À la veille du Jubilé, deux musées romains ont rouvert leurs portes après des travaux plus ou moins longs. La Pinacothèque capitoline, d’un côté, la Galerie nationale d’art moderne, de l’autre, ont ainsi rénové des salles un peu désuètes, offrant à leurs collections exceptionnelles un écrin mieux agencé.
Une fois n’est pas coutume, il n’a fallu qu’un peu plus de huit mois à la Pinacothèque capitoline pour restructurer, mettre aux normes les salles d’exposition, et restaurer quelques œuvres dont le célèbre Enterrement de sainte Pétronille du Guerchin. Situé dans le palais des Conservateurs, le musée romain a accompli cette nécessaire modernisation en vue d’augmenter l’espace réservé aux œuvres, sans pour autant altérer le volume et les caractéristiques architecturales des anciennes pièces, comme l’explique la directrice Maria Elisa Tittoni. Concernant “l’enveloppe” architecturale, les parois ont été enduites à la chaux éteinte, généralement de couleur verte, à l’exception des salles “Sainte Pétronille” et “Pierre de Cortone”, “couleur de l’air”. Le sol en parquet de Slavonie, après avoir été mis aux normes, a retrouvé ses couleurs et son brillant d’origine. La lumière du jour entre par les lucarnes restaurées et intégrées dans une installation électrique réglée par des capteurs photosensibles. De nombreuses œuvres ont été sorties des réserves et des bureaux. Dans l’ensemble, la disposition des collections, souligne Maria Elisa Tittoni, a été rendue “plus naturelle et homogène entre les artistes, les écoles et les évolutions historiques artistiques consécutives”. Le parcours de l’exposition suit toujours un ordre chronologique, du XIVe au XVIIe siècle, et les salles thématiques ont été conservées : la “salle Guido Reni”, rouverte après quinze ans, passe en revue toute l’école d’Émilie-Romagne, et la salle maintenant appelée “Pierre de Cortone”, avec ses disciples, remplace la “salle d’Hercule”. Le prochain déplacement de l’Hercule sous la coupole en verre du Jardin romain dessinée par Carlo Aymonino, où le Marc-Aurèle trouvera également refuge, justifie ce changement d’appellation. Au cœur de la collection du XVIIe siècle, dans la “salle Sainte Pétronille”, la gigantesque pala (7,20 x 4,30 m) du Guerchin apparaît désormais comme suspendue. Une “salle des Portraits” (Vélasquez, Van Dyck…) a par ailleurs été créée. Enfin, au centre de la Galerie Cini, les porcelaines sont présentés dans de nouvelles vitrines alliant palissandre et métal.
Après quatre ans de travaux, la Galerie nationale d’art moderne (GNAM) a achevé sa mue avec le réaménagement de la section 1911-1950, située dans la partie nord-est du bâtiment. Le 19 décembre ont également été inaugurés le Musée Hendrik Christian Andersen et trois expositions consacrées respectivement à Giuseppe Capogrossi, Vincent Van Gogh et Gustav Vigeland. Le parcours de la GNAM débute avec les œuvres italiennes et étrangères réalisées pour l’Exposition internationale de Rome, en 1911, et les premières éditions de la Biennale de Venise, comme Les Trois âges (1905), la grande toile de Gustav Klimt. Le parcours se poursuit sans surprise, des toiles divisionnistes de Balla et des portraits de Boldini aux avant-gardes historiques : Cubisme avec la Nature morte avec clarinette, éventail et grappe de raisins (1911) de Braque, Abstraction avec Kandinsky et Moholy-Nagy, Dadaïsme et Surréalisme représentés grâce à la récente donation Schwarz. Mais c’est surtout les mouvements italiens qui font la force de la collection : le Futurisme de Balla, Boccioni, Russolo, Severini ; la peinture métaphysique de Giorgio De Chirico et l’expérience de la revue Valori Plastici avec Morandi, Carrà et Martini. Après avoir envisagé diverses facettes du XXe siècle, de l’Expressionnisme au “Tonalisme”, du second Futurisme à l’Abstraction, le parcours s’achève avec l’après-guerre et la figure centrale de Guttuso, qui, à la suite de sa Crucifixion (1940-1941), lance le violent débat entre les néo-réalistes, dont il est le chef de file, et les tenants de l’Abstraction. En juin, cinq nouvelles salles présentant l’art des années cinquante et soixante avaient déjà ouvert au public.
Dépendant depuis l’origine de la GNAM, le Musée Hendrik Christian Andersen est consacré au sculpteur d’origine norvégienne qui vécut à Rome de 1896 à sa mort, en 1940. Il a légué à l’État italien une collection de 200 plâtres et bronzes (dont quarante de grandes dimensions), une trentaine de peintures, ainsi que 350 œuvres graphiques installées dans sa maison-atelier. Le réaménagement, financé par les fonds 1998 de la Loterie, a permis l’ouverture du rez-de-chaussée, comprenant la galerie et l’atelier, et du premier étage où l’artiste vivait. D’autres financements devraient permettre, dans les deux prochaines années, de restaurer les deux étages supérieurs ainsi que les espaces extérieurs. Pour marquer l’inauguration, “L’Éros dans l’art de Vigeland” présente quarante petites sculptures accompagnées de dessins de cet artiste norvégien, contemporain d’Andersen.
En parallèle à la réouverture des deux musées, deux autres expositions complètent ce programme de réouverture, jusqu’au 19 mars : la principale, “Capogrossi : les signes du XXe siècle” rassemble 90 œuvres, des huiles et des dessins, tandis qu’une exposition-dossier sur Van Gogh interroge “Les portraits de Saint-Rémy”, autour de deux œuvres du musée, L’Arlésienne et Le Jardinier, et de trois peintures prêtées par des musées américains.
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La mue des musées romains
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°96 du 7 janvier 2000, avec le titre suivant : La mue des musées romains