Le Centre Pompidou-Metz présente un panorama des réalisations les plus emblématiques de la création contemporaine nippone depuis les années 1970.
Metz. La fascination réciproque qu’entretiennent la France et le Japon ne date pas d’hier. D’un point de vue historique, l’idylle remonte au milieu du XIXe siècle, lorsque le pays du Soleil-Levant s’ouvre, un peu malgré lui, à l’Occident. Les Français découvrent alors la richesse d’une culture longtemps repliée sur elle-même. En apparence, tout oppose les deux pays. D’un côté, l’architecture épurée et éphémère des temples shintoïstes ou bouddhistes, de l’autre la pierre éternelle des cathédrales gothiques ; les jardins zen de Kyoto, Le Nôtre à Versailles ; un idéal fondé sur le vide, la perfection, l’humilité face aux fastes ornementaux, un hédonisme extraverti tout latin. En réalité, les points communs sont multiples, universels, et n’ont cessé depuis de nourrir les échanges franco-nippons.
Tout le mérite de cette vaste exposition consiste à montrer comment le Japon, jadis lieu d’expérimentation du modernisme occidental, a su s’en affranchir pour s’affirmer en nation dont la singularité est devenue à son tour source d’inspiration pour l’Occident. Des estampes de l’ukiyo-e à l’esthétique « kawaï », du groupe Gutaï aux mangas, de Fluxus Tokyo au Butoh, du nô au cinéma ou au design japonais. Depuis l’après-guerre, l’archipel d’Extrême-Orient a su exporter sa culture comme ses technologies de pointe. Les avant-gardes japonaises restent cependant relativement mal connues en France, où la dernière exposition marquante « Japon des avant-gardes, 1910-1970 » date de 1986 au Centre Pompidou.
Des sections thématiques
L’exposition conçue par Yuko Hasegawa au Centre Pompidou-Metz, au sein du bâtiment de Shigeru Ban, en prend le relais en s’intéressant à la période contemporaine sur les dernières décennies. Autant dire une gageure, tant le champ est vaste, kaléidoscopique. On en ressort avec le sentiment d’une synthèse ambitieuse et réussie de l’art contemporain et des arts visuels japonais au fil d’un parcours thématique en six sections, comme autant d’îlots d’un archipel en perpétuel changement : « Objet étrange-corps post-humain », « Culture pop et néo-pop », « Collaboration/Participation/Partage », « Politiques et poétiques de la résistance », « Subjectivité flottante », « Matérialité et minimalisme ».
Les grands noms incontournables de l’art, de la photographie et de la mode ne manquent pas à l’appel : Kazuo Ohno, Takashi Murakami, Nobuyoshi Araki, Hiroshi Sugimoto, Tadashi Kawamata, Yayoi Kusama, Yellow Magic Orchestra, Rei Kawakubo, Yohji Yamamoto, Yoko Ono, Yoshitomo Nara, Rinko Kawauchi… Un passage obligé qui laisse la place aux découvertes. Ainsi de la très grande installation de Kishio Suga, de la robe électrique d’Atsuko Tanaka, des invraisemblables machines de Kenji Yanobe, de ce kimono traditionnel à motif de parachutes signé Yuken Teruya ou du dispositif de Kohei Nawa, cascade d’huile de silicone propice à la contemplation évoquant la pluie noire radioactive sur Hiroshima, de triste mémoire. Suivant la très érudite exposition « Japan-ness » consacrée à l’architecture, cette saison japonaise est ponctuée d’une programmation de spectacles vivants, performances, concerts d’artistes aussi renommés que Ryoji Ikeda ou Ryuichi Sakamoto. Un parfait avant-goût d’une année qui verra la culture japonaise éclore un peu partout dans l’Hexagone, tels les cerisiers en fleur à hanami.
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Le Japon, archipel kaléidoscopique
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Abonnez-vous dès 1 €jusqu’au 5 mars 2018, Centre Pompidou-Metz, Parvis des Droits de l’Homme, 57020 Metz.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°492 du 4 janvier 2018, avec le titre suivant : Le Japon, archipel kaléidoscopique