Nul n’est décidément prophète dans son pays, si l’on en croit la fortune critique dont a joui longtemps Hokusai au Japon. Si ses compatriotes jetèrent un regard teinté d’incompréhension, voire de condescendance sur celui qu’ils tenaient pour un « vulgaire » artisan d’ukiyo-e, les collectionneurs et amateurs d’art français s’entichèrent littéralement de lui dès la première moitié du xixe siècle !
Conçue par Hélène Bayou, l’exposition met ainsi en lumière l’extraordinaire bouillonnement intellectuel qui régnait alors à Paris et le regard aiguisé, voire prémonitoire, de certains écrivains et critiques à l’égard du maître nippon. Sur fond de japonisme, mais aussi de rivalités et de controverses, intellectuels et marchands se disputent ainsi la « découverte » du peintre et s’approprient tour à tour la compréhension de son œuvre visionnaire. Entre fantasmes et analyses rigoureuses, se construit peu à peu un discours sur le « génie Hokusai », seul artiste japonais digne d’être l’égal des plus grands maîtres de l’art occidental.
La construction du mythe
Ainsi Philippe Burty, le créateur du mot « japonisme », n’hésite pas à le comparer à Watteau pour l’élégance, Daumier pour l’énergie, Goya pour la fantaisie, et Delacroix pour le mouvement ! Selon Théodore Duret, l’ardent défenseur des impressionnistes, Hokusai est « le plus grand artiste que le Japon ait produit ». Mais c’est à Edmond de Goncourt et Henri Focillon qu’il revient de parachever la construction du mythe. Si le premier l’aborde comme un artiste du xviiie siècle, rendant un hommage vibrant à « l’affolé de son art » dont il loue la subtilité de la palette, le second voit en lui un classique, héritier des grands peintres des xve et xvie siècles.
Aux visiteurs du musée Guimet de se faire désormais leur propre jugement et de regarder l’œuvre d’Hokusai « comme s’il s’agissait d’un anonyme sans patrie et sans âge », selon le propre vœu d’Hélène Bayou. Sage conseil...
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Hokusai : une passion plus française que japonaise
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°603 du 1 juin 2008, avec le titre suivant : Hokusai : une passion plus française que japonaise