La galerie Vazieux accueille une exposition de cet artiste qui explore les nombreuses possibilités expressives du portrait.
Paris. Sabine Vazieux a fait le pari de s’établir en 2018 rue du Louvre, dans un quartier où les galeries étaient plutôt rares – ce qui pourrait changer après l’arrivée de la Pinault Collection à la Bourse de commerce, non loin de là. Spécialisée à ses débuts dans l’abstraction d’après-guerre, avec un tropisme pour les artistes asiatiques, elle s’ouvre depuis peu à l’art contemporain, notamment avec Gaël Davrinche, peintre en milieu de carrière dont elle a toujours suivi le travail et qui manque d’une véritable reconnaissance. Elle lui consacre sa 3e exposition monographique, avec un parti pris thématique. « Faire face » couvre en effet une période de plusieurs années, entre 2005 et 2017, où Davrinche s’est confronté au portrait, motif classique qu’il a abordé de multiples manières, témoignant tout autant de sa parfaite maîtrise que de ses tentatives pour s’en affranchir.
On passe ainsi des toiles qualifiées par Olivier Kaeppelin, commissaire de ce solo show, de « précisionnistes », à des œuvres où le peintre fait, littéralement, exploser la figure. On observe toutefois une constante : Davrinche traite ses personnages avec une dérision qui peut aller jusqu’à l’acharnement, la couleur lui offrant alors une forme d’exutoire. Ainsi dans la série « Portrait et accessoire » prend-il pour prétexte un objet dont il affuble ses modèles, souvent des proches : une poupée à l’effigie de Mickey (L’Immanence révélée, 2016), un sac en plastique en guise de coiffe (Claire, 2016). Les références ne manquent pas : une parure de baudruches boudinées en clin d’œil à Jeff Koons, un fond emprunté à Rothko… Les sujets sont eux aussi très identifiables et les tableaux s’avèrent parfois, pour cette raison, difficiles à vendre. Le portrait n’est plus un motif de commande.
Gaël Davrinche décide alors de délaisser le réalisme, fût-il travesti par le grotesque, pour laisser davantage s’exprimer la peinture. « Je n’avais plus envie d’être dans la représentation », explique-t-il. Avec Inside [voir ill.], le visage disparaît sous une couche épaisse de vert, un masque badigeonné qui se prolonge en une sorte de bonnet d’âne, seul le regard, douloureux, se laissant apercevoir. Pour la série « Finger paintings », adoptant de plus petits formats, l’artiste applique directement les pigments avec ses doigts, à la recherche d’une innocence du geste. D’autres fois, il laisse à dessein les feuilles de papier traîner sur le sol de son atelier, jusqu’à ce qu’elles soient maculées de taches avec lesquelles il compose alors des études préparatoires, à la limite de l’abstraction. Le procédé culmine dans la série « Kalashnikov », où il essuie les traits du portraituré au point de le défigurer, dans une violence qui évoque, forcément, celle d’un Francis Bacon. Gaël Davrinche a d’ailleurs une prédilection pour la palette des roses, qui se teintent facilement de rouge ou d’orangé, peuvent tirer sur le bleuté, voire le violacé, se poudrer de gris jusqu’à paraître salis, et ont à voir avec la chair. Ce cycle terminé, il s’est tourné vers les fleurs, qu’il peint, souvent fanées, et qui lui offrent d’autres combinaisons de formes et de couleurs.
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Gaël Davrinche face au portrait
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°568 du 28 mai 2021, avec le titre suivant : Gaël Davrinche face au portrait