SAINT-NAZAIRE
Partir d’un faisceau de faits historiques. Leur conférer une forme, susceptible d’être exposée dans un lieu dévolu à l’art contemporain.
Leur imaginer, aussi, une suite, qui se déroule sous nos yeux, comme par un rétroéclairage de l’actualité. Une « généalogie fictive », ainsi que le suggère l’intitulé du cycle développé par le commissaire invité Guillaume Désanges. Avec François Piron, Désanges avait, déjà, cosigné la très mémorable exposition « L’esprit français », en 2017 à la Maison rouge. « Contre-vents » en est, d’une certaine façon, le prolongement. Ou plutôt l’agrandissement à la loupe par le duo d’un détail entrevu à cette occasion : la convergence des luttes ouvrières, étudiantes et paysannes dans l’Ouest de la France au cours des années 1970, sujet aussi peu étudié que passionnant. L’une des difficultés était de donner à voir ce phénomène quand les œuvres qu’il a produites (films, pièces de théâtres, chansons…) ont laissé peu de traces. Les deux commissaires ont donc opté pour un procédé de reproduction homogène des affiches, tracts et autres documents épars, créant une charte graphique efficace. Le système d’accrochage déployé dans l’espace à la façon d’une architecture précaire invite pour sa part à rentrer dans le dispositif, que complète une bande-son très évocatrice de Dominique Petitgand. L’économie de moyens répond à la radicalité du propos politique, tandis que le choix du thème, en s’ancrant dans un territoire, prouve que le prisme de l’art contemporain peut aussi privilégier les circuits courts.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°725 du 1 juillet 2019, avec le titre suivant : Généalogie de la contre-culture