« Che vuoi », « Que me veux-tu ? » : c’est ce que le diable demande à Alvare, jeune fanfaron venu imprudemment invoquer Belzébuth.
Alvare souhaite que ce dernier se transforme en épagneul puis en femme, la belle Biondetta, qui va ensuite user de ses charmes pour séduire Alvare… Parue en 1772, la nouvelle Le Diable amoureux de Jacques Cazotte a inspiré une installation extrêmement poétique – le mot n’est pas galvaudé – de Francisco Tropa (né en 1968), spécialement réalisée pour Le Creux de l’enfer – site lui-même associé à de nombreux récits populaires diaboliques. Che vuoi ?, titre de l’œuvre, est une installation simple (une lanterne magique), mais d’une grande sophistication. Deux lampes fixées sur d’élégants tubes en acier projettent leur lumière sur une mise en scène centrale composée d’un seau rempli de charbon suspendu au-dessus d’un tabouret face à une porte entrouverte. Les contours que la lumière dessine sont à leur tour projetés sur deux écrans pour dessiner d’étranges mais fascinantes images. On ne sait d’abord pas qui de l’installation centrale (le seau et la porte) ou des images fait œuvre, avant de comprendre que c’est l’ensemble du dispositif, lanternes comprises, qui fait œuvre. À la Biennale de Venise, en 2011, Francisco Tropa avait déjà expérimenté ce principe de laboratoire optique. Au Creux de l’enfer, il le porte à un degré de raffinement inédit qui fait de Che vuoi ? un chef-d’œuvre. Ce théâtre d’ombre et de lumière évoque la caverne de Platon, bien sûr, et son allégorie de la vérité. Il nous invite à réfléchir sur l’articulation entre le réel et l’illusion – incarnée dans Le Diable amoureux par la belle Biondetta. D’ailleurs, comment ne pas songer, devant Che vuoi ?,à une autre œuvre clé – ou « à clés » : Étant donnés : 1° la chute d’eau 2° le gaz d’éclairage…, de Marcel Duchamp (1946-1966), allégorie du voyeurisme et du désir en art. Ah oui, Lacan voyait dans le « Che vuoi » de Cazotte une expression du désir. Mais que diable aurait-il pensé de l’œuvre de Tropa ?
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Les diableries de Francisco Tropa
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°757 du 1 septembre 2022, avec le titre suivant : Les diableries de Francisco Tropa