La maison de ventes de Fontainebleau disperse les pièces non entrées dans les collections publiques de la chambre de la femme de lettres.
Fontainebleau. Depuis vingt ans, à raison de trois fois par an, Osenat orchestre une vacation consacrée à l’Empire, l’une de ses spécialités. C’est d’ailleurs au cours de l’une d’elles, en 2014, qu’elle avait adjugé un bicorne de Napoléon Ier pour 1,8 million d’euros. Pour la prochaine vente, qui se tient le 4 décembre, c’est Juliette Récamier (1777-1849) et son goût avant-gardiste en matière de décor intérieur qui sont mis à l’honneur. La maison de ventes est en effet chargée de disperser ce qu’il reste de la chambre de la grande dame – qui garnissait son hôtel particulier rue du Mont-Blanc à Paris. Une partie de ce mobilier est déjà au Louvre depuis 1994, notamment le lit, les deux tables de chevet dont l’une formant jardinière ou encore le secrétaire à abattant.
Mariée à quinze ans au riche banquier d’origine lyonnaise Jacques Récamier, elle devient l’une des femmes les plus célèbres de son temps, louée pour sa beauté et son intelligence, représentée par les plus grands artistes de l’époque – Jacques-Louis David, Joseph Chinard, Jean-Honoré Fragonard, Antonio Canova… En 1798, les époux achètent l’hôtel particulier de Jacques Necker, 7, rue du Mont-Blanc à Paris. Ils confient le réaménagement de leur demeure à l’architecte Louis-Martin Berthault – élève de Charles Percier – qui en dessine aussi le mobilier. Connue notamment par l’aquarelle du peintre anglais Robert Smirke de 1802, la chambre devient rapidement un modèle de modernité et de raffinement, portant en germe tout le répertoire ornemental du style Empire. C’est là que Juliette Récamier tenait salon, recevant les plus beaux esprits de son temps. « Cet hôtel particulier, et notamment la chambre, était un peu la “carte de visite” de Madame Récamier, tel un “showroom”. Toutes les grandes dames de l’Empire, de Joséphine à Madame de Staël s’en sont inspirées », souligne Jean-Christophe Chataignier, directeur du département Souvenirs historiques chez Osenat. En 1808, l’hôtel est acquis par le banquier François-Dominique Mosselman qui rachète également une partie du mobilier qu’il contenait.
L’ensemble mis en vente – conservé jusqu’à présent par les descendants du banquier Mosselman – comprend une statue en marbre, Le Silence de Joseph Chinard (vers 1798). Le sculpteur lyonnais s’est inspiré ici de Thusnelda, une sculpture antique de l’époque Trajan découverte à Rome en 1541 et représentant une prisonnière barbare, longtemps conservée à la Villa Médicis et aujourd’hui placée sous la Loggia della Signoria à Florence. Elle est accompagnée de sa gaine, par Jacob Frères, vers 1798, en acajou, portant une inscription latine en lettres de bronze doré (« Elle protège les songes et les amours, complice de la couche »). L’ensemble, qui était placé à gauche du lit, est estimé entre 400 000 et 500 000 euros. Figure également au catalogue, la torchère ananas, vers 1798, d’après Charles Percier et Louis-Martin Berthault, en bois peint vert et doré, qui se tenait, cette fois-ci, à droite du lit (est. 60 000 à 80 000 €). S’ajoute un lit dit « en nacelle » en acajou, attribué à François Honoré Georges Jacob-Desmalter – proche de celui du Louvre – et provenant de l’hôtel Récamier (30 000 à 50 000 €).
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La chambre de Juliette Récamier aux enchères chez Osenat
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°600 du 2 décembre 2022, avec le titre suivant : La chambre de Juliette Récamier aux enchères chez Osenat