Le Palais Fesch aborde la grande épopée napoléonienne à travers l’équipement des bivouacs de l’Empereur. Édifiant.
AJACCIO - La stratégie militaire de Napoléon reposait sur la rapidité et la mobilité de ses troupes. Aussi pour ne pas être ralentis par d’inutiles bagages, les hommes dormaient à la belle étoile, emmitouflés dans leur manteau. Sans aller jusque-là, l’Empereur qui cultivait l’image d’un chef proche de ses troupes, dormait souvent sous une tente, comme d’ailleurs nombre de ses prédécesseurs. La légende napoléonienne qui se nourrit de tout ce qui entoure son demi-dieu, s’intéresse cette fois, à Ajaccio au Palais Fesch-Musée des Beaux-arts, à son équipement domestique lors de ses nombreuses campagnes militaires, auxquelles il a consacré plus de la moitié de sa vie. Les admirateurs de Napoléon et ceux qui goûtent la petite histoire dans la grande trouvent là matière à nourrir leur imagination.
De sa lunette de campagne à sa tente, en passant par son bidet, tout l’équipement du randonneur guerrier est passé en revue. Son lit en particulier fait l’objet d’une étude minutieuse. Le matériel militaire a toujours été un moteur pour l’innovation industrielle. Les bambins d’aujourd’hui savent-ils ce que leur « lit parapluie » doit à Austerlitz et Wagram ? L’Empereur, dont les remarquables qualités d’organisateur touchant à la maniaquerie, n’a eu de cesse de harceler le serrurier Marie-Jean Desouches auteur d’un brevet en 1804 pour un lit pliant d’une seule pièce. En 1807, ce dernier reçoit la lettre suivante : « Sa Majesté désire, Monsieur, un petit lit de campagne assez léger et portatif pour que les matelas, rideaux et la ferrure puissent être transportés sur deux chevaux de bâts. Celui qui a été fait l’année dernier est beaucoup trop grand et trop lourd pour cet usage […] ». Suit un cahier des charges très précis. L’un de ces lits, précisément est exposé dans ce qui constitue le point d’orgue du parcours, une tente impériale d’époque, montée, avec le bureau de travail et le fameux lit.
Le gardien de musée indélicat
Le Mobilier national qui a prêté la plupart des objets et qui est à l’origine de l’exposition a pu reconstituer les trois matelas qui constituaient la literie, car telle la princesse au petit pois, l’Empereur dormait sur trois matelas remplis le premier de crin, le second de laine et le troisième de duvet. Napoléon qui aimait beaucoup son lit, l’a d’ailleurs emmené dans son exil à Sainte-Hélène. La reconstitution de la tente impériale fascine tellement les amateurs de reliques, que l’un des gardiens du musée s’est assis sur le fauteuil pliant, où l’Empereur avait posé son auguste postérieur, endommageant l’assise en cuir mais assurant à l’exposition une publicité planétaire selon les directeurs des lieux, Philippe Costamagna. Les dégâts sont minimes puisque le fauteuil est de nouveau en place.
L’exposition est « agrémentée » de tableaux de batailles, prêtés par le Musée national du château de Versailles, qui servent de décor à cet étalage d’équipement de bivouac et rappellent la geste napoléonienne. Ceux qui sont moins sensibles à cette dernière se reporteront avec intérêt à l’un des essais du catalogue qui raconte l’enfer des hommes de troupe qui marchaient jusqu’à 40 kilomètres par jour, emportant un paquetage de 25 kg, avec un équipement qui ferait hurler les randonneurs d’aujourd’hui. La mortalité était d’ailleurs bien supérieure dans les marches d’approche que pendant les combats. Un écho involontaire à la condition des poilus qui bénéficient d’un hommage dans le cadre de la commémoration du centenaire de la Grand Guerre, héritière d’une certaine façon des boucheries de celles de Napoléon.
Commissariat : Jehanne Lazaj
Nombre d’œuvres : 74
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Napoléon, le campeur impérial
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 12 mai, Palais Fesch-Musée des beaux-arts, 50-52 rue cardinal Fesch, 20000 Ajaccio
www.musee-fesch.com
tél : 33 (0)4 95 26 26 26, lundi, mercredi et samedi, 10h30-18h, jeudi, vendredi et dimanche, 12h-18h
catalogue Silvana Éditoriale, 127 pages, 15 €.
Légende photo
Tente et mobilier de campagne de Napoléon Ier, collection du Mobilier national, Paris. © Photo : Mobilier national/Isabelle Bideau.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°412 du 25 avril 2014, avec le titre suivant : Napoléon, le campeur impérial