit les plus gros collectionneurs.
Michael DeLucia
Ce sculpteur de Brooklyn âgé de trente-trois ans fait fureur aussi bien à New York chez Eleven Rivington qu’à Paris chez Nathalie Obadia.
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La revanche des Young American Artists
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°635 du 1 mai 2011, avec le titre suivant : La revanche des Young American Artists