La Fiac organise pour la première fois « (Off)icielle », une foire satellite consacrée à la création émergente. Malgré une localisation excentrée, les soixante-huit galeries espèrent tirer parti de l’image de la Fiac.
Chaque cru de la Fiac arrive avec son lot de nouveautés, et l’innovation de cette 41e édition ne laisse personne de marbre. (Off)icielle, foire satellite dédiée à la création émergente, réunit pour la première fois près de soixante-dix galeries internationales. « Le fil conducteur est la découverte, nous nous concentrons sur l’émergence, explique Jennifer Flay, à la barre de l’événement Fiac depuis onze ans. Nous voulons montrer des galeries – jeunes et moins jeunes –, des artistes émergents mais aussi ceux [qui sont] peu mis en avant sur la scène de l’art, dans un esprit d’ouverture. » (Off)icielle a élu domicile à la Cité de la mode et du design, et la Fiac mise sur les navettes fluviales pour rallier ce 13e arrondissement.
Pourquoi la Fiac investit-elle ce terrain ? Certains évoquent une volonté de monopole de la part de la Foire [lire aussi p. 33], d’autres un « salon des refusés » de la Fiac. « La très grande majorité des galeries d’(Off)icielle n’a pas postulé à la Fiac », réplique sur ce point Jennifer Flay. Mais la source de cette nouvelle mouture découle plutôt du constat d’un « off » mouvant et inégal, et surtout du manque de place du Grand Palais, particulièrement depuis les travaux de la Cour carrée du Louvre, écrin jusqu’en 2010 des galeries vouées à la création émergente. On retrouve d’ailleurs, parmi les galeries participant à (Off)icielle, certains « ex » de la Cour carrée, notamment les parisiennes Bendana-Pinel, Laurent Godin ou Anne Barrault. Cette dernière explique : « Je suis nostalgique de la Cour carrée du Louvre, j’espère que l’on retrouvera cette énergie. À mon sens, il y avait vraiment besoin d’un lieu dédié aux plus jeunes ou aux plus petites galeries. » Martine de la Châtre, également des ex de la Cour carrée, renchérit : « Nous avons décidé de participer tout de suite, on espère avoir les retombées de la Fiac. » L’événement est globalement bien perçu et l’enthousiasme, palpable : la force de frappe de la foire et sa visibilité internationale pourraient être profitables. Reste que les stands sont fort chers pour certaines jeunes galeries (445 euros le mètre carré) et le lieu, très excentré par rapport au centre névralgique qu’est le Grand Palais.
Côté galeries, treize nationalités sont recensées et les étrangers constituent environ 60 % des effectifs. Les marchands américains et allemands sont particulièrement bien représentés (M B [Los Angeles] ou Lisa Cooley [New York] pour les premiers, Schwarz Contemporary ou Zink [Berlin] pour les seconds), mais aussi les anglais (Josh Lilley ou Rod Barton [Londres]) et les belges (Meessen de Clercq, Bruxelles). Parmi les Français, on trouve Samy Abraham, Emmanuel Hervé, Bertrand Grimont, Claudine Papillon, Eva Meyer…
Le nouvel événement se targue de donner un « regard à 360° à l’opposé de la standardisation », et l’on constate de fait la présence – encore timide – de galeries peu accoutumées aux grandes foires. André Magnin, spécialiste de l’art contemporain africain, expose ainsi des artistes confirmés tel Chéri Samba et des créateurs plus jeunes, comme le peintre malien Amadou Haya Sanogo ou le photographe sénégalais Omar Victor Diop. Les galeries Christian Berst (Paris) ou Ritsch-Fisch (Strasbourg), toutes deux dévolues à l’art brut et peu présentes dans les grandes foires d’art contemporain, sont également de la partie. « Le monde de l’art prend conscience que l’art brut entre désormais de “plain-pied” dans l’histoire », commente Christian Berst, qui s’apprête à ouvrir une galerie à New York. « Le stand comprend aussi bien des œuvres contemporaines que classiques. Je souhaite montrer que l’art brut n’est circonscrit ni dans l’histoire, ni dans la géographie, ni formellement ; son spectre est très vaste », poursuit le galeriste. On retrouve ainsi Dan Miller et ses superpositions d’écritures ou Carlo Zinelli avec plusieurs œuvres de la fin des années 1960, peu de temps avant sa mort, soit deux noms connus aux côtés de découvertes plus récentes.
Sous le signe de la découverte
Certains parient sur le risqué solo show. C’est le cas de Martine et Thibault de la Châtre, dont le stand est intégralement dédié à Moussa Sarr, qui montre notamment son tapis volant (Rising Carpet, 2013, télécommandé grâce à des drones), mais aussi des photos, vidéos ou sculptures. « Moussa est un artiste très dynamique, il a une actualité importante », commente Martine de la Châtre. L’exposition personnelle est également l’option choisie par Bendana Pinel avec un stand consacré aux photos-sculptures d’Alejandra Laviada, ou par Lisa Cooley qui invite Cynthia Daignault dans son espace. Rod Barton présente quant à lui un ensemble de toiles du Norvégien Kenneth Alme, après lui avoir consacré une exposition monographique au sein de sa galerie.
Anne Barrault joue la carte du « made in France ». « J’ai choisi trois Français, j’avais envie de les montrer à Paris en signe de soutien à la création française », explique la galeriste. Se côtoient ainsi les installations de Sarah Tritz, les toiles de Guillaume Pinard et le travail de Dominique Figarella, récemment exposé à la galerie. La Galerie de Roussan a pris au mot (Off)icielle, placée sous le signe de la découverte. « Nous avons joué le jeu de la Fiac axée sur la nouveauté ou les redécouvertes en choisissant des artistes peu ou jamais montrés chez nous. Nous avons orienté le stand autour de l’objet photographique dans trois versions très diverses », précise sa codirectrice Anne Bourgois. Juliette Mogenet se sert de la photo comme matière première, Lukas Hoffmann mêle techniques classiques et sujets contemporains quand le duo formé par Petra Koehle et Nicolas Vermot Petit-Outhenin présente une sculpture de photos monochromes. Ailleurs, on retrouve chez melanieRio (Nantes) Nicolas Milhé, récemment couronné par le Prix Maif pour la sculpture contemporaine, et chez Semiose (Paris) les sculptures de Laurent Le Deunff (également présent dans le programme « Hors les murs ») ou la maquette de l’ours qui avait abrité la performance d’Abraham Poincheval au Musée de la chasse et de la nature l’an dernier. Nombreuses sont ainsi les propositions de qualité pour cette fort attendue première édition d’(Off)icielle.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
(Off)iciellement attendue
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €- La Fiac illumine la scène parisienne
- La Fiac en ordre de bataille
- Les jeunes bousculent la Fiac
- Galeries françaises en représentation
- Des enseignes étrangères en nombre
- (Off)iciellement attendue
- Agenda de la fiac / (OFF)ICIELLE
- Le « off » et l’officiel
- Du contrat entre l’artiste et le galeriste
- Le collectionneur sur l’échiquier
- Les nommés du prix Duchamp 2014
- La Fiac repousse les murs
- La nuit des galeries parisiennes
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°421 du 17 octobre 2014, avec le titre suivant : (Off)iciellement attendue