Les premiers achats destinés au futur Musée Guggenheim de Bilbao déclenchent une polémique, bien qu’il s’agisse d’œuvres d’artistes basques. Les galeries de la région ne bénéficient en effet d’aucune acquisition.
BILBAO. Les critiques de l’Association des galeries d’art contemporain d’Euskadi (AGACE) envers la politique d’acquisition du futur Musée Guggenheim de Bilbao se sont muées en une polémique opposant les galeristes basques à certains de leurs confrères madrilènes. Celles-ci ont débuté il y a quelques mois lorsque la conseillère pour la Culture du gouvernement basque a fait connaître les premières acquisitions du musée : Anselm Kiefer, Clyfford Still, Sigmar Polke, et les Basques Juan Luis Moraza, Txomin Badiola et Prudencio Irazabal. Darío Urzay réalise, quant à lui, une commande. Quand, sur les instances du conseiller artistique aux achats, Javier González de Durana, les responsables du Guggenheim de Bilbao se sont intéressés aux trois artistes basques, ils ont décidé d’acquérir des œuvres auprès des galeries Elba Benítez et Soledad Lorenzo, à Madrid, ainsi que chez Jack Shainman, à New York, ce qui a provoqué la colère de leurs confrères basques. La présidente de l’AGACE, Petra Pérez, rapporte qu’au cours d’une réunion, le directeur général du Guggenheim de Bilbao, Juan Ignacio Vidarte, a déclaré que Badiola, Irazabal et Moraza avaient eux-mêmes choisi les œuvres destinées au futur musée. Petra Pérez se montre convaincue que les responsables du Guggenheim auraient dû s’adresser aux galeries de Bilbao, "car nous sommes les professionnels du marché basque. Quand le gouvernement basque achète avec l’argent des Basques et que l’État espagnol ne donne pas une peseta, on pourrait au moins passer par les galeries basques", proteste-t-elle. Petra Pérez, qui est aussi directrice de la galerie Vanguardia de Bilbao, souligne qu’il s’agit bien plus d’une question d’image que d’un problème strictement économique, le budget consacré aux trois artistes n’ayant pas dépassé cinq millions de pesetas (200 000 francs), sur une première tranche d’acquisitions – comprenant Anselm Kiefer, Clyfford Still et Sigmar Polke – évaluée à 250 millions de pesetas (10 millions de francs).
Agressivité des galeries basques
Petra Pérez demande également que l’association qu’elle représente soit consultée lors du choix des œuvres qui seront accrochées aux cimaises du Guggenheim de Bilbao, et conclut ironiquement à propos du président de la Fondation Guggenheim, Thomas Krens : "Avec l’argent basque en poche, il est devenu l’homme le plus puissant du marché de l’art européen." De son côté, la directrice de la galerie madrilène Elba Benítez estime qu’"il est logique que l’on se soit adressé à (elle) pour acheter une œuvre de Moraza et d’Urzay puisque c’est (sa galerie) qui les représente". Les artistes ne comprennent pas non plus très bien l’agressivité des galeries basques. Depuis son domicile new-yorkais de Chinatown, Prudencio Irazabal déclare que "chaque artiste étant représenté par une galerie, c’est donc à elle d’accueillir non seulement les gens du Guggenheim mais quiconque désirant acquérir une de ses œuvres." Irazabal indique que ce n’est pas lui qui a choisi la pièce qui sera accrochée à Bilbao, mais les responsables des acquisitions du musée, et plus particulièrement Lisa Denison. De son côté, Juan Ignacio Vidarte se démarque de la controverse en soulignant que "le musée est intéressé par des œuvres d’art précises. Ce sont les artistes qui désignent la galerie qui les représente, ou bien celle où se trouve l’œuvre qui nous intéresse Le Musée Guggenheim de Bilbao serait ravi d’acheter auprès des galeries basques, mais il doit aller là où les œuvres sont en vente, comme le font tous les musées du monde". Et de conclure : "Ce n’est pas nous qui réglementons le marché, ce sont les artistes et les galeristes".
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À Bilbao, les galeristes montent au créneau…
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : À Bilbao, les galeristes montent au créneau…