Intéressante et frustrante, voici la première grande exposition personnelle en Europe de l’artiste nord-américain Sam Gilliam, né en 1933 à Tupelo (Mississippi).
Le parcours dans les salles immaculées du Kunstmuseum permet de découvrir les œuvres réalisées pendant six années, de 1967 à 1973, certes déterminantes, mais qui n’offrent qu’un regard très limité sur un riche parcours de plus d’un demi-siècle de création. Artiste africain-américain passionné de free jazz, Gilliam s’installe à Washington D.C. en 1962, où il se lie aux peintres de la colorfield painting. Il réalise en 1965 des peintures hard-edge, des formes géométriques monochromes nettes et dynamiques, avant d’abandonner toute rigueur hypercontrôlée en 1967, année où commence cette exposition et où il réalise ses premiers beveled-edge paintings. Il verse de la peinture acrylique diluée sur de grandes toiles non apprêtées, pour ensuite les plier et les froisser alors que la peinture est encore fraîche. Puis il les tend sur des châssis dont les bords diagonaux inclinés sont orientés vers l’extérieur, conférant à l’œuvre des qualités spatiales particulières. En 1968, cet audacieux coloriste réalise ses premiers Drapes. Il renonce au châssis et enduit de peinture de grandes toiles qui flottent avec souplesse, fixées en plusieurs points au plafond ou au mur, parfois aussi disposées sur le sol. La nouveauté de ces Drapes réside dans la diversité des formes aléatoires renouvelées à chaque présentation. Il est vraiment dommage que l’exposition s’arrête en 1973, Gilliam est toujours vivant, et il a beaucoup créé depuis quarante ans !
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°715 du 1 septembre 2018, avec le titre suivant : Sam Gilliam, sept années de création