Indonésie - Foire & Salon

FOIRE D’ART CONTEMPORAIN

Art Jakarta témoigne du développement de l’Indonésie

L’édition 2024 de la principale foire du pays a reflété la prédominance des artistes indonésiens sur le marché en Asie du Sud-Est.

Jakarta (Indonésie). Réunissant 73 galeries du 3 au 6 octobre 2024 dans une version étoffée par rapport à 2023, la foire, qui s’est tenue au centre d’exposition Jiexpo Kemayoran, au nord de la capitale, a affiché une indéniable vitalité. Avec une croissance économique de 5 % en 2023 et des chiffres pour 2024 confirmant a minima le même score, le pays est devenu une puissance régionale incontestable. L’île de Java contribue à hauteur de 58 % environ au PIB [lequel pèse 40 % de celui de la France, ndlr], un taux proportionnel à son poids démographique dans ce pays de 270 millions d’habitants. À l’image des secteurs de l’industrie et le bâtiment, ainsi que de la consommation des ménages, le marché de l’art suit une trajectoire résolument ascendante, malgré un ralentissement mondial.

Développement d’un écosystème régional

Opportunément calée à l’avant-veille du vernissage de la Biennale de Jakarta (1er oct.-15 nov. 2024), Art Jakarta joue la complémentarité avec un combo foire-biennale, un modèle commun à d’autres pays, dont la Corée du Sud en septembre dernier. Alors que la foire se concentre sur les valeurs sûres du marché, la peinture en particulier, la biennale, financée par les autorités indonésiennes, expose principalement des installations expérimentales de collectifs d’artistes, très nombreux dans le pays. Les deux événements mettent en avant la création contemporaine indonésienne et asiatique, mais on ne constate quasiment aucun artiste commun.

Les exposants de retour à la foire saluent les progrès accomplis en matière de direction artistique, plus cohérente au fil des stands, sous la houlette du commissaire Enin Supriyanto. Avec plus de 38 000 visiteurs, un chiffre en augmentation par rapport à 2023, les visiteurs furent également au rendez-vous, stimulés par l’opération de séduction de la foire auprès de 300 nouveaux collectionneurs invités. Malaisiens et singapouriens pour moitié, les principaux collectionneurs étaient ensuite, par ordre d’importance, coréens, taïwanais, japonais et chinois, selon Tom Tandio, directeur d’Art Jakarta, dont l’ambition est de développer la stature régionale de la foire au-delà des acteurs nationaux.

Cette intégration se reflète déjà au niveau de l’écosystème local. La galerie Baik Art (Séoul, Los Angeles), par exemple, dispose depuis 2022 d’un espace à Jakarta, où elle expose actuellement les œuvres de neuf artistes indonésiennes dans un groupe show intitulé « Nonalog ». Attachée culturelle à l’ambassade de France à Jakarta, Charlotte Esnou confirme par ailleurs le développement exponentiel des galeries dans la ville depuis sa prise de poste en 2021. De son côté, le Français Fabien Massicot, fondateur de la galerie Art Works Paris Seoul (Séoul), était sur place pour anticiper une éventuelle participation en 2025.

Un marché d’entrée et de milieu de gamme

Côté ventes, les œuvres d’artistes indonésiens arrivent systématiquement en tête en volume et en prix. La galerie Gajah (Singapour, Jakarta, Yogyakarta) a ainsi vendu une grande toile et une sculpture en bronze peint de Yunizar (né en 1971) pour respectivement 46 000 et 55 000 euros, ainsi qu’une peinture de I Gusti Ayu Kadek Murniasih (1966-2006), artiste dont elle représente la succession, et deux toiles abstraites d’Ibrahim (né en 1975).

Présente sur la foire depuis 2019, Sullivan + Strumpf (Sydney, Melbourne, Singapour) s’est séparée d’une série de 15 toiles de petit format d’Enggar Rhomadioni (né en 1992) et de trois œuvres d’Irfan Hendrian (né en 1987), à des prix compris entre 1 000 euros et 14 000 euros. Art Agenda (Jakarta, Singapour) a vendu deux huiles sur toile datant de 1959 et 1961 de Gerard Pieter Adolfs (1898-1968) pour 12 000 euros pièce. Sur le stand de D Gallerie (Jakarta), une toile abstraite de Nunung WS (née en 1948) a trouvé preneur pour environ 5 000 euros. La très jeune galerie Sewu Satu (Jakarta) a vendu quant à elle des toiles de Ketut Nugi (né en 1996) et de Prakadetto Alansa (né en 2002), dans une gamme de prix inférieure à 5 000 euros. Comme on le voit, les prix restent très inférieurs à ceux des grandes foires.

Un commentaire entendu fréquemment souligne la dynamique des marchés d’entrée et de milieu de gamme, stimulés par l’arrivée de jeunes collectionneurs. À environ 6 000 euros la location du plus petit stand, la foire reste très abordable malgré les frais de transport et de logistique. Les droits de douane s’élèvent généralement à 15 % pour la peinture et la sculpture. Fixés en fonction des matériaux qui composent les objets importés, ils montent à 20 % pour les créations en céramique. La TVA, actuellement de 11 %, devrait passer à 12 % en 2025.

Avant la prochaine édition en octobre 2025, Art Jakarta Garden, foire sœur située en plein air et centrée sur la sculpture, reviendra au printemps prochain pour la quatrième année consécutive avec une vingtaine de galeries.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°641 du 18 octobre 2024, avec le titre suivant : Art Jakarta témoigne du développement de l’Indonésie

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