Ce biberon en terre cuite prit le relais du sein maternel pour nourrir un enfant grandissant ; cette spatule a servi à préparer un collyre pour soulager une douleur, soigner une maladie ; cette fausse dent en os d’animal, maintenue par un fil d’or, a rendu confiance à une aristocrate au sourire abîmé.
Le point commun de ces objets archéologiques ? Ils racontent comment, du néolithique au XIXe siècle, les personnes vulnérables ou blessées étaient prises en charge par leurs proches et la société. À partir d’une exposition itinéraire conçue par l’Inrap à la suite d’un colloque sur l’archéologie de la santé, le Chronographe, situé au cœur du site archéologique de Saint-Lupien à Rezé, près de Nantes, a conçu un parcours thématique sur cette problématique autour d’objets exhumés dans la région nantaise. C’est ainsi un nouveau champ de la recherche qui se dévoile aux yeux des visiteurs. Avec émerveillement, on découvre comment nos ancêtres pratiquaient la chirurgie dès la préhistoire – expérimentant la trépanation sur les animaux avant de la pratiquer sur leurs congénères, avec un taux de survie de 70 % ! –, prenaient soin de leur corps (passant leurs cheveux au peigne à poux ou utilisant un strigile pour racler leur peau après l’effort), et réparaient les corps abîmés, comme en témoignent les instruments élaborés au XVIe siècle par Ambroise Paré qui, s’il fut chirurgien du roi, s’attacha aussi bien à prendre soin des corps souffrant des plus pauvres en mettant au point des prothèses modernes pour les amputés des champs de bataille. Une mise en perspective stimulante de nos problématiques contemporaines.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°728 du 1 novembre 2019, avec le titre suivant : L’Archéologie du souci de l’autre
