Du 4 au 7 avril, la foire met en avant la scène régionale avec un parterre de galeries de plus en plus référencées.
D’année en année, la liste des exposants d’Art Paris s’affine en devenant plus sélective. Désormais bien installée dans le paysage, la foire bénéficie en effet du rayonnement de la place parisienne et reçoit toujours davantage de candidatures, ce qui lui permet de se montrer plus exigeante. Ce positionnement correspond aussi à une vision stratégique : c’est en étant qualitative qu’Art Paris peut défendre son attractivité auprès des collectionneurs français et étrangers. Elle annonce ainsi une liste de 136 galeries d’art moderne et contemporain issues de 25 pays, « triées sur le volet ». Parmi elles, près d’une quinzaine a aussi participé l’automne dernier à la foire de référence, Paris+ par Art Basel, label connu pour son élitisme. Fidèles d’Art Paris depuis les débuts, les marchands Nathalie Obadia et Daniel Templon reviennent ainsi régulièrement, tandis que la galerie Perrotin, qui a commencé à cautionner la manifestation en 2020, n’a pas cessé, depuis, d’être présente au cœur de la foire, où l’on trouvera également la Galleria Continua, Loevenbruck et Pietro Spartà. Parmi les nouvelles venues de premier plan sur cette édition, on peut mentionner Esther Schipper et Peter Kilchmann, deux galeries européennes implantées à Paris, ou encore Michel Rein (Paris, Bruxelles). Les galeries Poggi et Frank Elbaz reviennent quant à elles après plusieurs années d’absence.
Guillaume Piens, directeur artistique d’Art Paris, promeut le soutien à une nouvelle génération, à travers le secteur Promesses qui réunit neuf structures ayant moins de six ans d’existence, mais aussi avec des jeunes galeries comme Clavé Fine Art, Ketabi Bourdet, ou Le sentiment des choses dont les artistes céramistes entrent en résonance avec le parcours thématique Arts and Crafts. Reprenant le nom du mouvement né dans la deuxième moitié du XIXe siècle en Angleterre, ce parcours entend souligner le retour des savoir-faire artisanaux dans le champ de l’art : le commissaire indépendant Nicolas Trembley a distingué, sur les stands des exposants, une vingtaine d’artistes de toutes générations, tels que Karina Bisch (Lahumière), Sheila Hicks (galerie Claude Bernard) ou Jean-Marie Appriou (Perrotin). Enfin, cette édition 2024 met en avant une offre renouvelée du secteur moderne – un peu moins du quart des participants – dont les propositions s’avèrent plus variées que les années précédentes. La galerie Laurentin (Paris, Bruxelles) montrera par exemple des laques sur panneau de Jean Dewasne ; Boquet (Paris) exhumera des œuvres sur papier de Hans Bellmer et de Dora Maar, quand Cermak Eisenkraft (Prague) présentera des natures mortes du peintre cubiste tchécoslovaque Emil Filla (1882-1953). La montée en gamme de la foire n’est pas sans conséquence sur les prix affichés, qui ont également tendance à augmenter : l’année dernière, plusieurs pièces avaient trouvé des acquéreurs pour des montants autour de 600 000 euros. Un coup de cœur pour moins de 10 000 euros reste cependant envisageable. Et pour plus de 200 000 aussi, si affinités.
Gilles Barbier
Longtemps représenté par la galerie parisienne Georges-Philippe et Nathalie Vallois, Gilles Barbier (né en 1965) est désormais passé chez Huberty et Breyne. La galerie bruxelloise met en avant à travers un solo (peintures, dessins, sculptures…) cet artiste contemporain dont l’œuvre extraordinairement prolifique traite avec humour de sujets parfois graves. Empruntant volontiers à la culture populaire et traversées par la question du langage, ses œuvres sont présentes dans de nombreuses collections publiques et privées.
Huberty & Breyne, Bruxelles (Belgique).
Connu dans les années 1990 pour ses photographies dépouillées mettant en scène le corps masculin, Georges Tony Stoll (né en 1955) poursuit depuis plusieurs années une recherche picturale qui se traduit par des toiles abstraites et colorées composant de flamboyants rébus visuels. La Collection Lambert lui a consacré une exposition personnelle en 2022 et on a également vu son travail, présent dans plusieurs grandes collections, dans l’exposition collective « Exposé.es » au Palais de Tokyo en 2023.
Galerie Poggi, Paris.
Les notions de soin et de rituel sont centrales dans le travail de Myriam Minhidou (née en 1964), dont une installation occupe en ce moment la galerie Marc Ladreit de Lacharrière au Musée du quai Branly. Artiste pluridisciplinaire, la plasticienne a construit un corpus à partir de la photographie, de la vidéo, du dessin et de la sculpture, et incarne également le retour de la performance. Elle utilise parfois le fil (notamment de cuivre) pour écrire des mots dans différentes langues, invitant à un déchiffrement du sens.
Galerie Maïa Muller, Paris.
Aurélie Nemours (1910-2005) est considérée comme l’une des grandes figures de l’art abstrait géométrique. À côté de ses peintures aux bords nets d’une extrême précision, elle a aussi réalisé de nombreuses gouaches sur papier, rythmées, comme une partition musicale, par les formes et la couleur. Très identifiables et relativement rares, ses dessins sont prisés des collectionneurs et passent pour des valeurs sûres, leur cote ne cessant de progresser.
Galerie Laurentin, Paris et Bruxelles.
« Spectaculaire, ce tableau est très représentatif des préoccupations de Jean Hélion à la fin des années 1960, affirme Patrice Trigano. La ville était pour lui un songe ; ce qui s’y déroulait était à la fois marqué par la banalité du quotidien et par une étrangeté visible dans les scènes de rue représentées. » Le Musée d’art moderne de la Ville de Paris consacre au printemps une rétrospective à ce peintre du siècle dernier que l’on ne cesse de redécouvrir, notamment grâce à deux ou trois marchands parisiens qui exposent et documentent son œuvre.
Galerie Patrice Trigano, Paris.
Du Centre d’art Les Capucins (Embrun) qui lui a offert son premier solo en 2020, à la fondation Hermès, à Tokyo, en passant par le Moco de Montpellier qui l’a invitée en 2021 à une intervention sur son bâtiment, Io Burgard (née en 1987) a opéré ces cinq dernières années une percée remarquée. Ses sculptures en plâtre évoquent des formes primordiales et les mythes fondateurs qui nourrissent son travail. On verra plusieurs de ses œuvres sur le stand de la galerie She Bam !, exclusivement consacrée aux artistes femmes.
She BAM ! Laetitia Gorsy, Leipzig (Allemagne).
Principalement connu pour ses affiches lacérées et pour ses palissades, Raymond Hains (1926-2005) a également créé une emblématique série d’allumettes de grande taille dans une recherche conceptuelle sur l’objet, qui se réfère à la démarche pop de Claes Oldenburg. Les pochettes démesurées et les allumettes de Raymond Hains sont régulièrement exposées à partir du milieu des années 1960, notamment à Documenta de Cassel en 1968. Des variations interviennent, mais la série se poursuit jusqu’à ses dernières réalisations en 2005.
Verart Véronique Smagghe, Paris.
Sélectionné pour le parcours thématique Arts and Crafts de la foire, voici un grès brut d’une des grandes céramistes du XXe siècle. Jacqueline Lerat (1920-2009) se disait peu intéressée par la pratique des émaux, considérant que la partie technique intervenait avant la création. « Le point de départ de la pièce est comme la première phrase d’un roman », écrivait-elle, alors émancipée de l’usage pour aller vers une production sculpturale, que l’on peut voir aujourd’hui dans des collections publiques du Musée national de Kyoto au Victoria & Albert Museum, à Londres.
Galerie Capazza, Nançay (Cher).
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Art Paris plus sélective
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°774 du 1 avril 2024, avec le titre suivant : Art Paris plus sélective
