La maison de ventes Millon a réalisé 41,9 millions d’euros de produit de ventes en 2017. Le commissaire-priseur Alexandre Millon, à sa tête, explique les raisons de son succès et sa stratégie payante.
Vous êtes 5e dans le classement des maisons de ventes françaises en 2017. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
S’il y avait un rang, plus structurel que ponctuel à retenir depuis quinze ans, ce serait le 4e, et, de fait, la première place des indépendants. Ce n’est pas une mince affaire de le rester lorsque l’on voit les bombardements publicitaires des grands groupes. C’est ainsi. Ils ont le pétrole, à nous d’avoir les idées.
Aujourd'hui, avec une équipe de plus de 50 personnes, sept marteaux répartis sur tout le territoire français, belge et suisse, et six salles de ventes régulières, nous avons pu réaliser 160 ventes en près de 60 000 lots. Une sorte de record européen.
Depuis huit ans, une réelle volonté de développement de l’entreprise est engagée à travers plusieurs investissements significatifs. Le pari était osé mais aujourd'hui ceux-ci portent leurs fruits et nous positionnent économiquement depuis quatre ans au-delà des 40 millions d’euros de produit adjugé frais compris. Il faut toutefois avoir conscience que ce genre de chiffre ne signifie rien si vous ne le mettez pas en perspective avec, par exemple, le véritable chiffre d’affaires que sont les honoraires acheteurs et vendeurs perçus, lequel chiffre donne une meilleure indication de la santé d’une maison de ventes.
Quels sont vos points forts ?
Ils tiennent en quelques certitudes : la recherche permanente de proximité avec notre clientèle, la réactivité – en réduisant tous les délais de la chaîne de mise en vente – et la variété et fréquence des spécialités. Le tout en se donnant plusieurs credo. D'abord, nous nous associons à l’indépendance de nos experts pour garantir une double compétence. C’est ainsi que nous pensons animer aujourd'hui le plus grand réseau d’expertise d’Europe, soit 35 experts en tout et plus de 25 spécialités qui produisent autant de catalogues chaque saison. Ensuite, nous ne laissons jamais un client sur le bord de la route en lui prenant le meilleur et en rejetant le moins bon. Enfin nous souhaitons conquérir notre autonomie en maîtrisant la chaîne des métiers qui composent le nôtre (du graphisme au stockage et transport avec Artsitting). L’acquisition de notre propre garde-meuble de 4 000 m2 en 2011 a permis de libérer les énergies et les idées de manière spectaculaire. La physionomie de nos ventes s’adapte désormais facilement aux caprices du marché. Par exemple, notre département phare est la « création moderne et contemporaine », qui englobe six départements et représente 33 % de notre produit de vente. Le XXe siècle est davantage collectionné aujourd'hui que les « siècles classiques » (19 % chez nous), dont la valeur du lot moyen a mondialement chuté. Ce n’est un secret pour personne mais il est hors de question de ne pas relever le défi de ces ventes qui sont un pur concentré du génie français.
Quelles sont vos orientations stratégiques ?
Ma stratégie principale est de miser sur les femmes et les hommes, leur détermination et leur compétence. Celles et ceux qui dirigent aujourd'hui chaque entreprise du groupe sont tout à fait formidables. C’est aussi une fierté que de pouvoir former en interne de véritables professionnels. Grâce à cela, depuis cinq ans, nous menons un important déploiement en régions et pays limitrophes avec bureaux et/ou salles de ventes, comme à Nice avec Millon Riviera, Millon Swiss, Millon Sud-Ouest (Limoges, Bordeaux, Toulouse), mais aussi à Tours ainsi qu’à Nancy, Troyes ou encore au Touquet où nous avons un partenariat avec Me Henri Anton. Il y a l’Italie et Millon Deutschland qui se voient confier régulièrement de beaux dossiers. Nous pensons à Lyon, à Nantes aussi.
Quels sont vos axes de travail ?
Mes axes de travail sont principalement le judiciaire, les successions ; nous voulons aussi harmoniser déploiement physique et digital.
Où en êtes-vous de ce développement numérique ?
J’ai créé il y a sept ans avec deux confrères la SVV « Artprecium » (axé sur les arts plastiques), entièrement consacrée aux enchères dématérialisées. Rapidement sont nés « Asium » pour les arts d’Asie, et « Apolium » pour les instruments de musique. Le succès fut immédiat et constant. En 2018, ces trois plateformes deviendront « Millon Online ». Le siège sera situé au 17, rue de la Grange-Batelière (Paris-9e) où seront exposées physiquement les œuvres avant d’être vendues en ligne.
C’est l’un des défis du commissaire-priseur de demain. Ne pas oublier que son devoir de service public, qui offre garantie et transparence au marché, ne peut se diluer entièrement dans une mode virtuelle. Pour moi, digital et physique sont les deux membres d’un même corps commercial.
Quels sont vos autres projets pour 2018 ?
La mise en place d’un grand département « civilisations » me tient à cœur. Nos huit experts sont tous remarquables et chaque catalogue (à chaque saison) est l’occasion d’un vrai voyage dans le temps et l’espace. Ce département comprend les arts premiers, aborigènes, asiatiques, l’art précolombien, l’archéologie, l’orientalisme et depuis quelques mois l’art russe. Pas moins de huit clercs spécialisés se dévoueront à la réussite de ce projet.
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Alexandre Millon : « Je souhaite harmoniser déploiement physique et digital »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°495 du 16 février 2018, avec le titre suivant : Alexandre Millon, commissaire-priseur : « Je souhaite harmoniser déploiement physique et digital »