Par la simplicité de sa scénographie, l’exposition du Musée Soulages réussit à transmettre l’esprit d’enfance et de liberté du sculpteur américain.
Rodez. Cet été, au sortir des salles consacrées au peintre des « Outrenoirs », les visiteurs du Musée Soulages de Rodez (Aveyron) sont enveloppés par la lumière et les couleurs d’Alexander Calder (1898-1976). En le voyant sur une photo d’Agnès Varda, on croit entendre son rire d’enfant dans une rue de Paris, mais c’est à travers une sorte d’aire de jeux au milieu d’un jardin que l’évoque Benoît Decron, directeur des Musées de Rodez Agglomération et commissaire de l’exposition. Dans la salle blanche d’une surface de 500 m2 laissée non cloisonnée, les œuvres présentées près des murs forment comme une haie libre ponctuée de bouquets d’une même espèce – gouaches, dessins, fils de fer, bronzes –, tandis qu’au centre deux îlots accueillent des sculptures isolées, les Stabiles et Stabiles/Mobiles. En guise d’arbre, le monumental Stabile Les Trois Ailes (1963), d’habitude exposé en plein air au Musée d’art moderne de Saint-Étienne. Au plafond, mis en mouvement par les souffleries de la climatisation, flottent les Mobiles, ces « géantes libellules » selon les mots d’André Masson, qui donnent son titre à l’exposition.
Les 103 œuvres viennent essentiellement du Musée national d’art moderne, de la Calder Foundation de New York et de collections privées, notamment la Galerie Maeght à Paris. « Comme toutes les expositions que nous organisons, celle-ci a été discutée avec Pierre Soulages, qui d’ailleurs a rencontré le sculpteur en 1947, précise Benoît Decron. C’est une vraie rétrospective, de 1925 à 1975, montrant toute la palette de Calder, dont certaines raretés comme Nuclea (1952), qui avait été créée pour la pièce d’Henri Pichette montée par Jean Vilar, deux Mobiles à moteur électrique et les fils de fer du “Petit Cirque” de la Calder Foundation. »
L’organique et le mécanique
Dans l’espace que Benoît Decron définit comme un « iceberg fractalisé », la visite peut se faire chronologiquement, mais le principe est que les œuvres dialoguent. Elles tracent un chemin à travers une production foisonnante : on ne connaît pas réellement le nombre de Mobiles créés par l’artiste américain et, à Saché (Indre-et-Loire) près de Tours, il peignait tous les matins dans sa « gouacherie ». Peu importe alors, selon le commissaire, le nombre d’objets exposés. À l’aide de quelques textes explicatifs (et de visites guidées, souvent par lui-même), il veut surtout faire sentir au public les sources d’inspiration de Calder, organiques mais aussi mécaniques, son humour, son état d’esprit totalement éloigné de la posture de l’artiste. Si la Calder Foundation donne des instructions très strictes de présentation pour les œuvres qui lui appartiennent, l’esprit même de leur créateur a permis des choix personnels au commissaire. Ainsi, Benoît Decron a décidé de présenter Joséphine Baker IV (vers 1928) sur un fond noir où elle brille doucement. Un bel hommage à la liberté d’un artiste généreux dont le catalogue trace un portrait sensible.
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Une aire de jeux pour Calder
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Abonnez-vous dès 1 €Alexander Calder, Dimanche dans le jardin, 1974, gouache, 110 x 75 cm, Fondation Maeght, Saint-Paul-de-Vence. © Photo : Fondation Maeght, courtesy Calder Foundation, New York.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°483 du 7 juillet 2017, avec le titre suivant : Une aire de jeux pour Calder