Invitation au voyage

En oubliant souvent qu’en 1839 le savant François Arago y divulguait l’invention historique de la photographie devant l’Académie des sciences. De quoi légitimer le lancement en novembre 2010 du festival Photo Saint-Germain-des-Prés par les galeries, les librairies spécialisées et les agences de presse voisines. Avec seize nouveaux exposants venus des secteurs de l’art primitif (Olivier Castellano), de l’art contemporain (Natalie Seroussi, Di Meo) et du design (Jousse Entreprise, Cat-Berro), la deuxième édition, consacrée au thème « Voyages et rêves », étoffe un parcours original décliné en quarante-huit lieux et six institutions du quartier. « Même si tous les participants ne sont pas spécialistes de la photo, ils la véhiculent comme une image faisant vivre le quartier », estime la galeriste Juliette Aittouares-Caillon, présidente de ce festival concomitant du Mois de la photo et du salon Paris Photo.

Dotée d’un budget avoisinant 45 000 euros abondés par les exposants, la mairie du 6e arrondissement et des partenaires tels que la banque HSBC ou Swiss Life, cette flânerie automnale vise à s’internationaliser. « Le temps du festival, moins éphémère qu’une foire, des galeries étrangères s’installent à Saint-Germain-des-Prés, un quartier touristique très fréquenté », notent les conseillers artistiques Guillaume Piens et Catherine Vauselle, deux transfuges du salon Paris Photo. Trois galeries européennes ont rallié ce parcours marchand qui gagnerait à s’adjoindre des enseignes photographiques germano-pratines de poids. Au « Tour du monde des années 1880-1900 » proposé par les photographes peu connus Léon et Lévy (agence Roger-Viollet) répondent ainsi les premières images de l’Inde (Roland Belgrave Vintage Photography, Londres). « La saga des voyages Apollo d’exploration de la Lune » apportée par la galerie munichoise Daniel Blau chez Meyer Oceanic Art renvoie à l’imaginaire dépouillé de « Death Valley » de Kishin Shinoyama (galerie Jousse Entreprise).

Du documentaire à l’ethnographie contemporaine, de l’onirisme aux interventions plasticiennes, le thème conventionnel du voyage traverse le « Voyage mexicain » de Bernard Plossu (librairie Mazarine), « Terre d’Afrique » de Catherine de Clippel (galerie Olivier Castellano), Dalí vu par Philippe Halsman (Magnum Gallery) ou les « Anachitectures » des années 1970 par Gordon Matta-Clark (galerie Natalie Seroussi). Méconnues, les microphotographies artistiques des années 1930 de Carl Strüwe (Galerie Le Minotaure) rencontrent la série « Darra » (« atome ») de l’artiste contemporain Youhnès Rahmoun (galerie Imane Farès). L’actualité est explorée à travers l’agora multiethnique en Asie vue par Françoise Huguier, lauréate du prix de l’Académie des beaux-arts-Marc Ladreit de Lacharrière, la crise humanitaire au Zimbabwe par Robin Hammond, prix Carmignac Gestion du photojournalisme (chapelle de l’École nationale supérieure des beaux-arts) ou « La famille incertaine » de Claudia Imbert, Prix Arcimboldo de création numérique (Alcazar).

Dès 2014, la Monnaie de Paris se muera en une plateforme culturelle dénommée « MetaLmorphoses », qui étendra l’envergure de la programmation.