Foire & Salon

Anne Vierstraete : « Avec Art Antwerp, le marché va devoir parler »

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 16 décembre 2021 - 1279 mots

ANVERS / BELGIQUE

La première édition de la foire anversoise d’art contemporain se tient du 16 au 19 décembre, confirme sa directrice.

Anne Vierstraete, directrice d'Art Brussels et d’Art Antwerp. © Art Brussels, 2019
Anne Vierstraete, directrice d'Art Brussels et d’Art Antwerp.
© Art Brussels, 2019

Tandis que plusieurs foires, à l’instar de la Brafa et de la Foire du livre de Bruxelles, ont annulé ou reporté leur prochaine édition en Belgique, Art Antwerp maintient sa première édition du 16 au 19 décembre 2021 à Anvers, assurant à ses exposants et ses visiteurs de garantir « les conditions les plus sûres de visite ». Entretien avec Anne Vierstraete, directrice générale d’Art Brussels et d’Art Antwerp.

Art Brussels, qui appartient au groupe Easyfairs, inaugure un nouveau salon, plus petit, d’art contemporain à Anvers : Art Antwerp. Pourquoi ?

L’idée d’Art Antwerp est née en septembre 2020, en réponse au contexte sanitaire. Toutes les foires internationales étaient alors dans l’impossibilité d’ouvrir. Pourtant, nous constations une véritable envie de se retrouver de la part des collectionneurs et des galeristes. Nous nous sommes dit : « Pourquoi ne pas tenter l’expérience d’une foire d’art organisée à une échelle régionale et néanmoins internationale ? » Le marché a répondu avec enthousiasme à ce projet. Pour limiter notre risque, nous avons décidé de l’organiser dans un lieu géré par Easyfairs et de privilégier un fort ancrage belge, tout en ouvrant la foire aux galeries des pays frontaliers (France, Pays-Bas, Luxembourg et Allemagne). En trois semaines, nous avons bouclé la liste des participants avec la ferme intention d’ouvrir Art Antwerp en décembre 2020. Malheureusement, le gouvernement belge avait, entre-temps, décrété le confinement national. Mais face à l’enthousiasme des galeries, nous avons décidé de la reporter à cette année. 

Anvers et Bruxelles sont distantes d’une cinquantaine de kilomètres seulement. Art Antwerp ne risque-t-elle pas de concurrencer Art Brussels ?

Nombre de galeries, notamment allemandes, qui ne participaient pas à Art Brussels, en raison de sa proximité dans le temps avec Art Cologne et le Gallery Weekend Berlin, par exemple, sont présentes à cette première édition d’Art Antwerp. Il n’y a pas de concurrence à ce stade. Art Brussels se tiendra en avril 2022 en grande partie avec les engagements que nous avions pris en 2020 auprès des galeries [en raison du Covid, Art Brussels a été annulée en 2020 et 2021, ndlr], et les derniers comités de sélection d’Art Brussels, destinés à compléter la liste des galeries participantes par rapport à des annulations qui sont entre-temps intervenues, ont été bouclés en novembre. Art Brussels est une foire plus grande et plus internationale, riche d’un historique qui remonte à 1968.

Le développement régional est-il une réponse aux stratégies d’expansion de foires concurrentes comme Art Basel ?

C’est l’expérience de la première édition qui nous confirmera si, oui ou non, Art Antwerp doit s’inscrire dans la durée. Et si elle peut exister à côté d’Art Brussels. Tout est là pour pérenniser l’événement, mais nous jugerons de la pertinence de son maintien après, et nous ferons évoluer sa formule si nécessaire. De fait, le format réduit d’Art Antwerp dans un lieu géré par Antwerp Expo nous permet d’être flexible. Par ailleurs, nous allons également observer comment le monde dans sa globalité répond aux défis qui se posent aujourd’hui : l’empreinte carbone du marché de l’art, le comportement des collectionneurs face à la mobilité, sans oublier la pandémie qui n’est toujours pas vaincue. 

Qu’est-ce qui différencie Art Brussels d’Art Antwerp ?

Pour participer à Art Brussels, les galeries répondent à un processus de sélection. Art Antwerp est, elle, une foire sur invitation. Nous avons pour cela monté un comité d’invitation composé de trois galeries belges issues du comité de sélection d’Art Brussels : Zeno X Gallery (Anvers), Rodolphe Janssen (Bruxelles) et « dépendance » (Bruxelles). Ces trois galeries, sérieuses et respectées, connaissent bien le marché belge et opèrent à une échelle internationale. En concertation avec la direction d’Art Brussels, c’est-à-dire Nele Verhaeren et moi-même, une liste de galeries à approcher a été constituée et les invitations ont été lancées. Dès qu’une réponse positive nous parvenait, la galerie était assurée de sa participation.

Art Antwerp répond aux attentes des amateurs d’art, et notamment aux attentes des collectionneurs belges, à savoir de la qualité avant tout, mais aussi de l’audace, de la diversité, des découvertes… Il n’y a ainsi pas que des galeries établies, mais aussi des jeunes galeries présentant des artistes émergents. Toutes sont mélangées sans la sectorisation habituelle, dans un esprit qui cadre avec l’esprit d’Anvers !

Quel est cet « esprit d’Anvers » ?

Bruxelles et Anvers sont certes géographiquement proches, mais leur régime linguistique est différent, comme leurs vibrations. Anvers est une ville portuaire, très avant-gardiste en termes de mode, de gastronomie… Son public y est souvent jeune et très habitué des galeries. Par ailleurs, il n’est pas du tout acquis que le public anversois vienne à Art Brussels, et vice versa. Il est donc très intéressant d’établir un pont entre les deux villes, d’inciter les amateurs d’art à aller voir plus loin, au-delà des limites de leur ville. Notre objectif est bien sûr aussi de faire connaître Art Antwerp aux collectionneurs du Nord de l’Europe afin qu’ils viennent ensuite nous voir à Bruxelles en avril, et inversement. Les deux foires ont beaucoup de potentiel.

Combien de galeries sont-elles invitées ?

Art Antwerp compte 59 galeries, contre 160 galeries environ pour Art Brussels. Le format est dès lors plus intime à Anvers.

Une foire – et donc des frais supplémentaires – dans le calendrier des galeries et des collectionneurs : le pari n’est-il pas risqué ?

Le marché va devoir parler. Nombre de galeries ont décidé de ne plus faire toutes les foires mais d’être plus sélectives dans leurs choix. Parmi celles-ci, beaucoup décident, ces derniers temps, de travailler davantage avec les collectionneurs proches. Par ailleurs, la version Art Brussels online organisée en avril en collaboration avec Artsy, nous a montré que des galeries avaient gagné de nouveaux collectionneurs belges, français, allemands, etc. et qu’il y avait donc du potentiel pour étendre notre réseau de proximité. Nous souhaitons davantage jouer la carte de notre identité afin de nous démarquer face à des foires comme Art Basel ou la Fiac.

Quelle est la situation d’Art Brussels, annulée deux fois consécutivement, et celle du groupe Easyfairs auquel elle appartient ?

S’il y a une chose qui caractérise le groupe Easyfairs, c’est son esprit entrepreneurial à travers toutes les crises. Le groupe a les reins solides. Il a été fondé il y a plus de vingt ans autour d’Art Brussels, une foire qu’il a ensuite annualisée et internationalisée. Depuis, le groupe s’est diversifié et est devenu un opérateur international de foires et de salons professionnels très implanté en Europe (dans les secteurs du packaging, du soin et de la santé, de la restauration, etc.). Jusqu’à Art Antwerp, Art Brussels est restée la seule foire d’art du groupe, et le président fondateur d’Easyfairs, Éric Everard, y est très attaché. S’il y a eu quelques rares restructurations pendant la pandémie, comme par exemple en Suède, le management du groupe a profité de la crise du Covid-19 pour réfléchir à de nouvelles idées, aux opportunités à saisir, en bref, assurer sa capacité à rebondir… Art Antwerp est l’un des nouveaux projets nés de cette réflexion, mais il y en a une vingtaine d’autres, comme par exemple une nouvelle foire dans la sphère digitale qui sera inaugurée en mars à Namur. La dynamique est enclenchée et elle est prometteuse.
 

Easyfairs

Le groupe auquel appartient Art Brussels lance Art Antwerp, sa 2e foire d’art parmi 200 événements organisés dans 14 pays.


59

C’est le nombre de galeries invitées à participer à Art Antwerp du 16 au 19 décembre 2021, dont 7 galeries françaises (Lelong, Templon, etc.).


« Nous remarquons qu’il y a un besoin croissant de rencontres “face-to-face” dans les milieux de l’art et Art Antwerp propose le format idéal tout en garantissant une sécurité maximale. » Nele Verhaeren, Lesoir.be, 28/10/2021

Thématiques

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°749 du 1 décembre 2021, avec le titre suivant : Art Antwerp répond aux attentes des amateurs d’art

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque