En 1908, une prestigieuse exposition est organisée au Grafton Galleries de Londres en l’honneur de Joaquín Sorolla (1863-1923).
Ses éblouissantes fulgurances de couleurs lui valent une critique unanime qui le considère alors comme « le plus grand peintre vivant ». Puis son nom s’efface devant une génération de jeunes artistes espagnols plus engagés et résolument modernes. Un siècle plus tard, la capitale britannique redonne à Sorolla, avec cette ample rétrospective réunissant soixante œuvres dont l’une des plus éloquentes, le Retour de la pêche, venue du Musée d’Orsay, la place que son éminent talent lui vaut. Répartis en sept salles, les thèmes chers au peintre de Valencia sont là, sa femme, ses enfants, les portraits de proches, l’Espagne avec ses difficultés sociales et ses costumes traditionnels, les paysages d’Andalousie et, surtout, ce qui lui assura sa célébrité, les scènes de plage, où les enfants courent et jouent sur le sable humide. Rien qui ne soit prétexte à de savants effets de contrastes, des jeux de nuances de blanc, des touches rapides qui mêlent aux ombres des teintes imprégnées de soleil. La mer scintille, l’air est vaporeux, la gaieté du jour agite les robes et entre jusque dans le tissu (Instantané, Biarritz, 1906). Inspiré par Goya, admirateur de Velázquez autant qu’amateur de photos, il joue sur les cadrages qui approfondissent les perspectives. Sorolla ne se disait pas impressionniste. Il a d’abord peint ce qu’il aimait, la famille, la nature, les coutumes de son pays.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°723 du 1 mai 2019, avec le titre suivant : Sorolla, dans la lumière hispanique