À la Biennale de Venise, la majorité des pavillons nationaux dépendent de financements privés, plus ou moins généreux selon les pays.
Un pavillon national à la Biennale de Venise s’apparente à une miniproduction cinématographique, dont le nerf de la guerre reste le financement. Et, en temps de crise, l’humeur n’est pas toujours à la dépense. Ainsi, nonobstant la qualité des artistes, les pavillons britannique, gallois et écossais jouent-ils profil bas cette année. Le volet « arts plastiques » du British Council ayant connu une coupe budgétaire de 50 %, l’institution anglaise n’a pu apporter que 300 000 livres sterling, dont 80 000 livres sterling d’entretien annuel du bâtiment. L’apport privé permet au budget de grimper péniblement jusqu’à 400 000 livres sterling (environ 462 000 euros). Bien loin des 893 000 euros du pavillon français mené par Christian Boltanski.
Depuis 2003, l’aide publique de CulturesFrance, rebaptisé Institut français, a été plutôt constante, de l’ordre de 400 000 euros. Mais la levée de fonds privés reste une autre paire de manche. Le pavillon de Claude Lévêque, en 2009, a ainsi pâti de l’absence de mécénat, en berne depuis la crise. Le groupe LVMH qui avait soutenu plusieurs pavillons hexagonaux s’est retiré, tout comme Chanel, qui avait contribué à celui de Sophie Calle en 2007. Cette année, la marque Citroën prend le relais avec un apport de 370 000 euros.
Les États en retrait
Chaque pays mène sa propre cuisine interne. Ainsi le pavillon belge, orchestré en 2011 par l’artiste Angel Vergara, est-il financé par l’administration générale de la culture de la Communauté française de Belgique, qui apporte 350 000 euros, et l’administration publique Wallonie-Bruxelles International à hauteur de 150 000 euros. Étrangement, le sponsoring est plutôt minoritaire (10 000 euros) et relève du mécénat de compétence. De même, l’ardoise du pavillon d’Azerbaïdjan, chiffrée autour de 800 000 euros, est réglée principalement par le ministère de la Culture et du Tourisme du pays, ce qui a autorisé le gouvernement à censurer une œuvre d’Aidan Salakhova… Un tel schéma est bien sûr de plus en plus minoritaire. Bien que les pavillons soient qualifiés de nationaux, les États ne sont pas les principaux bâilleurs. Le ministère de la Culture russe n’apporte que 250 000 euros dans un budget de 800 000 euros, pris en charge principalement par Mercury Group, dont le président, Igor Kesaev, est l’époux de la commissaire du pavillon, Stella Kesaeva… L’Australia Council for the Arts, qui possède et gère le pavillon australien offert en 1988 par l’architecte Philip Cox et représenté cette année par l’artiste Hany Armanious, finance environ un tiers du budget global estimé à 1,121 million d’euros. Les deux tiers restant proviennent du privé. Les États-Unis sont tout aussi tributaires des sponsors. En 2005, faute d’avoir levé assez de fonds, le pavillon américain a même failli ne pas ouvrir. En 2011, Hugo Boss s’affiche en principal soutien du pavillon orchestré par Allora & Calzadilla. La marque en est à sa cinquième contribution, après avoir aidé l’Allemagne en 2009.
Les galeries à la rescousse
Si la France ne fait pas appel aux galeries pour la production des œuvres, ces dernières étant souvent chargées de la communication, d’autres pays les mettent à contribution. D’un coût proche de 100 000 euros, l’œuvre de Markus Schinwald, sur le pavillon autrichien, est financée par les galeries Gió Marconi (Milan), Georg Kargl (Vienne) et Yvon Lambert (Paris). De même, l’installation de Sigalit Landau sur le pavillon israélien a été produite grâce au concours du galeriste parisien Kamel Mennour, de l’artiste elle-même, et de fonds privés, l’État israélien ne prenant à sa charge que l’entretien et le fonctionnement du bâtiment.
La donne change aussi selon qu’on possède ou qu’on loue un pavillon. La France, qui dispose d’un bail emphytéotique signé avec la Ville de Venise en échange de l’entretien du bâtiment, dépense 146 000 euros par an à cet effet. Aussi bien l’Institut français que le British Council, à Londres, disposent d’une structure impliquée toute l’année dans les biennales d’art et d’architecture. Mais les nouvelles représentations nationales doivent souvent constituer des équipes pour l’occasion et, faute de place dans les Giardini, louer un espace en ville. L’Inde ou la Chine ont loué des emplacements dans l’Arsenal, pour un coût d’environ 60 000 euros. D’après les spécialistes, il est difficile de prévoir moins de 600 000 euros pour un pavillon à l’Arsenal. De quoi refréner certains pays ! Le Liban s’est ainsi porté pâle cette année. En revanche, l’Arabie Saoudite fait son entrée avec un projet financé à 50 % par la compagnie pétrolière semi-publique Saudi Aramco et à 50 % par le ministère de la Culture. La présence cette année de nouveaux venus, comme l’Irak, le Zimbabwe, le Bengladesh, Haïti ou Andorre, montre pourtant que Venise reste un enjeu important pour les petites et grandes nations.
TELECHARGER LE PLAN DE LA BIENNALE :
Le plan des manifestations de la 54e Biennale de Venise : Télécharger (PDF - 2 Mo)
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Un budget tributaire des sponsors
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°349 du 10 juin 2011, avec le titre suivant : Un budget tributaire des sponsors