L’édition 2016 de la foire d’art contemporain libanaise est montée d’un cran en se limitant à la scène moyen-orientale. Elle y a gagné en densité.
BEYROUTH - En resserrant son propos sur les artistes du Moyen-Orient, l’édition 2016 de Beirut Art Fair, la principale foire d’art contemporain du Liban, organisée par la Française Laure d’Hauteville, a franchi une étape importante dans sa jeune carrière. Des traces de son positionnement original, qui s’étendait jusqu’à l’Asie du Sud-Est, subsistaient çà et là, comme chez Baudoin Lebon (Paris) qui exposait une artiste coréenne, et des incongruités affleuraient, avec la présence par exemple de Carlos Cruz-Diez ou de Vasarely, mais l’ensemble est apparu nettement plus homogène que les années précédentes.
La tenue au cœur de la foire d’une exposition non commerciale sur les artistes libanaises actives entre 1945 et 1975 n’a pas peu contribué à asseoir cette impression. Une initiative à renouveler et qui ne devrait pas être trop difficile à organiser, à en juger par l’étendue des collections privées d’œuvres de la scène moderne et contemporaine moyen-orientale qu’ont constituées deux des trois membres du comité de sélection de la foire, Basel Dalloul et Abraham Karabajakian.
Autour de cette présentation de qualité muséale, les 23 galeries réunies ne faisaient pas toujours bonne figure, même si l’on relève un écrémage important par rapport aux éditions précédentes. Une poignée de français avaient fait le déplacement, dont Françoise Livinec (Paris) qui exposait entre autres le Syro-Néerlandais Rabi Koria. Éloigné de son pays de naissance depuis plus de vingt ans, ce dernier a cependant voulu témoigner des désastres de la guerre, avec un grand panneau de céramiques peintes traversé par un fleuve Euphrate rouge sang évoquant la ville martyre de Deir es-Zhor (proposé à 13 000 €).
Sans être nécessairement reliées aux événements qui secouent la région, les œuvres, surtout de la peinture, affichaient dans l’ensemble une tonalité sombre et un traitement sage. C’est dans la nouvelle section « Revealing » (« Révélation ») que l’on pouvait trouver des pièces conventionnelles dans leur sujet mais plus modernes dans leur traitement : des scènes ordinaires du quotidien des femmes d’Alger par Fella Tamzali ou des paysages autour de Ramallah par le Palestinien Rafat Asa.
Convaincre les poids lourds
Aujourd’hui, alors que la foire a établi son positionnement, il lui reste à convaincre les poids lourds de la région à s’engager plus activement (la galerie Agial par exemple qui n’a mis qu’un pied dans la foire) ou à y participer. On recense peut-être moins de grosses fortunes et d’expatriés occidentaux à Beyrouth qu’à Dubaï ou Abou Dhabi, mais la ville peut compter sur la riche diaspora libanaise qui construit de multiples tours, au détriment du patrimoine, et capitaliser sur une histoire trimillénaire que l’on peut toucher du doigt. Malgré la guerre à deux cents kilomètres de là et l’équilibre instable entre ses communautés instrumentalisées par les grandes puissances de la région, le Liban n’est pas l’Irak. L’an dernier, le chiffre d’affaires annoncé était de 3,2 millions de dollars ; cette année, la valeur totale de l’assurance des œuvres mises en vente était de 4 millions de dollars. Des chiffres encore modestes qui ne peuvent que grossir.
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Beirut Art Fair gagne en cohérence
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Abonnez-vous dès 1 €Rabi Koria, Dher Is Zhor, 2016, technique mixte sur ceÌramique, 120 x 195 cm. Courtesy Galerie Françoise Livinec.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°464 du 30 septembre 2016, avec le titre suivant : Beirut Art Fair gagne en cohérence